Le Sénégal et la Françafrique : Sonko a deux choix : sauver l’honneur ou disparaître !

(Une analyse du journaliste Cheikh DIENG)

Ousmane Sonko a un très bel avenir politique devant lui. Il n’y a aucun analyste politique crédible qui peut remettre en cause cette assertion. Et sa participation, la première à une élection présidentielle, le confirme. Le jeune candidat du mouvement Pastef, « les Patriotes », le plus jeune des candidats à l’élection présidentielle sénégalaise de ce 24 juin 2019 a été la seule et unique révélation.

Certes Ousmane Sonko n’a pas remporté la présidentielle (Macky Sall ayant finalement été déclaré vainqueur), cependant, le nombre de voix impressionnant (687 065) qu’il a récoltées a fait de lui un futur présidentiable. L’hypothèse qu’il puisse un jour devenir président du Sénégal est d’autant plus forte qu’il a su confédéré autour de sa candidature  (et en un laps de temps record) un véritable électorat composé en majorité de jeunes, ce qui est un atout majeur dans une Afrique de l’Ouest où 64% de la population a moins de 25 ans.

La propulsion d’Ousmane Sonko au-devant de la scène politique sénégalaise s’explique par plusieurs facteurs : sa jeunesse, sa position téméraire sur le FCFA et les contrats pétroliers signés entre le Sénégal et les puissances occidentales, notamment la France, mais aussi son immense courage au moment de dénoncer la corruption qui gangrène classe politique sénégalaise.

Ce ne sont pas les seuls facteurs. Et heureusement d’ailleurs. Son éclosion arrive dans un contexte particulier marqué par un état de paralysie totale qui a gagné la classe politique. Le PS, dont l’ex leader Ousmane Tanor Dieng, a rejoint Macky Sall, ne tient plus qu’à un fil ; le PDS, dont le leader Karim Wade, a été contraint à l’exil, ne convainc plus. Une bonne partie de se sympathisants ont récemment rejoint Sonko ou Idrissa Seck.

Quant à Idrissa Seck, sa carrière politique pourrait bientôt connaître une fin. Sa défaite lors de cette présidentielle semble avoir été le dernier coup de grâce pour lui. Même en cas de retour, je doute fort qu’Idy puisse briller. La fougue de Sonko, les nombreux ralliements à ce dernier ainsi que le score impressionnant du leader de Pastef à la présidentielle ont siphonné son électorat.

L’avenir de Sonko est d’autant plus radieux que l’actuel président sénégalais, Macky Sall, qui vient d’entamer son second mandat n’osera pas modifier la Constitution sénégalaise pour en briguer un troisième. Ce coup de force sèmera le chaos politique au Sénégal et Macky ne prendra pas ce risque.

Après une analyse succincte du paysage politique sénégalais, on se rend compte très vite que la voie de Sonko est déjà tracée. Il se dirige sûrement mais lentement vers le palais. Toutefois, dans ce périple qui devra le mener à la présidence, le jeune candidat aura à faire face à d’énormes obstacles, dont le plus grand est sans aucun doute : la Françafrique.

En effet, il y a deux jours, Robert Bourgi, surnommé « Monsieur Afrique de l’Elysée », avait déclaré ceci : « Sonko incarne l’avenir de demain, Idrissa Seck est un homme du passé ». Cette phrase, prononcée par un homme qui a côtoyé pratiquement tous les présidents africains francophones ces 30 dernières années, veut tout dire.

Sonko, l’avenir politique du Sénégal, est déjà dans le collimateur de la France, une France qui n’est pas prête à céder ces innombrables privilèges en Afrique (or, pétrole, diamant, F CFA…) au nom d’un panafricanisme qu’elle n’a jamais supporté d’ailleurs. Si Sonko prétend diriger le Sénégal, il devra alors s’attendre à une bataille rude contre l’ex puissance coloniale.

Et dans cette bataille rangée, il n’y aura que deux choix : rejoindre le cercle très restreint de la Françafrique ou mener une résistance farouche. Dans le premier, il aura la certitude de pouvoir gouverner sans coup férir ; dans le second, il aura à faire face à un ostracisme violent sur le plan international.

L’avenir politique de Sonko est certes prometteur, mais fait d’embûches et d’obstacles. Si ses sympathisants pensent avoir déjà remporté la guerre, ils se trompent. Face à la Françafrique, il n’y a aucune politique de demi-mesure, encore moins de compromis. On existe ou on disparaît.