L’ex patron d’EDF qui était en guerre contre Emmanuel Macron fait l’objet d’un signalement d’Anticor pour prise illégale d’intérêts dans la renationalisation de l’éergiticien
Sale temps pour Jean-Bernard Lévy, ex patron d’EDF. En septembre 2022, son nom avait fait le tour de la toile après sa bisbille avec l’Etat français qui n’aurait pas apprécié une de ses sorties médiatiques sur fond de crise énergétique. Les propos qu’il avait tenus devant la ministre de l’Energie, lors de l’université d’été du Medef, lui avaient coûté cher.
« On n’a pas de problèmes d’expertise, les compétences, les experts, on les a […] On a beaucoup de chantiers en parallèle et d’une certaine manière, on manque de bras, parce qu’on n’a pas assez d’équipes formées […] Un soudeur, un tuyauteur, il faut deux-trois ans pour le former. Et pourquoi on n’a pas assez d’équipes formées ? Parce que l’on nous a dit que le parc nucléaire va décliner, ‘préparez-vous à fermer des centrales’ », dénonçait l’ex patron d’EDF lors de son passage à l’unversité d’été du Medef.
Ses propos avaient irrité Emmanuel Macron qui, d’ailleurs, lui avait répondu en des termes crus. « C’est absolument inacceptable que les gens qui ont eu la responsabilité des travaux de maintenance du parc (expliquent) aujourd’hui que nous n’avons pas pris nos responsabilités, parce que dès les premiers mois de mon premier mandat, nous avons redonné de la visibilité à la filière », s’était emporté le président de la République, faisant allusion à Lévy.
Cette sortie médiatique, en pleine crise du gaz, semblait avoir été très mal digérée par Macron comme nous l’expliquait d’ailleurs France Info. « En principe, Jean-Bernard Lévy aurait dû partir en mars 2023, atteint par la limite d’âge après deux mandats à tête d’EDF. Mais le climat entre la direction du groupe et l’exécutif s’est dégradé à cause des mesures du bouclier tarifaire. Jean-Bernard Lévy n’a jamais accepté que l’État se serve de l’entreprise pour les financer, en l’obligeant à vendre à prix bradé plus d’électricité nucléaire à ses concurrents. Le PDG a même déposé en mai un recours gracieux pour faire annuler ce dispositif », révèle le média français.
Et la même source de poursuivre : « Jean-Bernard Lévy est passé du statut de bon élève lors du renouvellement de son mandat en 2019 (une première depuis le mythique patron d’après-guerre, Marcel Boiteux) à celui de cancre prié de quitter les lieux. Il a pourtant avalé d’autres couleuvres de la part de l’État actionnaire, du rachat quelque peu forcé des activités nucléaires de General Electric en début d’année au peu de soutien dont il a bénéficié lors du conflit lié au plan de reconstruction Hercule, qu’il avait concocté en personne… À la demande de l’État ».
Sept mois après ce bras de fer tendu entre Jean-Bernard Lévy et l’Etat, on apprend que l’ex patron d’EDF est visé par un signalement d’Anticor (association de lutte contre la corruption en France). Telle est l’information que Lecourrier-du-soir.com a obtenue ce 05 avril du journal Le Monde qui nous explique tout en détail.
« Jean-Bernard Lévy, l’ancien PDG d’EDF, aurait-il commis une infraction relevant de la prise illégale d’intérêts dans le cadre de la renationalisation d’EDF ? C’est en tout cas la conviction d’Anticor qui, le 21 mars, a déposé un signalement en ce sens auprès du parquet de Paris, lequel a confirmé au Monde, lundi 3 avril, que ce dernier était bien en cours d’analyse. Créée en 2002 par l’ancien juge Eric Halphen et Séverine Tessier, l’association de lutte contre la corruption s’interroge sur l’indépendance de M. Lévy lors d’un vote ayant validé l’OPA de l’Etat alors que l’ancien président est censeur (conseiller avec voix consultative), au conseil d’administration de la Société générale, une des deux banques, avec Goldman Sachs ayant présenté l’offre de l’Etat », rapporte Le Monde.
Le Monde poursuit : « cette banque a ainsi participé à l’élaboration de l’offre, a rédigé un rapport d’évaluation d’EDF, une note d’information relative aux éléments d’appréciation du prix de l’offre et a interagi avec l’expert indépendant désigné par le conseil d’administration d’EDF, dans le cadre de la préparation du rapport de ce dernier. L’affaire remonte au conseil d’administration du 27 octobre 2022. Trois mois auparavant, en juillet, l’Etat annonce son intention de devenir l’unique actionnaire d’EDF. Dans ce contexte, il formalise une offre publique d’achat simplifié en vue de racheter les actions des minoritaires au prix de 12 euros chacune, et dépose son projet auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Cette dernière se doit cependant d’obtenir le feu vert du conseil d’administration d’EDF sur l’OPA à ce prix pour pouvoir la valider. Ce qui sera chose faite le 27 octobre ».
Joint par Le Monde, Jean-Bernard Lévy refuse catégoriquement de se prononcer sur cette affaire. « D’une manière générale − et encore plus s’agissant d’une réunion dont les résultats sont contestés devant les tribunaux −, j’ai pris pour règle depuis novembre de ne pas m’exprimer », a-t-il réagi.