Européennes 2019 : si Macron perd les élections, c’est la fin définitive de son quinquennat

Macron face à son destin. Dans quelques heures, les Français sont appelés à voter aux Européennes, une élection cruciale pour l’opposition française, mais surtout pour le président Macron dont la candidate Nathalie Loiseau porte le dernier espoir d’un Macronisme qui n’arrive toujours pas à convaincre.

Macron et son gouvernement jouent gros ce dimanche 26 mai. Une défaite ne sera certes pas la fin du mandat du plus jeune président de la Vème République. Mais, elle portera sûrement le dernier coup de poignard à un gouvernement à bout de souffle, fragilisé par les événements actuels.

Le contexte est tout particulier. Les Européennes 2019 arrivent au moment où le panorama politique français connaît un changement brutal. Le PS est dans le coma et risque probablement de disparaître. La droite (Les Républicains) sous Wauquiez n’a jamais été aussi inaudible. Le Centre incarné par Bayrou reste dans un mutisme inquiétant.

Face à cette situation, seuls deux partis sont capables aujourd’hui de tenir tête à Macron : le Rassemblement National (RN) Marine Le Pen et la France Insoumise (LFI) de Jean-Luc Mélenchon. Contrairement à 2017 où elle avait fait un très bon score à la présidentielle, la LFI semble avoir perdu de sa force, minée par une forte division au sein de son mouvement mais aussi par les affaires judiciaires qui ont visé le parti.

Face à Macron, il n’y a pour l’instant qu’un seul adversaire : le RN. Jordan Bardella, candidat du parti qui veut infliger à la LREM une défaite historique, semble avoir déjà pris le dessus sur son rival, selon les sondages. Le parti de Marine Le Pen pourrait en effet remporter les Européennes en raison d’un certain nombre de facteurs qui lui donnent un avantage très net.

En effet, face à Macron, il y a un parti d’extrême-droite qui a su surfer sur la vague populiste qui gagne le continent. Oui, il faut bien le dire, le projet européen est en danger et risque de sauter. En Italie, en Hongrie, En Allemagne, en Espagne…les partis d’extrême-droite gagnent du terrain et menacent sérieusement d’en finir avec l’Union Européenne.

Si en Allemagne et en Espagne, ils n’ont pas encore réussi à prendre le pouvoir. En France, ils sont bien partis pour y arriver et savent que les Européennes sont d’une importance primordiale pour remobiliser leur base en vue de la présidentielle 2022, d’autant plus que la défaite de Marine Le Pen en 2017 et le départ de Florian Philippot avaient été un coup pour ce parti.

L’Extrême-Droite donné favori dans ces élections européennes a une politique qui est à l’opposé de celle d’Emmanuel Macron et le contexte actuel en France semble carrément jouer en sa faveur. La Crise des Gilets Jaunes qui a éclaté en novembre dernier a été une immense opportunité pour sa survie.

Le temps passe très vite et joue contre Macron. Perçu à la suite de son élection de 2017 comme le dernier espoir d’une UE à bout, Macron ne tient plus. Son projet d’une Europe fédérale, sévèrement critiqué par une Extrême-Droite qui lui reproche de vouloir tout simplement provoquer une mort lente de la France, est voué à l’échec.

D’ailleurs, au lendemain de son fameux discours tenu à La Sorbonne, les critiques à Droite n’avaient pas manqué. « Emmanuel Macron s’est exprimé depuis la Sorbonne pour donner sa vision, ou plutôt son programme de la construction européenne. Il assume sa position tranchée sur le sujet. (…) Selon lui, l’Europe sera fédérale, un point c’est tout. La souveraineté sera européenne et ne sera donc pas française, ni espagnole, ni allemande, ni polonaise », s’inquiétait Henri Guaino dans un édito publié en 2017 dans Sud Radio.

Sur la question de l’Europe, la position du RN est claire. « Il y a deux choix : soit le fédéralisme et le transfert de tous nos pouvoirs à la Commission européenne, c’est ce que veut Emmanuel Macron, soit une Europe des Nations où chaque pays décide de ce qui est bon pour lui, c’est ce que nous voulons ! », a tranché ce 22 mai Jordan Bardella sur Europe 1.

