Ehud Barak, ex premier ministre israélien et ex ministre israélien de la défense, est revenu sur l’opération militaire israélienne avortée contre l’Iran entre 2007 et 2013
Dans une interview exclusive accordée à Ynetnews, Ehud Barak, ex premier ministre israélien, est revenu sur de nombreux sujets dont le nucléaire iranien. Parlant du projet de la République Islamique d’Iran d’obtenir l’arme nucléaire, il dira que « le projet n’a pas disparu, il a juste été remis à plus tard ».
Répondant à une question du journaliste qui lui demandait quelle était son intention lorsqu’il cherchait une confrontation avec l’Iran alors qu’il était ministre de la défense de l’Etat d’Israël, Ehud Barak rétorque : « l’intention était à la fois de pousser les Américains à augmenter les sanctions et de mener une opération. J’étais plus faucon que Netanyahou ».
« Les deux présidents n’avaient pas apprécié nos plans »
Il continue : « nous étions sûrs que les Américains savaient tout, à la fois sur l’opération et sur l’opposition à cette opération par Gabi, membre de l’Etat-major interarmées ; par Dagan, patron du Mossad israélien (…). Nous savions qu’il y avait des gens qui leur parlaient tous les jours ».
Ehud Barak affirme avoir discuté avec George Bush et Barack Obama à qui il a fait savoir qu’Israël prend ses propres décisions quand il s’agit des questions de sécurité intérieure de l’Etat d’Israël. « Les deux présidents n’avaient pas apprécié nos plans, mais ils les respectaient », a-t-il souligné.
« Nous devons surprendre »
Dans l’interview, Ehud Barak ajoute : « en un moment donné, le secrétaire américain à la défense m’a demandé si les Américains seraient avertis. Je lui ai dit : ‘nous devons surprendre. Nous ne vous donnerons que quelques heures. Notre avertissement sera formulé de telle sorte qu’un seul soldat américain ne sera mis en danger ».
L’ex premier ministre israélien a révélé que les Etats-Unis étaient prêts à leur donner un coup de main en cas d’attaque à l’Iran, malgré leurs objections par rapport à cette opération. « Malgré leurs objections à cette décision, ils nous ont fait savoir que même si on attaquait, ils honoreraient tous les engagements vis-à-vis d’Israël ».
« Nous ne devons pas oublier que le projet iranien n’a pas disparu »
Lorsque le journaliste lui parle d’un financement colossal pour mener cette opération, Ehud Barak justifie ce financement : « le financement était totalement justifié. Nous avons construit un réseau de talents. Nous ne devons pas oublier que le projet iranien n’a pas disparu, il a juste été remis à plus tard pour 10 ans ».
Parlant de la volonté de la République Islamique d’Iran d’obtenir l’arme nucléaire, Ehud Barak dira : « (…) L’Iran n’a pas choisi un programme nucléaire comme celui de la Libye et de l’Afrique du Sud, qui était basé sur la dissuasion. L’Iran a voulu faire comme la Corée du Nord. S’il avait obtenu une arme nucléaire, cela changerait carrément la situation dans la région et pourrait devenir un problème existentiel pour Israël ».
« C’est faux »
Il poursuit : « les opposants disaient que les Iraniens n’avaient que quelques années pour mettre en place ce projet. C’est faux. Avant que nous ne bombardions un réacteur nucléaire en Irak, nous avions estimé avec exactitude le temps que cela prendrait pour que les Irakiens le reconstruisent. L’adversaire a en fait peur de retourner reconstruire ce qui a été détruit. D’autres choses peuvent aussi se produire ».
Lors de son interview, Ehud Barak a également expliqué qu’en Israël, une opération n’est approuvée que lorsque les « trois coins du triangle existent » : « une possibilité opérationnelle, une légitimité internationale et un besoin d’opérer dans l’immédiat car sinon ce sera impossible plus tard ».
« La décision est entre les mains des autorités politiques »
L’ex ministre israélien de la défense a tenté, dans l’interview, d’expliquer les raisons de l’échec de l’opération contre l’Iran. Des raisons qui étaient à la fois militaires et politiques. « L’objection du membre de l’Etat-major interarmées à l’opération n’empêche pas que celle-ci puisse avoir lieu. La décision est entre les mains des autorités politiques », martèle-t-il.
Il ajoute : « lorsqu’un membre de l’Etat-major interarmées dit que l’opération n’est pas possible, c’est comme ça. L’approbation ne passe pas ». L’ex ministre israélien de la défense regrette que ceux qui s’opposaient à cette opération à l’époque, dirigés par le président Shimon Peres, n’aient pas voulu être convaincus.
« Bibi n’aime pas prendre des décisions. Moi, si »
Ehud Barak a aussi déploré que Benjamin Netanyahou, partisan de l’opération contre l’Iran, n’ait pas fait autant d’efforts pour convaincre ses ministres. « D’année en année, mes doutes sur sa détermination à agir ont augmenté. Je lui ai suggéré de mettre en avant la question de la Palestine, voire obtenir un accord là-dessus, ensuite on serait sûr d’avoir un soutien international pour attaquer l’Iran », confie-t-il.
« Je lui ai dit : ‘c’est comme un jeu d’échecs : tu sacrifies un pion pour avoir la dame. Peut-être qu’il avait peur de devoir faire quelque chose sur le conflit palestinien ou il a été peut-être effrayé par l’ampleur de cette décision. Il avait peur de prendre ses responsabilités en faveur d’une décision contre laquelle tous les patrons de la sécurité intérieure se battaient. C’est possible. Bibi (Netanyahou) n’aime pas prendre des décisions. Moi, si ».
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