La Macronie « mijote » secrètement avec le MoDem de François Bayrou pour imposer le scrutin proportionnel (scrutin à un seul tour) lors des élections législatives de 2022. Macron y serait favorable d’autant plus qu’il est persuadé que, même réélu à la tête de la France, il n’aura pas la majorité à l’Assemblée Nationale
En pleine crise sanitaire, Emmanuel Macron, de plus en plus isolé sur la scène politique, est obsédé par une question : la proportionnelle aux prochaines élections législatives de 2022. Cette question revient au devant de la scène d’autant plus que l’allié du président, François Bayrou, y trouve un intérêt tout particulier.
Pour le moment, rien n’est encore décidé. Mais, dans l’entourage de Macron, on fait savoir que le sujet est bien sur la table. « le sujet est sur la table, mais pas en haut de la pile », confie Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement. Richard Ferrand, président de l’Assemblée Nationale, est sur la même longueur d’ondes.
« Ce serait l’occasion d’une respiration démocratique »
« Après tout, le candidat Macron s’était engagé à faire en sorte que les sensibilités politiques soient mieux représentées, tout en préservant la représentation des territoires. Ce serait l’occasion d’une respiration démocratique », lâche Ferrand qui ajoute que la « piste mérite d’être explorée ».
La question à se poser est celle de savoir pourquoi Macron veut changer les règles du jeu à moins de deux ans d’une élection présidentielle très importante pour la France. Emmanuel Macron n’est pas dupe. Cette volonté de rétablir la proportionnelle (tout en faisant semblant de ne pas y être favorable) répond à une urgence politique.
En effet, le président sait qu’avec peu de chance, il peut bien remporter la présidentielle de 2022 Cependant, sans majorité au parlement, il aura du mal à appliquer sa politique néolibérale. D’ailleurs, son entourage voit clairement qu’il ne disposera pas de majorité parlementaire en 2022.
« Macron n’est plus sûr d’obtenir une majorité à l’Assemblée »
« Le président a de bonnes chances d’être réélu s’il se représente. Mais ce sera compliqué aux législatives qui suivront. Son parti ainsi que de nombreux députés sortants ont montré leurs limites. Il faudra en passer par une coalition avec la gauche ou la droite », confie un macroniste de la première heure.
Dans le parti présidentiel, plusieurs personnalités y sont favorables. Parmi elles, figurent : Gérald Darmanin et Christophe Castaner. « Au moment où les maires ne peuvent pas cumuler avec un mandat de parlementaire, au moment où les Français se disent qu’ils ne sont pas assez bien représentés dans leur courant de pensée, je trouve qu’effectivement la proportionnelle est un moyen sans doute efficace de le faire« , avait souligné l’actuel ministre de l’Intérieur en septembre dernier.
« Une véritable manœuvre politique »
Rappelons que dans le cas d’une proportionnelle, qui ne comporte qu’un seul tour, les résultats de chaque parti seraient pris en compte et les sièges des députés ainsi répartis entre les formations politiques en fonction de leur score. Le niveau du seuil dépend des caractéristiques de chaque pays : fixé à 5% comme en Allemagne ou en France.
Ce mode de scrutin pourrait ainsi apparaître comme un système juste car favorisant la représentation des petites formations, mais au fond, c’est une véritable manœuvre électoraliste mise en place par les grands partis pour éviter leur mort politique. Et c’est bien la stratégie de la LREM.
« Il mutile la démocratie »
Ce nouveau stratagème politique risque de faire parler d’autant plus qu’en janvier dernier, à quelques semaines des élections municipales, LREM avait été prise la main dans le sac en tentant de changer les règles du jeu. En effet, dans une circulaire, Christophe Castaner (ex ministre de l’Intérieur) demandait aux préfets d’attribuer une nuance politique « à chaque liste candidate ainsi qu’à chaque candidat de chaque liste seulement dans les communes de 9.000 habitants et plus ». En d’autres termes, les scores des communes de moins de 9 000 habitants (96% des communes) seront exclus des décomptes des résultats nationaux.
Cette règle était perçue par l’opposition comme une manœuvre qui consistait à favoriser la LREM qui ne compte de soutiens que dans les grandes villes et qui a été rejetée par les petites communes depuis son arrivée au pouvoir. « C’est l’œuvre du gouvernement qui prétendait agir contre les Fake News. Ils mutilent la démocratie », avait twitté Olivier Faure, chef de file du PS. Certains spécialistes interrogés par la presse voyaient dans cette manœuvre du gouvernement une tentative de « cacher la faiblesse inévitable de LREM » aux municipales, comme l’expliquait le politologue Pascal Perrineau interrogé par France Info.