La République En Marche est en danger. Et il est fort probable qu’il disparaisse très bientôt du paysage politique français. En effet, nous avons appris dans la presse que deux députés viennent de démissionner du parti. Il s’agit de Frédérique Tuffnell, députée de Charente-Maritime et de Xavier Batut, député de Seine-Maritime.
En deux ans et demi, 14 députés En Marche ont définitivement claqué la porte, faisant ainsi passer le nombre de députés de 314 à 300. Pour l’heure, pas de quoi s’inquiéter, mais il est évident que les députés LREM n’arrivent plus à suivre la ligne de Macron sur plusieurs questions.
Pour avoir une idée de ces démissions qui minent le parti, il faudra se pencher sur l’explication fournie par les démissionnaires eux-mêmes. Ainsi, dans une interview accordée à Paris Normandie, le député Seine-Maritime, Xavier Batut, n’a pas mâché ses mots. Il dit avoir l’impression d’être retourné à l’Ancien Monde.
« Je fais partie de ceux qui se sont engagés, dès le début, en faveur d’un mouvement à l’écoute de la population et des militants. Or, je constate qu’on reproduit désormais, mais en pire, le mode de fonctionnement précédent. Celui d’une gouvernance verticale où tous les projets viennent du sommet sans tenir compte des réalités ni des attentes de la base », déplore-t-il.
Si Xavier Batut dénonce une verticalité du parti, Frédérique Tuffnell dénonce, quant à elle, un problème de clarté dans les décisions prises par l’Exécutif, notamment sur la réforme des retraites. Parlant de cette réforme, elle dira : « il a été très compliqué pour les citoyens de s’y retrouver. Il n’y a pas eu vraiment de clarté et c’est vrai qu’aujourd’hui, on est arrivé à un point que j’estime de non retour où moi je ne peux pas cautionner et travailler sur ce texte tel qu’il est, surtout dans un temps aussi contraint ».
En quittant la LREM en 2019, Matthieu Orphelin avait dénoncé des engagements non tenus sur l’écologie. « Nous ne nous donnons plus les moyens d’y être, ni de tenir nos engagements, prisonniers de logiques budgétaires et d’arbitrages politique à court terme », s’indignait-il.
Et l’aveu le plus alarmant a été celui de Frédérique Dumas, productrice et députée des Hauts-de-Seine qui, s’expliquant sur sa décision de quitter LREM en septembre 2018, avait surpris plus d’un. « La méthode qui repose sur la confrontation d’idées, le débat et l’expérimentation, est essentielle à la réussite. Là, on a plutôt le sentiment d’être sur le Titanic », confiait-elle.
Rappelons qu’en avril 2019, en démissionnant de son poste de ministre de l’écologie, Nicolas Hulot avait été très dur envers Macron, fustigeant notamment ses liens très étroits avec les lobbys. Parlant de ce lien qui a été l’une des raisons de sa démission, Hulot disait : « c’est une entrave à la démocratie ».
Nul besoin de revenir sur toutes les réactions des démissionnaires. Notons cependant que toutes ces critiques acerbes à l’égard de Macron et de LREM interviennent deux ans seulement après l’arrivée du parti au pouvoir. Un parti qui s’était donné comme objectif de briser le clivage gauche-droite en France et d’apporter une nouvelle vision politique dans une démocratie française qui présente depuis une décennie des signes de fatigue.
Le départ des députés Frédérique Tuffnell et Xavier Batut est un coup d’autant plus dur à encaisser que LREM est en pleine crise à la suite de l’exclusion de Cédric Villani, candidat dissident qui a catégoriquement refusé de rejoindre la campagne de Benjamin Griveaux, candidat officiellement investi par le parti mais qui peine à convaincre les parisiens.
Les démissions qui s’enchaînent dans un parti créé il y a moins de trois ans est révélateur de la fragilité de la Macronie. Tel que l’ont expliqué les démissionnaires, tout repose sur l’image d’un chef (Macron) dont seule la parole compte et les autres n’existent qu’en tant que figurants et ont très peu à dire sur le fonctionnement d’une formation politique qui ne tient plus sur rien.
C’est à cela d’ailleurs qu’on reconnaît les partis politiques totalement déconnectés des réalités du peuple et dont l’accession au pouvoir n’est très souvent que le fruit du hasard. En effet, Macron a remporté la présidentielle de 2017, non pas parce qu’il était le candidat du peuple, mais parce qu’il avait en face de lui l’extrême-droite dont la candidate avait déjà été clouée au pilori par les médias.
En deux ans, ni le parti, ni l’Exécutif n’ont su résister aux crises qui secouent le pays et il y a fort à parier que 2022 sera définitivement la fin de la carrière politique de Macron mais aussi de sa formation politique qui a très vite montré ses limites dans une France en pleine crise politico-sociale.