LibyeGate : Sarkozy, l’ennemi public numéro 1 en Afrique

Le contentieux entre Nicolas Sarkozy et le continent remonte au « Discours de Dakar ». Dans un réquisitoire violent, l’ancien président français avait fustigé « l’Homme africain » qui ne serait pas suffisamment entré dans l’Histoire à son goût. Depuis, bon nombre d’Africains sont remontés contre l’ex-locataire de l’Elysée. Une aversion qui s’est renforcée après l’intervention française en Libye qui a notamment causé la mort de Mouammar Kadhafi. Un conflit aux enjeux géopolitiques non avoués qui est à l’origine de la souffrance du peuple africain. Edito

Depuis le « Discours de Dakar », l’ancien président français Nicolas Sarkozy a perdu l’estime des Africains. En cause ? Son allocution prononcée le 26 juillet 2007 à l’université Cheikh Anta-Diop de Dakar, la capitale du Sénégal. « L’Homme africain n’est pas entré dans l’Histoire (…) » : ces quelques mots avaient provoqué l’ire de l’assistance ainsi que de l’Afrique entière. A ce moment-là, le chef de l’Etat ne se doutait guère que ce n’était que le début d’un divorce qui allait s’entériner le 20 octobre 2011, le jour de la mort de Mouammar Kadhafi renversé par l’intervention militaire occidentale menée sous l’égide de l’OTAN.

C’est pourquoi, la garde à vue de Nicolas Sarkozy a été saluée par la diaspora africaine de Paris. En effet, quelques Maliens sont descendus dans les rues de la capitale française, le 21 mars dernier, pour fêter cette « victoire » contre l’ancien locataire de l’Elysée, l’homme par qui le désordre est arrivé en Afrique, selon les dires des manifestants. Dans une vidéo, publiée par le site MaliJet, on peut apercevoir une personne arborant un masque à l’effigie de l’ex-président de la République, qui est en train de danser alors qu’il est entouré d’une foule en liesse.

Force est de constater : il y a un lien de causalité entre la Guerre en Libye (en 2011) et l’intervention militaire française au Nord-Mali (en 2012). Et pour cause : craignant un massacre de grande ampleur en Libye, la coalition internationale a fourni des armes aux insurgés afin d’affronter l’armée régulière gouvernementale. Problème : depuis la chute du président Kadhafi, il n’y a plus d’Etat libyen. Pire, les pays occidentaux qui participaient à cette guerre, notamment la France, ont déserté les lieux sans assurer une transition démocratique. D’où la multitude des problèmes qui gangrènent désormais le pays: la libre circulation d’armes à feu, la violence, le terrorisme, etc. A en croire une kyrielle de spécialistes de l’Afrique, le désordre libyen a contaminé bon nombre de pays du Sahel à commencer par le Niger (où des sociétés occidentales comme Areva exploitent l’uranium) et le Mali voisin qui regorge de ressources minières.

En Côte d’Ivoire, les Ivoiriens n’ont pas non plus oublié l’implication de la France dans l’élection présidentielle controversée (du 28 novembre 2010) qui a couronné Alassane Ouattara. Par conséquent, la mise en examen de Nicolas Sarkozy fait les choux gras de la presse et des amateurs de politique internationale.

Sarkozy a fait taire Kadhafi ?

Pour beaucoup d’Africains, Sarkozy avait tout intérêt à faire taire Mouammar Kadhafi qui menaçait de tout dévoiler. A cela s’ajoute, le témoignage de Ziad Takieddine, l’homme d’Affaires franco-libanais qui affirme avoir remis une mallette remplie de billets à Claude Guéant, à l’époque directeur de campagne du candidat à la présidentielle de 2007.

Accusé de « corruption passive », « financement illégal de campagne électorale » et de « recel de fonds publics libyens », l’ancien président français a été mis en examen et placé sous le contrôle judiciaire le 21 mars. La justice française lui reproche d’avoir partiellement financé sa campagne électorale avec des fonds financiers du gouvernement libyen. Un « document libyen » publié par Mediapart, qualifié de « faux » par l’ex-locataire de l’Elysée, parle d’un versement de 50 millions d’euros. Invité du JT de 20H de TF1, l’ancien chef de l’Etat a nié bec et ongles les faits en clamant son innocence. Pour lui, il n’y a pas « la moindre preuve » : « Kadhafi avait l’habitude de tout enregistrer, de tout photographier, c’était un fou ! Il n’y a pas la moindre preuve », a-t-il déclaré.

Une chose est sûre: dans l’affaire dite des « e-mails d’Hillary Clinton » éclatée en 2015, on a retrouvé un mémo-liste qui recense plusieurs facteurs qui auraient motivé l’intervention française en Libye. Parmi lesquels : mettre la main sur le pétrole libyen, renforcer la présence de l’armée française dans le Nord de l’Afrique, empêcher Kadhafi de réaliser une monnaie panafricaine en lieu et place du Franc CFA, etc.

A la justice de faire son travail !