Congrès FN : en flirtant avec l’administration Trump, le Front National se tire une balle dans le pied

La présence de Steve Bannon, patron du média Breitbart, média israélien proche de l’extrême-droite, au Congrès du Front National n’est pas passée inaperçue. La présence de l’ex conseiller de Trump viré de la Maison Blanche sous fond de tension avec le président américain a en effet fait la une des médias français et américains ce samedi.

Lors de son intervention, Steve Bannon a joué la carte populiste jusqu’au bout, taclant sévèrement les médias et les mondialistes. « Notre cher président Trump disait : ‘nous en avons marre des mondialistes’ », a-t-il lancé. Parlant de l’élection de Trump, il s’est attaqué aux médias maintream, expliquant le choc qu’ils ont ressenti suite à la victoire de Trump.

« On se rappelle le soir de l’élection de Donald Trump, les médias traditionnels étaient choqués. Ils n’auraient jamais cru que les Américains avaient finalement voté pour leurs propres intérêts », dit-il. Lors de son passage au Congrès du FN, il a tenu à réconforter les militants du parti, un parti de plus en plus divisé.

« Vous vous battez pour votre pays et on vous appelle racistes. Mais, le jour où ces genres d’insultes pouvaient marcher sont finis. Les médias sont à la solde du système. Chaque jour, nous devenons plus forts et ils sont plus affaiblis. Laissez-les vous appeler racistes, xénophobes ou tout ce qu’ils veulent, portez cela comme un badge d’honneur », lance-t-il.

Je ne m’attarderai point sur les propos de Steve Bannon tenus lors de ce Congrès. Mais, je voudrais toutefois revenir sur les liens troubles entre le Front National et l’administration Trump. Il est important de souligner qu’avant l’arrivée de Steve Bannon sur le sol français à la rescousse du FN, une personnalité importante de ce parti français s’était déjà rendue aux Etats-Unis où elle s’est adressée aux militants républicains ce 22 février.

En effet, dans un discours tenu lors d’une conférence de la CPAC (Conservative Political Action Conference), Marion Maréchal-Le Pen a joué la carte de l’anti-système, tourant en dérision le portrait que les médias américains font d’elle. Dans un discours d’une durée de 9 minutes 41 secondes, elle ironise : « j’espère que j’ai l’air moins terrifiante que le portrait que les médias américains font de moi. C’est fou. Hier, j’étais un fasciste. Aujourd’hui, je suis un socialiste ».

Dans son discours, la nièce de Marine Le Pen avait vigoureusement dénoncé l’impact de l’Union Européenne sur le fonctionnement des Etats européens. « (…) Non, la France n’est pas libre aujourd’hui. Les Français ne sont pas libres pour choisir leurs politiques, qu’elles soient économiques, monétaires, sur l’immigration ou même sur la diplomatie. Notre liberté repose désormais entre les mains de l’Union Européenne ».

Et d’ajouter : « cette Union Européenne n’est pas l’Europe. C’est une idéologie qui est uniquement orientée vers l’avenir tout en étant contaminée par une amnésie historique, une idéologie sans terre, sans peuple, sans racines et sans civilisation. Cette UE est en phase de tuer à feu doux des nations qui existent depuis des millénaires. »

Dans son discours, Marion Maréchal-Le Pen avait défendu sans complexe le slogan de Trump : « America First ». « (…) Je ne me sens pas offensée quand j’entends le président Trump dire : ‘America First’ », lance-t-elle. Ovationnée par le public, elle continue : « je veux America First pour le peuple américain, je veux Britain First pour le peuple britannique et je veux France First pour le peuple français ».

Le discours de Marion Maréchal Le Pen est disponible sur YouTube pour ceux et celles qui souhaiteraient l’écouter dans son intégralité. En ce qui me concerne, je préfère plutôt me focaliser sur un fait qui a attiré mon attention. C’est ce rapprochement entre le Front National et l’administration Trump.

Il est intéressant de souligner que ce rapprochement arrive au moment où les deux partis traversent une crise interne sans précédent : Trump est accablé par le Russiagate et sa politique migratoire est fortement critiquée jusque dans son propre campe ; le Front National est fragilisé depuis le départ de Florian Philippot, ex bras droit de Marine Le Pen

Je pense (et cela n’engage pas) que le FN est en train de se tirer une balle dans le pied, en s’affichant ouvertement avec les conservateurs américains, et plus particulièrement avec l’entourage de Trump, un président qui a dévissé dans les sondages et dont la cote de popularité se situe désormais à 40,7%.

Le Front National n’aurait-il pas plus à gagner en flirtant avec les mouvements anti-européens italiens qu’avec une administration de plus en plus isolée et dont le président a complètement perdu le contrôle du pouvoir ? Le Front National n’a-t-il pas pris des risques en s’alliant avec une administration de plus isolée sur la scène internationale ?

Le FN traverse une crise interne sans précédent, se bat pour redorer son image à la suite de la cuisante défaite à la présidentielle, mais risque de s’enliser davantage. La main tendue à la droite américaine ne va pas arranger les choses pour un parti en manque de leadership et qui peine déjà à rassembler sur son propre sol.

Edito  signé : Cheikh DIENG, rédacteur en chef et fondateur du site d’information : www.lecourrier-du-soir.com

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