(Une analyse du journaliste Cheikh DIENG)
La fragilité du pouvoir sous Macron occulte l’inexpérience politique de celui-ci. En effet, il n’a fallu que quelques cris d’indignation dans la classe politique, notamment de la part de la communauté juive, pour que le président français fasse marche arrière et annule sa décision de rendre hommage au maréchal Philippe Pétain.
« Je ne fais aucun raccourci mais je n’occulte aucune page de l’Histoire. Le maréchal Pétain a été, pendant la Première Guerre Mondiale aussi, un grand soldat. C’est une réalité de notre pays. C’est aussi ce qui fait que la vie politique comme l’humaine nature sont parfois plus complexes que ce qu’on voudrait croire. On peut avoir été un grand soldat à la Première Guerre Mondiale et avoir conduit à des choix funestes durant la deuxième », s’est justifié Macron il y a quelques jours devant la presse.
Cette décision de Macron de rendre hommage à un maréchal accusé d’avoir collaboré avec les nazis et d’avoir fait preuve de passivité face à l’extermination des Juifs n’est pas passée inaperçue. Elle a très vite suscité une vague de réactions dans la classe politique française. Et certains n’ont pas été tendres envers le plus jeune président de la Vème République.
« Le maréchal Joffre est le vainqueur de la guerre de 14-18. Pétain est un traitre antisémite. Ses crimes et sa trahison sont imprescriptibles. Macron, cette fois-ci, c’est trop ! L’Histoire de France n’est pas votre jouet », a réagi ce 7 novembre, Jean-Luc Mélenchon, chef de file de la France Insoumise sur Twitter.
Face à cette énième bourde qui intervient au moment où Macron et son gouvernement traversent une crise politique sans précédent, certains évoquent une stratégie de diversion minutieusement planifiée par l’Exécutif pour détourner les Français des vrais problèmes qui fragilisent Macron : hausse de la CSG, chute de popularité de Macron, l’appel du 17 Novembre…
Je n’y crois pas. Je pense que cette énième erreur commise par l’exécutif est symptomatique de l’immaturité politique du commandant en chef (ici Macron). Emmanuel Macron est certes beau, intelligent, charismatique, ouvert d’esprit…Les qualificatifs ne manquent pas. Mais, une chose est sûre : il ignore la réalité historique de la France et sur ce coup là, il le paye cash.
L’erreur de vouloir rendre hommage à Pétain est d’autant plus grave que cette fois-ci, Macron se prend en pleine figure l’immense colère de la communauté juive. En effet, ces dernières heures, les Juifs de France ont été profondément courroucés à l’idée de voir Pétain sur la liste de maréchaux que la République veut honnorer.
« Je suis choqué que l’on puisse honorer un homme qui, il faut le rappeler, à lui-même été responsable de la déportation des Juifs de France, et notamment de la rafle de Vel’ d’Hiv », s’est agacé Francis Kalifat, président du Crif (Conseil Représentatif des Institutions Juives de France) dans un communiqué publié ce mercredi 7 novembre.
Et la colère juive dépasse les frontières. En effet, en Israël, le gouvernement Netanyahou a manifesté une vive préoccupation. « Le maréchal Pétain a sanctionné et a facilité l’expulsion et le meurtre de Juifs. C’est inadmissible de laisser penser que ses précédents exploits puissent faire oublier les atrocités qu’il a commises. Je demande à Macron de ne pas chercher des excuses ou de défendre des Nazis et leurs sympathisants », a fait savoir Naftali Bennett, ministre israélien de l’Education.
Face à la politique qui n’a cessé de gagner du terrain et qui plonge l’Exécutif dans un malaise profond, le gouvernement tente de rectifier le tir, en faisant marche arrière. « Aucun hommage ne sera rendu à Pétain samedi. Il n’en a jamais été question. (…) Pétain contribue à la victoire de 1918. Mais, rien ne vient occulter ou faire oublier le Pétain qui a trahi, collaboré et, infamie ultime, celui qui a signé et mis en œuvre le décret sur le statut des Juifs. Rien, ni personne », a réagi sur Facebook, Benjamin Griveaux porte-parole du gouvernement.
Outre son inexpérience politique frappante, Macron n’a cessé depuis son arrivée au pouvoir de franchir les lignes rouges. L’affaire Bennalla qui avait fortement fragilisé son gouvernement et entaché sa crédibilité en juillet dernier devait lui servir de leçon. Mais, hélas, ce n’est pas le cas. En voulant honorer Pétain, il est évident qu’Emmanuel Macron se met toute la communauté juive à dos.
Les tergiversations et l’inexpérience de l’actuel occupant de l’Elysée posent un sérieux problème, à la fois au niveau de sa communication qu’au niveau de stature de chef d’Etat. Tout ceci me fait penser que le pouvoir sous Macron est un château de cartes qui ne tient sur rien. La moindre erreur suffit pour tout foutre en l’air.