Un homme revit en jouant avec des enfants après un enchaînement d’événements tragiques dans sa vie. Mais il se voit mis en examen pour des faits de pédophilie. Il tente de faire comprendre à son juge d’instruction comment il en est arrivé à ses actes en lui adressant un long plaidoyer.
Dans les drames humains, la coupable est bien souvent la vie
Jérôme Jérauguy était un homme marié, père d’un enfant de quelques mois, ayant un travail dans une imprimerie. Mais du jour au lendemain, tout a basculé. Il a perdu son travail suite à la fermeture des ateliers. Alors sa femme a décidé de divorcer. Et elle a emmené avec elle leur enfant. Passer devant le juge pour obtenir la garde s’est révélé vain. Sans logement ni travail, aucune famille pour l’aider, le voilà très vite à dormir dans la rue. En s’adressant dans une agence qui met directement en lien les propriétaires et les locataires, une opportunité s’offre alors à lui : un petit appartement sous combles qu’une dame ne parvient pas à louer. Elle est donc peu regardante sur la situation du locataire. Mais voilà, le logement mal agencé, sombre, pousse l’homme déjà très perturbé vers la folie.
Ma nouvelle demeure, par la lugubrité qu’elle m’évoquait, m’horrifiait. Cependant, de cette fenêtre, je constatais que le vacarme des enfants y insufflait de la vie.
Son nouvel appartement, bien qu’il possédait tous les défauts possibles, avait cette particularité de donner sur la cour d’une école élémentaire. Ces enfants, avec leurs cris et leur rires, sont vite devenus sa bouffée d’oxygène tellement ils regorgeaient de vie. De sa fenêtre, il joue avec eux en leur lançant des ballons. Mais cela n’est possible que lors des récréations. Le reste du temps, Jérôme s’enferme dans sa solitude. Il s’invente tout un monde dans son appartement.
Pourquoi la peur nous fait-elle tant perdre la raison ?
Les adultes l’angoissent. Mais les enfants le rassurent. Alors le jour où une petite fille disparaît, ses émotions s’emballent. Il se sent nerveux, s’inquiète. Il se met à faire le guet devant l’école, suspectant chaque adulte s’approchant de la grille, afin de protéger ceux qu’il appelle ses mômes. Déjà très fragile psychologiquement, un autre événement tragique vient alors bousculer ses repères : les attentats à Paris. Toute cette violence le hante à tel point qu’il éprouve une haine féroce envers ces personnes capables du pire. Il décide alors d’en parler à un médecin. Est-ce déjà trop tard ?
Rien n’est aussi enivrant que d’aspirer l’air du monde.
L’air du monde. Je me suis posé la question du pourquoi ce titre jusqu’à la toute fin de ma lecture, où enfin j’ai compris. Ce roman, je l’ai lu avec beaucoup de crainte, les histoires de pédophilie étant un sujet très sensible. Je ne regrette pas cette lecture. Au contraire même, elle m’a permis de découvrir l’écriture de Victor Kathémo qui est très addictive. Il sait parfaitement maintenir le suspense. Il sait également jouer avec nos émotions. Et tout ça en dénonçant les agissements de la société et certaines inégalités de la justice. Bien que certains mots employés ne soient pas très courants, la lecture reste très fluide et nous tient en haleine jusqu’au bout.
« Tout cela montre à quel point notre monde, qui révèle des milliers de fissures lorsque s’écaille la couche de peinture dont nous le recouvrons, n’est naturellement pas avenant. Les êtres humains, monsieur le juge, ne sont que des façadiers qui prennent la vie pour un temple baroque ; les vrais maçons sont loin de faire partie de notre espèce. »
Le site de l’auteur : http://victor-kathemo.com/
