Ces derniers mois, les relations très conflictuelles entre la junte malienne au pouvoir et l’Occident ont fait la une des médias du monde entier. C’est d’autant plus étrange que depuis 2013, date à laquelle la France a déployé ses troupes au Mali, ce pays n’avait jamais suscité autant d’intérêts de la part des médias occidentaux.
En effet, ces derniers mois, la signature d’un contrat entre la junte militaire arrivée au pouvoir par un coup d’Etat et la société russe Wagner a provoqué un séisme politique d’une rare violence en Occident où des Etats ont ouvertement menacé de quitter le Mali si ce pays venait à accueillir sur son sol des « mercenaires ».
Depuis, il s’est en suivi une véritable guerre diplomatique par médias interposés entre Bamako et Paris. La junte militaire malienne accuse la France d’avoir échoué dans sa guerre contre le terrorisme au Sahel et la France défend bec et ongles l’idée selon laquelle sans son intervention, l’Etat malien, dans son intégralité, serait aujourd’hui totalement sous le contrôle des islamistes.
Le débat est ouvert et chacun y va avec ses arguments. En tout cas, une chose est certaine : dans cette guerre qui oppose clairement la Russie à l’Occident, subsistent beaucoup d’interrogations auxquelles nous, observateurs externes, n’aurons probablement jamais de réponses.
Néanmoins, il y a un détail très intéressant qui ne devrait pas nous échapper : ce conflit (mondial) au relent de guerre froide semble avoir été totalement motivé par les ressources naturelles du Mali qui aujourd’hui suscitent la convoitise de toutes puissances étrangères (l’Occident, l’Asie, la Chine…). D’ailleurs, à y voir de près, tout laisse croire que le scénario bolivien se joue devant nous. Pour celles et ceux qui n’ont pas compris, permettez-moi de vous expliquer en détails.
En effet, en novembre 2019, Evo Morales, à l’époque président de la Bolivie, avait été évincé du pouvoir par un coup d’Etat militaire probablement financé par des puissances étrangères. Une thèse que le président déchu a, lui-même, confirmée à son retour au pays au bout de 11 mois d’exil. Pour lui, le lithium, ce métal précieux que veulent s’arracher les puissances occidentales, a été à l’origine du coup d’Etat perpétré contre lui.
Ainsi, en marge de sa première conférence de presse, il dira ceci : “au bout de plusieurs rencontres, je me suis rendu compte que l’Occident, c’est-à-dire les pays industrialisés veulent seulement de nous, les Latinos, parce que nous leur garantissons une matière première”. Face à la presse, Morales fit une révélation de taille accusant le milliardaire américain, Elon Musk (propriétaire de Tesla), d’avoir financé le coup d’Etat contre lui.
“Le propriétaire de Tesla dit avoir financé le coup d’Etat, seulement pour mettre la main sur le lithium. Aux Etats-Unis, il y a une préoccupation majeure concernant le lithium et ce coup d’Etat a été perpétré pour le lithium. Ils ne veulent que nous accordions au lithium sa valeur ajoutée en tant qu’Etat. Ils veulent que nos ressources naturelles soient entre les mains des multinationales”, révèle-t-il, ajoutant que les puissances occidentales sont prêtes à déployer des militaires dans les pays où les peuples veulent garder une pleine souveraineté sur leurs ressources naturelles.
Dans le cas du Mali, ce serait extrêmement périlleux de ne pas reconnaître la volonté de lutter contre le terrorisme de la part des puissances étrangères qui ont d’ailleurs perdu des hommes sur le terrain. Cependant, ce serait une immense erreur de croire que les mêmes intérêts géostratégiques qui ont motivé le coup d’Etat bolivien n’existent pas dans cette crise qui se déroule au cœur du Sahel.
Oui, le modus operandi reste le même. Au Mali aussi, les puissances occidentales se battent pour le contrôle des richissimes matières premières dont regorge le pays, parmi lesquelles le Lithium, aussi appelé l’ « or blanc », une matière première d’une importance primordiale pour la fabrication de batteries de téléphone, de voitures électriques…
Mais, le Mali est-il vraiment riche en lithium? A cette pertinente question, le média français Courrier International détient la réponse. Ainsi, dans un article publié sur son site ce 6 janvier, on y apprend : « le Mali pourrait devenir un géant de la production de lithium, ce métal indispensable aux économies modernes, friandes de batteries électriques ».
Et le média français de fournir davantage de détails : « selon une étude de faisabilité rendue publique en décembre 2021, la mine de lithium (celle de Goulamina, située à environ 150 kilomètres de Bamako) devrait produire à terme une moyenne annuelle de 726 000 tonnes de concentré de spodumène, un silicate d’aluminium et de lithium. L’exploitation de la mine devrait s’étaler sur une durée de vingt et un ans, atteignant au cours de cette période un pic d’extraction de 880 000 tonnes par an. La mine doit entrer en production en 2023, au plus tard début 2024. Autre chiffre significatif, le projet affiche une valeur actuelle nette de 4,1 milliards de dollars ».
D’après les informations fournies par des sources fiables, le Mali détient la deuxième plus grande réserve de lithium en Afrique, derrière la RDC. D’autres sources affirment qu’il est déjà le premier producteur sur le continent africain devant la République Démocratique du Congo. Une grosse aubaine donc pour le pays déchiré par 10 années de guerre. Car, d’après FinancialAfrik, sur 5 ans, le Mali devrait toucher 6,67 milliards de dollars. C’est énorme!
Si, jusqu’ici, le traitement de la crise malienne par les médias internationaux donne le sentiment que tout tourne autour de la guerre contre le terrorisme, la réalité sur le terrain nous dit tout le contraire. Les enjeux sont énormes. Et ni l’Occident, ni la Chine, ni la Russie ne veut perdre la mainmise d’un sous-sol aussi fertile.
Pour le moment, Pékin semble avoir pris une longueur d’avance sur ses rivaux. Car, à en croire l’agence Ecofin, un consortium australo-chinois sera aux commandes de la première mine de lithium au Mali. Et cela risque de ne pas plaire à certains! Suivez mon regard!