« Nous assistons au suicide de l’Assemblée », alertait il y a deux semaines un député de l’opposition française après la décision des députés LREM, majoritaires à l’Assemblée nationale, de prolonger l’Etat d’urgence sanitaire jusqu’au 1er juin 2021. Le vote a finalement eu lieu ce 9 février et, sans surprise, l’Etat d’urgence a été prolongé jusqu’à cette date.
Les implications d’une telle décision sont lourdes. Avec la prolongation de ce régime d’exception, le président de la République, Emmanuel Macron, détient les pleins pouvoirs. Il peut instaurer le couvre-feu quand il le jugera nécessaire, reconfiner le pays partiellement ou entièrement, restreindre les déplacements des citoyens et interdire toute manifestation jusqu’à nouvel ordre.
En gros, la prolongation de l’Etat d’urgence au nom de l’urgence sanitaire met fin à la Démocratie dans un pays qui, en 1789, s’était soulevé contre la monarchie pour justement éviter que celle-ci n’assène le dernier coup de poignard aux libertés individuelles, à la justice si chère au peuple français et à l’égalité.
La prolongation de ce régime d’exception est d’autant plus gênante pour la Démocratie française que c’est la 6ème fois qu’elle est décrétée. Une gravité extrême. Mais, le plus grand grave dans cette démarche qui semble convenir à un Exécutif totalement désaxé est que les citoyens français ne savent pas quand est-ce qu’ils vont en sortir pour enfin arracher leur liberté qui leur est si chère.
C’est en tout cas un miracle que jusqu’ici le peuple accepte, sans se poser trop de questions, que ses libertés fondamentales arrachées au bout de plusieurs années de lutte sociale soient suspendues par un Hyper-Etat dont le pouvoir a été considérablement renforcé par la pandémie. En effet, au nom de la lutte contre le Covid-19, l’Etat est devenu le seul maître du jeu. Il a le droit (et de manière unilatérale) de fermer, d’ouvrir, de suspendre ou de mettre fin à toute activité économique, plongeant ainsi des milliers de citoyens dans une précarité indescriptible.
Mais, jusqu’à quand va durer cette situation à laquelle les citoyens sont désormais habitués et à laquelle ils semblent avoir adhéré d’ailleurs? Cette question est d’autant plus pertinente que des nations au cœur de l’Europe, qui ont brillé ces dernières décennies par une gestion autoritaire du pouvoir, ont déjà commencé à mettre fin à ce régime d’exception qui bafoue tous les droits du peuple. C’est le cas de la République Tchèque, ex satellite de l’Union Soviétique, qui vient d’annoncer ce 12 février qu’elle mettra fin à l’état d’urgence sanitaire dès ce 14 février.
Dans le cas de la République Tchèque, le détail très intéressant à souligner est que ce sont les députés qui, eux-mêmes, se sont soulevés pour tenir à l’Etat en refusant catégoriquement de lui accorder à l’Etat les pleins pouvoirs. En agissant de la sorte et de la plus courageuse et démocratique des manières, ils arrachent leurs libertés conquises au bout de plusieurs années de dictature communiste.
Ce qui est étrange en France est l’indifférence totale du peuple face à ses dérives qui, dans une Démocratie (et la France en est une), devrait normalement susciter une virulente réaction populaire. Pourtant, depuis bientôt une année, il n’en est absolument rien du tout. Sur ce sujet, le peuple est totalement aux abonnés absents et les médias, pour l’empêcher de se révolter, lui ont imposé un nouvel agenda appelé « séparatisme islamiste » sur lequel le peuple disserte en longueur de journée pendant que ses représentants au Parlement sacrifie la Démocratie sur l’autel de la crise sanitaire.
Finalement, le seul qui sort victorieux d’une telle situation est Emmanuel Macron qui, détenant les pleins pouvoirs, peut bâillonner les dissidents, museler l’opposition et surtout prendre le contrôle total du pays jusqu’à la prochaine élection présidentielle prévue en 2022.
Etant donné la situation actuelle, tout laisse à croire que 2022 sera le seul moment où le peuple, désormais réduit à sa plus simple expression, sera autorisé à aller aux urnes afin de perpétuer une tradition démocratique dans un pays où la Démocratie semble avoir été l’une des premières victimes de la Covid-19.
Il faut avoir le courage de le dire. Cette situation exceptionnelle que vit la France devrait susciter l’inquiétude de toutes celles et de tous ceux qui aspirent encore à la Démocratie.