Coup d’Etat en Afrique : après la chute de Mugabe, qui sera le prochain président à tomber ?

Après 37 ans au pouvoir, le règne de Robert Mugabe tire à sa fin. En effet, un coup d’Etat militaire minutieusement préparé par l’armée zimbabwéenne a permis de mettre fin, sans faire couler la moindre goutte de sang, au règne d’un des plus grands despotes africains qui, ivre de pouvoir, a fini par sortir par le petite porte de l’histoire du Zimbabwe et de l’Afrique.

Lorsque Mugabe avait pris le pouvoir en 1987, il était alors perçu comme un messie, idolâtré par une grande majorité des Zimbabwéens qui voyaient en lui un chantre de la liberté du pays. Ex membre des vétérans de guerre qui avaient risqué leurs vies pour la dignité et l’honneur du pays, Robert Mugabe finira malheureusement par susciter un gros désenchantement, en s’agrippant au pouvoir et en réduisant le Zimbabwe à sa famille.

Il est étonnant de faire remarquer que l’ex président Mugabe, âgé de 93 ans, n’avait jamais voulu évoquer le sujet de sa succession et tous ceux qui osaient mettre ce sujet sur la table finissaient leurs vies dans les geôles. En voulant éterniser son pouvoir, il avait fini par créer une richissime et arrogante élite ainsi qu’une aristocratie qui vivait sans gêne de la sueur du pauvre zimbabwéen.

Aucun pouvoir (si ce n’est divin) n’est éternel. Et à l’instar de Hosni Moubarak, de Ben Ali ou encore Mouammar Kadhafi, Robert Mugabe devait savoir lui-aussi que son heure arriverait un jour. Néanmoins, de manière étrange, le nonagénaire n’a jamais pensé une seule fois, depuis son arrivée au pouvoir, à se retirer de la vie politique, à prendre une retraite bien méritée et ainsi rendre service au Zimbabwe, un pays devenu l’un des plus pauvres sur le continent qui s’écroule sous le poids de sa dette.

En 2017, la dette publique du pays a connu une hausse de 11 milliards de dollars. Pendant ce temps, la dette nationale est estimée à 4,3 milliards de dollars et la dette extérieure 7,5 milliards de dollars, environ 53% du PIB. Face à la gravité de la situation, Mugabe maintient le flou sur la situation économique du pays et continue de vendre des rêves à un peuple à bout.

Difficile de revenir sur toutes les erreurs commises par l’ancien président zimbabwéen  et sa femme, Grace Mugabe, ces dernières années. Cependant, il serait bon, dans cet édito, que je revienne sur les récentes folies du nonagénaire qui ont certainement précipité sa chute. En effet, il y a une déclaration qui a profondément suscité mon inquiétude ces derniers temps.

En février, Grace Mugabe, ex Première Dame et fidèle épouse de Mugabe, avait fait une déclaration largement reprise par la presse internationale. En s’adressant à son audience dans la localité de Buhare, elle avait clairement fait savoir à celle-ci que, même mort, son mari serait candidat à la présidentielle.

Voici ce qu’elle disait : « ceci va être un miracle. Si un jour, DIEU décide de mettre fin à la vie de Mugabe, nous allons le choisir comme candidat en tant que cadavre. Nous allons en fait mettre une photo sur le bulletin de vote et vous verrez que les gens voteront pour lui ». Ce culte de la personnalité est digne d’un autre temps et pourtant ces paroles ont été prononcées en 2017, au 21ème siècle. Rappelons que Mugabe a été désigné candidat par son propre parti Zanu-PF lors d’une cérémonie d’investiture qui a eu lieu ce 17 décembre 2016.

Malgré son âge très avancé, Mugabe, comme beaucoup de dirigeants africains qui sont souvent très mal entourés, n’a jamais voulu  voir la réalité en face. Il n’a cessé ces dernières années de promouvoir une élite zimbabwéenne, dont sa fille qui a récemment été nommée au comité de censure médiatique. Un comité dont la fonction principale est sans doute de museler les médias qui seraient tentés de dépeindre la dure réalité politique et économique du pays.

Il serait en effet très difficile de revenir sur toutes les maladresses commises par le régime de Mugabe ces dernières années. Un régime complètement isolé par les nations occidentales et qui a eu du mal à obtenir un soutien des nations africaines. A part quelques nations émergentes, notamment la Chine, le régime n’avait pratiquement plus d’interlocuteurs. Ce à quoi nous assistons aujourd’hui est le ras-le-bol d’une nation qui exprime sa colère face à un régime qui ne veut rien entendre.

En tant qu’Africain, je profite de cet édito pour apporter tout mon soutien au peuple du Zimbabwe. Mention spéciale à l’armée zimbabwéenne qui a renversé un despote sans mettre en danger la vie des citoyens. Ce qui s’est produit au Zimbabwe ce mardi devrait inspirer de nombreux pays du continent où des dictateurs sont au pouvoir depuis plusieurs décennies, pillent les richesses du pays sans jamais songer à laisser la place aux autres.

Les peuples africains doivent se réveiller. Et dès maintenant.

Edito signé : Cheikh TIidiane DIENG

Rédacteur en chef et fondateur du site d’information Lecourrier-du-soir.com à Paris

Email : cheikhdieng05@gmail.com