Depuis décembre, la France vit une crise politico-sociale sans précédent. Après une grève générale qui a paralysé le transport public pendant au moins un mois contre la réforme des retraites, le pays n’est toujours pas sorti de l’ornière. Le mot d’ordre de grève a été levé. Toutefois, la crise s’accentue et le parlement est complètement paralysé.
Le gouvernement tente depuis trois mois de faire passer une réforme dont une partie du peuple ne veut pas. A l’Assemblée Nationale, c’est l’enlisement total. Plus de 40 000 amendements ont été déposés par l’opposition, une situation qui avait poussé ce 12 février la Commission de l’Assemblée Nationale à arrêter ses travaux. Un fait inédit. La situation est d’autant plus complexe qu’après huit jours de débat, seul 1 des 65 articles a été voté.
Aujourd’hui, le gouvernement est dos au mur. Macron et Philippe ne peuvent plus attendre car il y va de leur honneur. L’Exécutif, face au blocage de l’opposition, notamment de la France Insoumise, n’a plus que deux choix à faire et il se trouve que les deux sont mortels : renoncer à la réforme (et accorder une victoire symbolique à l’opposition à deux ans de la présidentielle) ou sauver l’honneur en imposant la réforme aux Français par le 49.3.
La première option me semble très peu probable. Il faut surtout comprendre que la réforme des retraites n’est pas une réforme d’Emmanuel Macron qui n’a aucun intérêt à entrer en guerre contre une partie du peuple. Macron est le candidat de l’oligarchie financière et ne fait qu’obéir à des ordres qui lui viennent de cette même oligarchie qui, comme elle l’a fait avec la Grande-Bretagne sous Margaret Thatcher, veut à tout prix casser le marché de l’emploi de la France et son état-providence jugé « trop généreux ».
La seconde option est désormais sur la table. L’Exécutif prépare la France psychologiquement à la mise en œuvre du 49.3 depuis déjà deux semaines afin de tâter le pouls et voir, en cas d’application du redoutable article, quelle serait la réaction des Français : y aura-t-il grève générale ? Y aura-t-il révolution ? Paris sera-t-il mis à sac dans les heures qui suivent l’application de cette mesure ?
Le gouvernement a bien étudié la question et sait désormais à quoi s’attendre. Macron, de son côté, est prêt à passer en force. Philippe, de source proche, veut temporiser et donner une chance à l’opposition. Sauf que l’opposition ne veut surtout pas entendre parler de dialogue et n’a cessé de bloquer la réforme au Parlement depuis décembre.
Les conséquences d’une application du 49.3 seraient désastreuses dans une France en pleine crise sociale. Je dirais même que ce serait jeter de l’huile sur le feu. Macron et Philippe le savent, mais la réalité est qu’ils sont totalement dépassés par les événements et ne contrôlent plus rien.
En conséquence, l’option d’un renoncement à la réforme des retraites est nulle et celle du passage en force est l’ultime recours pour mettre fin au blocage. L’Exécutif appliquera le 49.3 à ses risques et périls. Ce n’est qu’une question d’heures, de jours ou de semaines.