Bruno Stagno Ugarte, diplomate d’origine costaricienne et directeur de Human Rights Watch (HRW), s’est sévèrement attaqué à Emmanuel Macron dans un article publié sur le site de l’organisation internationale de défense des droits de l’Homme, accusant ouvertement le président français de soutenir militairement Khalifa Haftar dont les troupes ont commis plusieurs violations flagrantes des droits de l’Homme en Libye
Le Directeur de Human Rights Watch n’y va pas de main morte lorsqu’il s’agit de faire le bilan de la présence française en Libye. En effet, dans un article publié par l’organisation internationale de défense des droits de l’homme daté du 17 juillet 2020, le directeur exécutif adjoint de Human Rights Watch s’est durement attaqué à Emmanuel Macron dénonçant son « indignation sélective » dans le conflit libyen.
« Ces derniers jours, Emmanuel Macron s’en est plusieurs fois pris à la Turquie pour « son jeu dangereux » et sa « responsabilité criminelle et historique » en Libye. (…) Le fait que la France accuse la Turquie (qui soutient le gouvernement reconnu par les Nations-Unies, et du moins officiellement par la France) laisse perplexe. Cependant, cela révèle les ambiguïtés de la France en Libye », tonne le diplomatie costaricien.
Et de poursuivre : « en signalant Ankara, Macron garde un silence complice sur les nombreuses atrocités commises par l’Egypte et les Emirats Arabes Unis et se montre indulgent vis-à-vis de la Russie. Tous les trois soutiennent le général Haftar, un ex allié de Mouammar Gadhafi en disgrâce qui a cherché à devenir le nouvel homme fort de la Libye, quitte à y installer une guerre civile dévastatrice ».
Dans son article publié sur le site de Human Rights Watch, Bruno Stagno Ugarte accuse Emmanuel Macron de fermer les yeux sur les violations (des droits de l’homme, ndlr) commises par des groupes armés et des milices affiliés à Khalifa Haftar. Dans son article qui risque de beaucoup faire parler en France, le directeur de HRW fournit des preuves à l’appui.
« La découverte, en juin 2019, de quatre missiles anti-chars Javelin en possession des forces de Haftar que la France a achetés aux Etats-Unis était déjà très embarrassant pour Paris. Même si la France a insisté sur le fait que les missiles étaient « endommagés et usés » ils (les missiles) constituent une preuve évidente du soutien militaire que Paris a cherché à tenir secret car violant l’embargo sur les armes ratifié en 2011 par le Conseil de Sécurité des Nations-Unies, dont la France est membre », révèle le diplomate.
Bruno Stagno Ugarte ira plus loin, accusant la France de ne pas faire pression sur Khalifa Haftar afin qu’il livre son adjoint, Mahmoud Al-Werfali, recherché par la Cour Pénale Internationale qui, en 2017 et 2018, a émis deux mandats d’arrêt internationaux pour obtenir son arrestation.
Sur le non-respect de l’embargo sur les armes par la France, il dira : « étrangement, Macron est très silencieux sur le fait que toutes les parties qui prennent part à ce conflit ne respectent pas l’embargo sur les armes en Libye et sur le fait que toutes les parties mentionnées soutiennent des groupes armées ayant commis de graves violations des droits de l’homme ».
Le directeur de Human Rights Watch accuse ouvertement Emmanuel Macron de faire preuve d’indulgence envers la Russie qui aurait envoyé des mercenaires en Libye pour soutenir Haftar et les Emirats Arabes Unis qui, selon Stagno, continue de fournir des armes au général libyen. « Les Emirats Arabes Unis font partie de ses plus grands clients (clients de la France, ndlr) ayant dépensé 1,5 milliards de dollars en France rien que pour l’année 2019 », dénonce le diplomate.
Le directeur de Human Rights Watch dénonce le décalage qui existe entre les paroles de la diplomatie française et ses actes sur le terrain. « Dans les discours qu’ils tiennent lors des sommets internationaux, Emmanuel Macron et son ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, prononcent fièrement leur volonté de faire respecter le droit international et la défense des principes cardinaux du multilatéralisme de la diplomatie française. Cependant, leurs actes ne correspondent pas à leurs jolis mots », déplore-t-il.
Le diplomate finit son article en sermonnant Macron. « La France doit surmonter le vide qui existe entre ses paroles et ses actes, tel que c’est le cas en Libye. La France devrait cesser de fermer les yeux sur les graves violations qui se passent là-bas dans le seul but de préserver ses intérêts stratégiques et économiques. L’indignation sélective de Macron en Libye met en danger aussi bien la crédibilité de la France que ses valeurs qu’elle qualifie de « principes cardinaux de sa diplomatie ».
Pour lire l’article dans sa version originale, cliquez ici : Human Rights Watch