Trump à Mohamed VI : « reconnais Israël ou on ne reconnaîtra pas la souveraineté du Maroc sur le Sahara Occidental »

Donald Trump a marqué un gros coup diplomatique en annonçant ce 10 décembre la normalisation des relations entre le Maroc et l’Etat d’Israël. Cet événement, largement commenté dans la presse internationale, avait été annoncé il y a plus d’un mois par Lecourrier-du-soir.com, ce qui fait que sa réalisation ce jeudi n’est en rien une surprise pour notre rédaction.

Toutefois, s’il y a un détail à souligner, c’est la stratégie adoptée par Donald Trump pour faire plier le roi Mohamed VI. En effet, nul n’ignore les derniers incidents qui se sont produits au Sahara Occidental en novembre dernier lorsque le Maroc a déployé son armée sur ce territoire. Une décision qui avait suscité un tollé mondial et qui avait mené le Polisario à annoncer la fin du cessez-le-feu en vigueur.

Dans cette analyse, il ne s’agira pas d’entrer en détails sur les décisions du Maroc de déployer ses troupes au Sahara Occidental. Ce qui est sûr, c’est que la décision n’a pas joué en sa faveur car ayant été exploitée par de fins stratèges qui, depuis Washington, ont suivi de près le déroulement d’une opération militaire hasardeuse.

Donald Trump et ses conseillers ne sont pas dupes. Ils ont en effet appliqué les mêmes recettes que celles appliquées pour forcer la main au Soudan. Rappelons qu’il y a un mois, pour exiger du Soudan qu’il reconnaisse Israël, l’administration Trump n’a pas hésité à jouer la carte du chantage en demandant au gouvernement soudanais de choisir entre normaliser avec Israël et redevenir un pays fréquentable ou refuser de le faire et rester un Etat terroriste.

Le chantage ne pouvait que porter ses fruits étant donné que le Soudan, placé dans une liste terroriste internationale, est plongé dans une crise financière sans précédent. Les Soudanais n’avaient ainsi pas d’autre choix que d’accepter. A la fin du mois d’octobre, le pays a annoncé sa normalisation avec l’Etat Hébreux, avec lequel il a toujours entretenu des relations conflictuelles.

Il ne reste à Trump qu’un mois pour quitter la Maison Blanche et céder sa place à Joe Biden qui devient dès janvier le 46ème président des Etats-Unis. Mais, le gros problème est que le départ de Trump arrive au très mauvais moment pour Netanyahou qui a jusqu’ici joui d’un traitement de faveur de la part des Etats-Unis qui ont reconnu Jérusalem comme capitale d’Israël, qui se sont retirés de l’Accord Nucléaire de 2015 signé avec l’Iran et qui ont récemment annoncé qu’ils reconnaîtront les produits fabriqués dans les colonies juives comme étant des produits israéliens. D’ailleurs, c’est sous Trump qu’un secrétaire d’Etat américain (Mike Pompeo) s’est rendu dans les colonies israéliennes, une première dans l’Histoire de ce pays.

Trump et Netanyahou ont un projet commun : faire en sorte que tous les pays arabes reconnaissent Israël. Ce projet est en cours depuis plusieurs mois et s’avère être un succès total. En effet, le Bahreïn et les Emirats Arabes Unis ont reconnu Israël, l’Arabie Saoudite le fera dans un futur proche. Il n’y aucun doute là-dessus.

Mais, pour obtenir la normalisation avec le Maroc, il fallait trouver une stratégie efficace pour y arriver. Et la seule trouvée par l’administration Trump a été de recourir au chantage, en menaçant le roi Mohamed VI de normaliser avec l’Etat Hébreux sous peine de voir les Etats-Unis reconnaître le Sahara Occidental comme un Etat indépendant, ce qui serait un désastre politique pour le Maroc.

En politique étrangère, seuls comptent les intérêts et cette leçon, personne ne l’apprendra aux Américains. Et Trump n’a fait que suivre au pied de la lettre une doctrine politique américaine vieille de plusieurs décennies. Qu’a-t-il fait? Et bien, il a exigé du roi du Maroc qu’il reconnaisse Israël pour que les Etats-Unis continuent de reconnaître l’autorité du Maroc sur le Sahara Occidental. Et c’est exactement ce qui s’est passé.

Dos au mur, le Maroc n’avait pas trop de choix. Il avait le choix entre refuser de normaliser avec l’ « entité sioniste » (comme le disent certains dirigeants politiques du monde arabe) ou voir une partie de son territoire disparaître. Le roi a fait son choix dans un contexte très tendu. La pilule est certes très amère, mais il faudra qu’il l’avale pour éviter le pire.

Trump et Netanyahou ont encore une fois marqué un gros coup par un chantage ignoble.