Nous nous dirigeons incontestablement vers une nouvelle crise en Côte d’Ivoire qui pourrait, si rien n’est fait pour l’éviter, ouvrir la porte à une guerre civile. En effet, après avoir tripatouillé la Constitution pour prolonger son règne, l’actuel président de la Côte d’Ivoire, Alassane Dramane Ouattara a réussi un coup de poker ce 14 septembre, en obtenant la validation de sa candidature à un troisième mandat en violation totale de la Constitution ivoirienne.
Le verdict final est tombé ce 14 septembre. Sur les 45 dossiers déposés, le Conseil Constitutionnel, présidé par Mamadou Koné, n’en a validé que 4. Et il ne fait aucun doute que la machine judiciaire ivoirienne, sous les ordres de Ouattara, a choisi des opposants taillés sur mesure.
Sans surprise, l’opposant Guillaume Soro, en exil en France et l’ancien président ivoirien, Laurent Gbagbo, qui avait annoncé sa volonté de participer à la présidentielle d’octobre prochain, ont été écartés. Les motifs de leur élimination? Soro et Gbagbo ont maille à partir avec la justice. Mais, par contre, le dossier de l’opposant et ex président ivoirien, Henri Konan Bédié, est passé comme lettre à la poste.
« Entre deux maux, il faut choisir le moindre », dit l’adage. Et c’est exactement ce que Ouattara et ses sbires ont fait. Entre Soro, Gbagbo et Bédié, il fallait valider la candidature du moins périlleux pour le pouvoir et c’est finalement le vieux Bédié qui a été admis à prendre part à la présidentielle par la machine judiciaire qui est consciente qu’il ne représente aucune menace au pouvoir actuel.
Ce qui est intéressant à souligner dans cette crise ivoirienne est sa ressemblance avec la crise qui a agité le Sénégal à quelques mois de la présidentielle de 2019. Là-bas aussi, le président sénégalais, Macky Sall, avait observé le même mode opératoire pour mettre hors d’état de nuire ses rivaux, en interdisant à Karim Wade et Khalifa Sall de prendre part à la présidentielle et en instaurant le système de parrainage pour contrôler le jeu. Finalement, il ne s’est retrouvé qu’avec quatre rivaux, ce qui fut une prouesse incontestable.
Dans le cas de la Côte d’Ivoire, la situation risque d’empirer comme cela a été le cas il y a dix ans juste après l’élection très contestée de Laurent Gbagbo. En effet, il ne fait aucun doute que ce pays, jadis appelé le grenier de l’Afrique, traverse une crise identitaire assez sérieuse qui hante la classe politique depuis la fin des années 90. Les tensions se sont certes calmées ces dernières années. Toutefois, la plaie ne s’est pas encore refermée.
Alassane Ouattara sera le seul et unique responsable d’une guerre civile si celle-ci venait à éclater en Côte d’Ivoire, car il avait publiquement fait part de son intention de quitter le pouvoir avant de finalement faire volte-face à la suite du décès de son ex premier ministre Gon Coulibaly, un décès qui semble beaucoup jouer en sa faveur d’ailleurs.
Pourtant, l’Article 55 de la Constitution ivoirienne est très claire : les mandats sont limités à deux. Mais, pour le contourner, il a tripatouillé la Charte fondamentale du pays avec la complicité d’une institution judiciaire totalement à ses bottes pour nous parler d’une « Troisième République ». En gros, tout a été concocté dans le plus grand secret pour que le nouvel homme fort d’Abidjan puisse s’agripper au pouvoir.
Il est aujourd’hui temps que les démocraties occidentales haussent le ton. Et la France qui entretient d’excellentes relations avec le régime ivoirien actuel devrait être en première ligne. Ouattara doit comprendre une chose : il aura fait son temps au pouvoir et en politique et les Ivoiriens tireront un bilan de son passage à la tête de la magistrature suprême comme ils l’ont fait avec Boigny, Bédié et Gbabgo.
Toute tentative de réécrire l’histoire n’est qu’un subterfuge voué à l’échec. Car une chose est désormais certaine : la jeunesse africaine ne veut plus de leaders de troisième âge à la botte des institutions financières internationales et qu’on le veuille ou pas, Ouattara en est un.
Une crise d’une violence extrême est en train de guetter la Côte d’Ivoire et il urge d’éviter à tout prix qu’un tel scénario ne devienne une réalité.