Gravissime erreur politique ou simple entente entre dictateurs? La question se pose. En tout cas, ce qui est certain, c’est que le déplacement du président Sall à Brazzaville pour assister à l’investiture de Denis Sassou-Nguesso, un des plus vieux dictateurs du continent, risque de ne pas embellir son image à la suite de l’Affaire Sonko qui a secoué le Sénégal début mars.
Allons droit au but. Macky Sall, président du Sénégal, fait partie des invités d’honneur qui devront prendre part ce vendredi à l’investiture de Denis Sassou-Nguesso, président du Congo Brazzaville qui dirige ce pays manu militari depuis 1979, date à laquelle il s’est emparé du pouvoir pour la première fois.
Pour légitimer son pouvoir tyrannique, le dictateur, aujourd’hui âgé de 77 ans, a tendu un piège à ses pairs en prenant le soin de sélectionner une poignée de chefs d’Etats jouissant d’une belle image à l’international. Parmi eux, figurent : Macky Sall, président du Sénégal, Alassane Ouattara, président de la Côte d’Ivoire, Nana Akuffo-Addo, président du Ghana et même Moussa Faki Mahamat, président de l’Union Africaine.
Il convient de préciser les choses. Dans cette affaire, le dictateur qui brigue un 4ème mandat n’a rien à perdre. Je dirais même que c’est un pari gagné d’avance car avec la participation des chefs d’Etat susmentionnés, sa reconnaissance à l’international ne devrait pas tarder.
Cependant, pour ces présidents qui se rendent à Brazza pour assister à une parodie d’investiture d’un septuagénaire dont l’élection a été entachée d’irrégularités, c’est un très mauvais signal. En effet, en légitimant l’élection de Sassou-Nguesso, ils cautionnent une anomalie démocratique et une dictature sanguinaire qui a fini par museler tout un peuple.
Concernant Macky Sall dont le pays a récemment connu une vague de violence inouïe suite à l’affaire Sonko, sa présence dans ce cirque risque de lui coûter très cher d’autant plus que les rumeurs sur son troisième mandat tiennent en haleine une grande partie de la population sénégalaise.
Sassou-Nguesso en est à son 4ème mandat. Cette usurpation du pouvoir, il l’a obtenue en tripatouillant la Constitution de 2002 qui lui a pourtant interdit formellement de s’agripper au pouvoir. Et tout laisse à croire qu’il briguera un 5ème voire un 6ème mandat comme le font d’autres chefs d’Etat sur le continent tels que Idriss Déby ou encore Paul Biya.
Ce qui est incompréhensible dans l’attitude de Macky Sall, c’est qu’il a joué un très grand rôle dans la chute de Yahya Jammeh (ex président de la Gambie) en 2016 et mijote depuis son accession à la tête du pouvoir à la chute d’Alpha Condé, président de la Guinée qui a récemment révélé que toutes les tentatives de déstabilisation de son pays viennent du Sénégal, ce qui n’est pas faux.
La question à se poser est celle-ci : si le président Sall est si épris de Démocratie, qu’est-ce qu’il fout à Brazzaville pour légitimer le pouvoir d’un despote? En un moment donné, il faut être cohérent. Soit, on combat la dictature où qu’elle se trouve et sous toutes ses formes, soit on la cautionne ouvertement en assumant toutes ses responsabilités.
Ce deux poids deux mesures est abject et indigne d’un leader politique.