Qu’on le veuille ou pas, Macron sort carrément vainqueur de cette guerre contre le Covid-19. Il faudra pour cela comparer la situation dans laquelle il se trouvait il y a un mois et demi et celle d’aujourd’hui où, dans un contexte de guerre contre un ennemi invisible, il accapare tous les pouvoirs.
Macron avait sérieusement besoin d’une stratégie du choc pour mener à bien son projet dans un contexte où presque chaque proposition qu’il avait mise la table avait été rejetée en bloc par les Français. En novembre 2018, une impressionnante vague de protestation connue sous le nom de « Gilets Jaunes » s’est dressée contre lui pour s’opposer à son projet de taxe carbone. En décembre, transports publics, avocats, agriculteurs, enseignants… paralysent le pays pour dire niet à sa réforme des retraites.
Une réforme qui finira pas être imposée au peuple à travers l’application du 49.3. Les risques d’embraser le pays étaient énormes. Dans la foulée, une poignée de manifestants se réunissent devant l’Assemblée Nationale en fin d’après-midi pour dénoncer un passage en force inacceptable en démocratie. Quelques mois plutôt, le mot de grève dans les transports publics avait été levé et il faut dire que dans cette guerre qui l’a opposé à la SNCF, à la RATP et aux syndicats, Macron est carrément sorti vainqueur.
Le président avait besoin d’une stratégie du choc pour achever sa politique néolibérale. Il n’a pas été à l’origine du coronavirus, mais il faut dire que cette pandémie a été une véritable aubaine pour diriger la France en toute tranquillité sans désormais le risque d’un soulèvement populaire que beaucoup craignaient d’ailleurs. Et Macron n’a pas raté l’énorme occasion que la pandémie venait de lui offrir. Il lui fallait un Etat d’urgence pour prendre le contrôle total de la situation. Il l’a eu le 23 mars.
En effet, à partir de cette date, une série de mesures exceptionnelles ont été prises pour lutter contre le Covid-19 : les 67 millions de Français ont ainsi été obligés au confinement, les rassemblements interdits, l’Etat peut désormais recourir aux réquisitions, le second tour des municipales a été reporté et le scrutin pourrait même être annulé, l’Etat peut mettre en place un véritable programme de surveillance massive qui risque de violer la vie privée des citoyens mais qui ne fera face à aucune contestation sous le prétexte d’une lutte contre le Covid-19, le Parlement est désormais fragilisé et le code du travail attaqué.
Toutes les mesures citées sont appliquées par l’Etat. Les Français sont obligés à se confiner depuis le 17 mars à 12H00, les rassemblements sont désormais totalement interdits, l’Etat a déjà réquisitionné des masques à la région Bourgogne-Franche-Comté, le second tour est reporté et l’Etat travaille sur la mise en place de StopCovid, une application qui permettra de lutter contre le Covid-19 en se basant essentiellement sur la surveillance des déplacements des citoyens sur le sol français. Au Parlement, la démocratie suit son cours mais la présence des députés est très réduite en raison du confinement. Je peux aussi ajouter que l’économie est aujourd’hui totalement entre les mains de l’Etat qui est le seul à proposer des mesures de sortie de crise.
Sur le plan économique, les citoyens devront s’attendre à ce que l’austérité leur soit appliquée. Car, il y a un risque que la dette explose comme l’avait reconnu Bruno Le Maire qui, au lendemain du discours de Macron du 16 mars, prédisait que la dette de la France allait franchir le cap des 100% du PIB. Les Français devront ainsi s’attendre à travailler plus comme l’a suggéré le patron du Medef ces dernières heures. « Il faudra bien se poser tôt ou tard la question du temps de travail, des jours fériés et des congés payés pour accompagner la reprise économique et faciliter, en travaillant, un peu plus, la création de croissance supplémentaire », a déclaré Geoffroy Roux de Bézieux, patron du Medef.
Toutes ces mesures seront prises sans qu’aucun Français ne puisse s’y opposer au nom de l’Etat d’urgence. Je dois signaler que depuis son entrée en vigueur, les rues sont devenues calmes. Le mouvement Gilets Jaunes qui commençait déjà s’essouffler a disparu de la circulation (même s’il pourrait bien renaître de ses centres), les opposants à la réforme des retraites ont, eux-aussi, étaient sommés de se confiner et les farouches opposants à Macron se retrouvent dans l’obligation de mener leur combat pour une justice sociale sur les réseaux sociaux.
D’ici la fin de l’Etat d’urgence, voire au-delà de cette période, Emmanuel Macron peut dormir tranquille. Il n’a plus rien à craindre car la situation lui donne le contrôle total du pays. Il a tous les pouvoirs face à un peuple qui, il y a deux mois, représentait une sérieuse menace à son pouvoir.