(Une analyse du journaliste Cheikh DIENG)
« Guilty until proven innocent ». C’est ainsi que se plaignait le président américain Donald Trump dans l’affaire Brett Kavanaugh, devenu aujourd’hui, juge à la Cour Suprême américaine. Le président américain, envers qui je n’éprouve aucune sympathie, dénonçait vigoureusement la manière dont la presse et l’opposition américaine avaient voulu « tuer » son candidat à la Cour Suprême.
Pour une fois, j’étais d’accord avec l’actuel occupant de la Maison Blanche. Il faut bien comprendre que quand Donald Trump parle de « Guilty until proven innocent », c’est une façon de dénoncer cette manœuvre médiatico-politique qui consiste à clouer au pilori (le plus souvent sans preuves tangibles) tout homme politique qui n’adhère pas à leur agenda. Kavanaugh étant ami de Trump était devenu, aux yeux des médias, un ennemi à abattre.
En France, c’est malheureusement ce qui est en train de se produire. Mélenchon est cloué au pilori, une perquisition a été menée chez lui et ordonnée par on ne sait qui. Depuis plusieurs jours, on assiste à un virulent matraquage médiatique. Son image et celle de son parti (La France Insoumise) sont traînées dans la boue. Pendant ce temps, les instituts de sondage font chuter sa cote de popularité qui allait grandissant ces derniers mois.
Ce mardi, on nous apprend que l’affaire a pris une nouvelle tournure. En effet, en plus d’une guerre médiatique contre le premier opposant à Macron, une autre guerre est déclenchée à Mélenchon par un organe indépendant : le Grand-Orient de France. Les Franc-maçons veulent à leur tour tirer s’immiscer dans une affaire purement politique, oubliant que dans un Etat de droit, il y a ce qu’on appelle : la présomption d’innocence.
Ainsi, les Franc-maçons disent vouloir suspendre temporairement Jean-Luc Mélenchon en raison de son comportement lors de la perquisition. Dans quel monde sommes-nous ? Ce qui m’hallucine est qu’on se focalise sur la grosse colère d’un homme (dont le comportement est à mon avis condamnable), mais qu’on refuse de se focaliser sur le fond de la question : le sentiment d’impunité de la LREM (qui n’a jamais été inquiétée par la Cour des Comptes) et l’indépendance d’une justice qui semble manipulée.
Je rappelle que ce qui est reproché à la France Insoumise et aussi reproché au parti au pouvoir : LREM. La République En Marche a été accusé d’avoir bénéficié de ristournes et de prix cassés tout au long de la campagne présidentielle. Je n’aurai pas besoin d’apporter des chiffres car Le Monde et Médiapart l’ont déjà fait. Mais, comme par hasard, aucune perquisition n’a été menée au siège du parti au pouvoir.
Entre le 16 et le 30 octobre, les droits de Jean-Luc Mélenchon ont été ouvertement violés et une entreprise de communication a méticuleusement effectué le sale boulot qui consiste à détruire son image et celle de son parti. Et tout ceci se passe au moment où aucune preuve de ce dont il est accusé n’est encore fournie.
Mais alors, à quoi sert la présomption d’innocence ? Sommes-nous dans un Etat de droit ? Ces questions sont d’autant plus légitimes qu’elles nous ramènent tout droit vers ce que Trump qualifie de « guilty until proven innocent ». La présomption d’innocence est-elle sur le point de mourir ? Je le pense.