L’autre point de discorde à l’échelle européenne est la question de l’immigration. Macron est aujourd’hui accusé (peut-être à tort) d’être un mondialiste. Pour ces détracteurs, il ferait partie de ce groupe d’individus pilotés par l’UE dont la mission consiste à ouvrir les frontières européennes aux habitants du tiers-monde. D’ailleurs, le fait que l’immigration ait été le grand absent du Grand Débat donne raison à ses détracteurs.

Sur l’immigration, la position de Macron est sans équivoque. Pour le président français, la France doit accueillir des réfugiés car c’est son « identité » comme il l’avait dit en 2017 lors d’une conférence de presse conjointe avec Angela Merkel, la chancelière allemande. En 2018, Emmanuel Macron se disait d’ailleurs ouvertement favorable à ce qu’il y ait des sanctions contre des Etats qui refusent d’accueillir des migrants. A cette date, il faisait allusion à l’Italie de Salvini et à la Hongrie de Viktor Orban.

La position du Rassemblement National est claire et nette sur l’immigration. « Emmanuel Macron a battu absolument tous les records d’immigration. 122 000 demandes d’asile l’an dernier, 262 000 titres de séjour et 50 000 mineurs isolés qui, en grande partie, n’en sont pas et demeurent à la charge des départements et des collectivités qui aujourd’hui n’en peuvent plus. (…) Le seul moyen aujourd’hui de mettre un peu d’ordre dans la politique migratoire, c’est d’avoir des frontières nationales », a martelé Bardella dans un télévisé ce 23 mai sur BFMTV.

L’échec de Macron sur la question de l’Europe est presque certain. Et d’ailleurs, dans la presse américaine, une débâcle est attendue. « Macron veut raviver l’Europe, mais les élections européennes pourraient tuer ses projets », titrait il y a deux semaines le Washington Post. Et il y a quatre jours, le New York Times titrait : « Les Grandes Ambitions de Macron sont en jeu dans ces élections européennes ».

Si Macron échoue à l’échelle européenne, il pourra se racheter sur le plan national. Hélas, cela risque de ne pas être le cas. En effet, tout à l’heure, j’évoquais la crise des Gilets Jaunes qui est un coup extrêmement dur pour Macron qui s’est ridiculisé devant toute l’Europe en revenant sur l’ensemble des mesures prises avant la crise.

Le gel de la taxe carbone, la baisse des impôts annoncée, la violence policière contre les Gilets Jaunes qui ne réclament que des meilleures conditions de vie, l’Affaire Benalla, la suppression de l’ENA, l’image de président des riches qui lui colle aux basques et bien d’autres scandales ont fini par clouer Macron au pilori. En six mois de crise des Gilets Jaunes, il a presque perdu toute sa crédibilité et ne convainc désormais que très peu de Français-e-s.

La situation de Macron est d’autant plus délicate que sa candidate aux Européennes, Nathalie Loiseau, est empêtrée dans une série de scandales. Elle aurait rejoint une liste d’Extrême-Droite pendant ses études à Sciences-Po. Elle a récemment été accusée d’avoir banalisé l’homophobie.

Cependant, il n’y a pas que Macron à porter le chapeau. Son gouvernement, un mélange d’anciens partisans de la gauche et de la droite, est aussi un désastre. Le premier ministre Edouard Philippe est totalement dépassé par la crise des Gilets Jaunes, quant à Christophe Castaner, son ministre de l’Intérieur, il passe pour un « boucher ».

Il faut rappeler que c’est sous son ministère que l’usage du LBD a fait des dégâts physiques considérables en France. Plusieurs manifestants ont d’ailleurs perdu un œil, dont le très célèbre Jérôme Rodrigues, des reporters sont interpellés en plein exercice de leurs fonctions. Des journalistes sont convoqués par les services de renseignement (DGSI) pour avoir diffusé des informations classées top secret. Bref, sous Macron et Castaner, la démocratie française a pris un sacré coup.

C’est dans ce contexte que Macron va affronter le Rassemblement National qui a su tirer profit d’une situation assez confortable où presque tous les partis politiques (gauche ou droite) tirent sur un président dont le quinquennat est presque mort. Macron joue gros ce dimanche. S’il perd les élections, c’est toute sa crédibilité qui s’effondrera et il pourra définitivement mettre fin à ses rêves de briguer un second mandat car il ne l’aura pas.