Retour sur l’affaire Sonko et les 94 milliards
Il y a un peu plus d’une semaine, un journaliste sénégalais du nom de Madiambal Diagne avait fait une révélation de taille qui a pris de court tous les Sénégalais. Le moment choisi par ce journaliste était propice pour faire tomber Ousmane Sonko, candidat qui a le vent en poupe et qui est en train de révolutionner le paysage politique sénégalais. Sonko a aussi été cité dans une autre affaire foncière où la somme de 94 milliards était en jeu.
Dans cette affaire, il a été question de 195 000 dollars. Je n’entrerai pas dans les détails. Les articles produits par les médias sénégalais sur ce sujet ont été légion ces derniers jours. Mais, face à la gravité des accusations portées contre Ousmane Sonko, redoutable candidat à la présidentielle 2019, il importe de faire la lumière sur cette affaire.
Mon travail ne consiste pas à laver Ousmane Sonko de tout soupçon, ni de prendre partie. Mon travail consiste à uniquement donner la vraie version d’une guerre politique dont l’unique objectif semble être l’élimination d’un des candidats qui risquent de faire voler en éclats les rêves de Macky Sall de briguer un second mandat.
Je tiens d’abord à préciser que le premier article dans lequel Sonko était accusé d’avoir touché des pots-de-vin au nom d’une entreprise pétrolière britannique (Tullow Oil) a été publié dans le média ghanéen, Modern Ghana. J’ai moi-même pris le soin de contacter le média qui m’a répondu ce dimanche 13 janvier à 2H21 du matin.
Dans le mail que j’ai reçu, Modern Ghana m’a renvoyé vers un article datant du 11 janvier dans lequel la rédaction a tenu à apporter des éclairages dans une affaire d’Etat. Modern Ghana confirme avoir reçu un édito intitulé : « The Challenges Of Exploiting Natural Resources in Africa ». Cet article avait été signé par une certaine Michelle Madsen.
Modern Ghana dit avoir contacté l’auteur de l’article à la suite de la polémique née de cette révélation. L’auteur de cet édito n’a jamais répondu et le média ghanéen s’était retrouvé dans l’obligation de supprimer le contenu de son site. Dans l’article qui m’a été envoyé par Modern Ghana, j’ai pu lire les échanges entre le média ghanéen et le supposé auteur de l’article.
« Votre article a été supprimé jusqu’à ce que vous apportiez des preuves de vos accusations. Pouvez-vous nous apporter des preuves pour corroborer votre thèse ? », demande Modern Ghana à l’auteur. Ce dernier rétorque : « Bien sûr, dès que je reprendrai mes fonctions, je vous enverrai les documents en lien avec cette affaire ». D’après Modern Ghana, l’auteur de l’article n’a plus jamais donné suite.
En tant que journaliste d’investigation, j’ai bouclé ma première mission qui était celle de savoir si les informations fournies contre Ousmane Sonko tenaient la route. Apparemment, non. L’auteur n’a jamais apporté des preuves car, en réalité, il (ou elle) n’en avait absolument pas.
Je me suis alors focalisé sur la personne de Michelle Madsen au nom de qui a été signé l’article. Je m’étonne de voir que de nombreux médias sénégalais n’ont jamais fait le moindre effort pour obtenir ses contacts. Certains confrères parlent d’ailleurs d’une journaliste « introuvable ».
Je me suis mis à sa recherche. J’ai très vite retrouvé plusieurs personnes portant ce même nom. Mais, il fallait minutieusement faire un tri pour retrouver la bonne personne. Et je ne me suis pas trompé. Je suis tombé sur le profil exact que je recherchais dans lequel il y avait une description de Michelle Damsen, ses activités d’activiste politique sur l’Afrique mais aussi sa passion pour la mode. Cerise sur le gâteau, son email y figurait.
J’ai immédiatement envoyé un mail lui demandant de me confirmer que c’était bien elle l’auteur de l’article. Elle n’a pas encore répondu. Mais, l’espoir est toujours permis. Pour un journaliste d’investigation, toutes les pistes doivent être exploitées pour percer le mystère. Et je me suis alors mis à la traquer sur les réseaux sociaux. J’ai enfin réussi à trouver son vrai compte twitter et je l’ai immédiatement suivie.
Michelle Madsen n’est pas prolixe sur twitter. J’ai pu voir qu’elle publie rarement des twittes. Ce qui est déjà un mauvais signe pour moi. Mais, hors de question de me décourager. Pendant trois jours, je consulte son profil twitter régulièrement pour voir sil elle arrivait à faire allusion à cette affaire de 94 milliards dans laquelle son nom est cité. Enfin, ce samedi 12 janvier, elle retwitte un article de BBC sur l’affaire.
Avant d’ajouter les liens, Michelle Madsen choisit comme titre : « Fake News in Senegal » (Fausse Information au Sénégal). Un titre qui prouve qu’elle rejette catégoriquement tout lien avec cet article qui lui est attribué. A partir de ce moment, j’ai eu la certitude totale qu’elle n’en est pas l’auteur.
Fake news in Senegal – @modernghanaweb explainer and @BBCAfrica story https://t.co/yjcz44np3Mhttps://t.co/jAnTTxw92y
— Michelle Madsen (@MadsenJourno) 12 janvier 2019
Je tiens à souligner que l’affaire a eu des retentissements jusqu’en Angleterre où le média BBC y a consacré un article. En effet, le très puissant média britannique a rédigé un article datant du 11 janvier et intitulé : « Fake journalist makes waves in Senegal » (Un journaliste fantôme secoue le Sénégal).
J’en arrive à la conclusion que les accusations portées contre Ousmane Sonko sont totalement fausses. Ce fut une manœuvre politique utilisée par un journaliste proche du pouvoir sénégalais dans un contexte de pré-campagne extrêmement tendu afin d’écorner l’image d’un jeune leader qui est en train de gagner les cœurs et les esprits. Cette manœuvre n’a pas prospéré et c’est bien fait pour sa gueule.
Source Modern Ghana, BBC
Cheikh DIENG est rédacteur en chef et fondateur du site d’information www.lecourrier-du-soir.com basé en France
Email : cheikhdieng05@gmail.com