Deux jours après le référendum très controversé en Turquie, Bernard Henry-Lévy s’est exprimé sur la victoire du camp de Recep Tayyip Erdogan. Pour le philosophe français, la France doit désormais soutenir les combattants de la liberté, autrement dit l’opposition et la société civile turque
48 heures après le référendum sur la réforme constitutionnelle en Turquie, les opinions sont partagées. Alors que le camp de président turc, Recep Tayyip Erdogan, a proclamé sa victoire, l’opposition appelle à l’annulation du référendum. La polémique gagne du terrain en Occident où des intellectuels craignent une restriction des libertés fondamentales dans ce pays.
C’est notamment le cas du philosophe français Bernard Henry-Levy. Dans une interview accordée au Parisien ce mardi 18 avril, le philosophe juif s’inquiète et appelle à soutenir l’opposition turque. Sur la question de savoir s’il a été surpris par les résultats du référendum, Bernard Henry-Lévy rétorque : « Non, pas vraiment ».
Il continue : « car la campagne et le déchaînement de la propagande ont été d’une violence inouïe. Les relais d’opinion, les journaux, les partis eux-mêmes, tout ce qui pouvait véhiculer la parole anti-Erdogan et le message du non avaient été préalablement brisés. C’est presqu’un miracle que le ‘oui’ l’ait emporté d’une si courte tête ».
« L’Islam en Turquie a reculé face à une variante perverse de l’islamisme »
Le philosophe français estime que la société civile turque n’a pas encore dit son dernier. Bernard Henry-Lévy estime que l’Islam en Turquie vient de perdre une bataille importante. « Il (l’Islam en Turquie) a reculé face à une variante particulièrement perverse de l’islamisme radical. Pour les modérés du monde musulman, pour tous ceux qui, y compris en France, se battent pour la reconnaissance des droits de l’Islam laïc, c’est une très mauvaise nouvelle », déplore-t-il.
Sur l’opposition turque, Bernard Henry-Lévy est droit dans ses bottes. « (…) Tout le crédit que nous retirons à Erdogan, c’est sur ses opposants que nous devons le reporter. Voilà un pays où les parlementaires libres sont en prison, où les avocats sont empêchés de plaider, où les professeurs d’université sont contraints à l’exil, où les journalistes, les vrais, risquent leur liberté et parfois leur vie s’ils refusent les ‘fake news’ diffusées par le régime », dénonce-t-il.
« Organiser une chaîne de soutien autour des combattants de la liberté »
Bernard Henry-Lévy appelle les candidats à la présidentielle française à « organiser une chaîne de soutien autour des combattants de la liberté » de la même manière que cela s’est fait dans les années 1970 et 1980 avec les dissidents d’Europe centrale et orientale. Il regrette que les candidats à la présidentielle n’aient pas été interrogés sur cette question particulière des combattants de la liberté en Turquie.
Rappelons que le camp du président turc Recep Tayyip Erdogan avait remporté le référendum sur la réforme constitutionnelle tenu ce dimanche 16 avril. A l’issue du référendum, le camp du président a remporté 51,4% des voix contre 48,6% pour l’opposition, une victoire dans un mouchoir de poche.
« Ce qui est nécessaire est l’annulation du référendum »
Toutefois, la victoire est loin de faire l’unanimité en Turquie car l’opposition exige une annulation du référendum pour irrégularités. « La seule manière de mettre fin aux discussions sur la légitimité du référendum est de l’annuler. Ce qui est nécessaire est l’annulation de ce référendum », a déclaré Bülent Tezcan, député du Parti du Peuple Républicain, ajoutant que le référendum est « illégitime ».
Entretemps, les chefs d’Etats occidentaux ont pour la plupart félicité le président Erdogan tout en continuant à suivre de près l’évolution de la situation en Turquie. Ce mardi, la BBC nous a appris que Donald Trump, président des Etats-Unis, a appelé le président turc au téléphone pour le féliciter de sa victoire.