Michigan, Minnesota, Virginie, Texas, Maryland, Ohio…Toutes ces villes américaines sont désormais liées par un même destin. Elles sont en effet en train de défier leurs gouverneurs exigeant d’eux qu’ils les laissent reprendre le travail au moment où plusieurs Etats ont émis des « Stay-at-Home-Order », c’est-à-dire, l’ordre formel de rester confinés à la maison.
Sauf que cette décision, si elle est plus ou moins respectée en Europe et dans d’autres parties du monde, pose un sérieux problème aux Etats-Unis où la réalité économique est toute autre. Dans un pays où l’assurance-maladie n’est pas garantie à tous les citoyens, sans travail, ni revenus, ce sont en effet plus de 28 millions de citoyens qui risquent, en pleine pandémie, non seulement de ne plus payer leurs loyers, mais de ne plus pouvoir se faire consulter par un médecin.
Je dois faire remarquer que le Covid-19 a propulsé le taux de chômage à un niveau record en quelques jours. Ce sont désormais plus de 22 millions d’Américains qui ont perdu leur emploi. Pour avoir une idée de la crainte des citoyens américains face à une crise sans précédent, il suffit pour cela de lire les pancartes des manifestants : « Nous voulons travailler », « Tous les emplois sont essentiels », « toutes les entreprises sont essentielles »…
Les premiers Etats à se rebeller contre leurs gouverneurs ont été Michigan, Minnesota et plus tard Virginie. Dans les deux premiers, des centaines d’habitants refusent catégoriquement le confinement qui leur est imposé. Dans l’Etat de Virginie, ce sont les farouches défenseurs des armes qui ont défié leur gouverneur qui, en pleine crise sanitaire, a fait fermer des stands de tir.
Les manifestations se sont plus tard répandues comme un feu de brousse, touchant désormais plusieurs autres Etats dont le Texas, le Maryland et l’Ohio où des centaines d’Américains exigent sans délai que leur Etat soit libéré. Ces manifestants sont d’autant plus motivés qu’ils ont obtenu le soutien de Donald Trump qui, sur twitter, a adressé un message aux gouverneurs sans les nommer, appelant ouvertement à « libérer Michigan, Minnesota et la Virginie ». Il faut surtout signaler que la fermeture de l’activité économique du pays n’arrange pas Trump qui mise tout sur ce secteur en vue d’une éventuelle réélection lors de la présidentielle prévue ce 3 novembre 2020.
Mais, au-delà de la question économique, il y a une autre question fondamentale qui encourage ces manifestations aux Etats-Unis : la liberté individuelle. Ce mot est sacré dans un pays qui, justement, a dû faire la révolution pour arracher son indépendance de la Couronne Britannique en 1776.
En effet, contrairement à la France, à l’Italie, à l’Espagne et même à d’autres pays du monde, l’Américain moyen ne conçoit pas une seule minute que le gouvernement (fédéral ou local) lui prive sa liberté. Et ce refus formel d’obtempérer aux ordres de confinement décrétés par les Etats démontre à quel point ils sont obsédés par leurs droits civils.
Et là également, les pancartes des manifestants sont très révélatrices. « La Liberté n’a jamais été en sécurité », « Les droits ne sont pas des dons offerts par les gouverneurs », « la sécurité et la liberté ne sont pas incompatibles », « Texas ne sera pas la marque de la bête », « Vous n’avez pas le droit de décider de ce qui est essentiel pour nous », « Vos Etats d’urgence ne doivent pas piétiner mon 1er amendement »…Tels sont les nombreux messages adressés aux gouverneurs par leurs peuples. Et cette pression pourrait bien porter ses fruits car, sous la pression populaire, certains Etats ont fini par rouvrir leurs plages.
Cette guerre qui oppose, depuis plusieurs jours, Donald Trump à certains gouverneurs qui refusent catégoriquement de laisser leurs citoyens reprendre le travail (dans le cadre de la lutte contre le Covid-19) risque d’avoir des conséquences drastiques sur la vie politique et sociale du pays.
Un après un, les Etats se rebellent contre leurs dirigeants politiques exigeant de ces derniers qu’ils leur rendent leur droit économique mais aussi civil. Hélas, il y a fort à parier que cette situation gagne une grande partie des Etats-Unis dans un contexte de crise financière exceptionnelle.
La question à se poser est celle de savoir jusqu’à quand vont durer ces manifestations et comment les Etats locaux vont y faire face. Totalement abandonnés par Trump, les gouverneurs sont désormais laissés à eux-mêmes et doivent immédiatement trouvé une solution. Des révoltes plus violentes ne sont plus à écarter et ce n’est que le début.