La cible est mûre et il faut l’abattre avant qu’il ne soit trop tard. Le Liban a vécu ce 4 août l’une des pires journées de ces dix dernières années lorsqu’un entrepôt contenant 2 750 tonnes de nitrate d’ammonium, une substance dangereuse, a explosé à Beyrouth, dans la capitale. Le bilan est très lourd : 137 personnes ont été tuées.
Pour l’heure, c’est l’indignation générale à travers le monde où plusieurs dirigeants politiques de premier plan ont présenté leurs condoléances au Liban. Parmi eux, figurent Emmanuel Macron, président de la France qui a décollé pour Beyrouth ce 6 août mais aussi l’Ayatollah Ali Khamenei de l’Iran.
Ce n’est pas un hasard de citer le nom de ces deux dirigeants. En effet, les deux représentent deux visions de l’actuel Liban, un pays profondément divisé par des tensions communautaires mais aussi confessionnelles où chiites, sunnites et catholiques se partagent le pouvoir.
Emmanuel Macron représente le monde occidental dans un pays, qui plus est, fut une ancienne colonie de la France, tandis que l’Ayatollah Khamenei représente la très puissante communauté chiite libanaise sous le férule du Hezbollah libanais, dirigé par le très charismatique prédicateur Hassan Nasrallah.
L’indignation suite à l’explosion du stockage de nitrate d’ammonium est d’autant plus grande que le pays est récemment plongé dans une crise économique sans précédent. En effet, depuis plusieurs semaines, une jeunesse libanaise à bout défie ouvertement une classe politique corrompue dans les rues du pays, exigeant la démission sans condition de ses dirigeants.
Dans un contexte aussi sensible dans le pays le plus fragile du monde arabe, la moindre étincelle suffit à foutre le champs en l’air. Et tout laisse à croire que l’explosion du stockage de nitrate d’ammonium qui a plongé le pays dans une immense tristesse n’est que le début d’une longue crise qui, comme en Libye, va provoquer une ingérence de l’Occident et de l’Iran dans un Liban déchiré par plusieurs années de guerres.
Et si l’explosion servait à déclencher une guerre dans ce pays? Certains, en lisant cette question, parleront de théorie du complot et ils n’auront probablement pas tort. Mais, à y voir de près, il y avait bien une volonté, un jour où l’autre, de neutraliser la seule force qui représente jusqu’ici une sérieuse menace à Israël : le Hezbollah.
Revenons-en aux faits. Ce 5 août, quelques heures seulement après l’explosion, alors que la piste d’un attentat n’était même pas encore privilégiée, le média israélien, Jérusalem Post, a fait une révélation choc, accusant le Hezbollah libanais d’avoir dissimulé plusieurs stocks d’ammonium dans un entrepôt basé à Londres. D’après le média israélien, l’entrepôt a été découvert en 2015 par le MI5, service de renseignement britannique et la police de Londres.
Jérusalem Post ira plus loin, accusant une nouvelle fois le Hezbollah libanais d’avoir stocké des centaines de kilogrammes de nitrate d’ammonium dans le sud de l’Allemagne. La découverte n’a été faite qu’en début d’année 2020. Le médias israélien conclut que les services de renseignement britanniques et allemands ont obtenu les informations sur les stockages de nitrate d’ammonium par le Hezbollah sur leur sol grâce au Mossad israélien.
Et les accusations ne s’arrêtent plus. En effet, ce 6 août, le même média israélien et Fox News, média nord-américain, ont révélé que le Qatar a financé la livraison d’armes à destination du Hezbollah en 2017. Jerusalem Post parle d’un certain Jason G. comme étant l’homme à l’origine de cette information.
Il est intéressant de noter que pour l’heure, personne ne veut endosser la responsabilité de l’accident. Ni Israël où les autorités ont catégoriquement nié toute implication de leur pays dans cette explosion, ni le Hezbollah qui a promis de faire exploser Israël qu’il accuse d’être à l’origine du drame.
Mais, pendant ce temps, la compassion envers le Liban bat son plein et plusieurs pays se sont mobilisés pour apporter de l’aide à une nation économiquement à terre et socialement au bord de l’implosion. Ainsi, l’Australie a promis une aide 1,4 millions de dollars, le Qatar a dépêché un avion rempli d’aides. Le Koweït a apporté des médicaments, la Grèce a dépêché des centaines de sauveteurs, l’Iran s’apprête à envoyer des médecins…Même en Israël, pays qui a entretenu des relations très conflictuelles avec le Liban, la mairie de Tel Aviv s’est illuminée ce 5 août aux couleurs du drapeau libanais en signe de soutien.
Cette compassion sélective au relent très hypocrite notée ces dernières heures entre dans une logique qui ne nous est pas étrangère. Nous l’avons vécue en 2014, date à laquelle les médias du monde entier avaient relayé des images filmées depuis la Syrie lorsqu’il a été révélé que le régime de Bachar Assad avait utilisé des armes chimiques contre sa propre population. Nous l’avons aussi vécue dans d’autres endroits du monde où pour légitimer une intervention militaire, il fallait jouer sur les émotions. Au Liban, nous sommes exactement dans ce cas de figure.
La guerre contre le Liban aura bien lieu. Cependant, contrairement à celles qui l’ont précédée, il s’agira cette fois-ci d’une guerre contre le Hezbollah, force redoutable devenue, ces dernières décennies, une véritable menace à l’Etat d’Israël, que ce soit au Liban ou en Syrie où les mercenaires du Hezbollah, armés par l’Iran, ont permis au régime d’Assad de se maintenir encore au pouvoir.
L’Etat d’Israël, pour achever la Syrie, sait qu’il lui faudra impérativement neutraliser le Hezbollah, un pays qui se trouve à sa porte. Pour y arriver, il faut bien évidemment le faire avec le soutien du gouvernement libanais qui est totalement fragilisé et qui, certainement, ne refuserait pas le projet de l’Occident de se débarrasser du Hezbollah, force politique terrible.
Israël est parfaitement conscient de la puissance politique de Hassan Nasrallah qui a su fédérer autour de lui toutes les confessions. En effet, il est soutenu par les chiites, mais aussi par des sunnites et des chrétiens qui voient en lui le dernier rempart contre ce qu’ils appellent « l’ennemi juif ».
Israël est également conscient que dans cette crise politique qui secoue le Liban, seul le Hezbollah en sortira vainqueur et ne veut surtout pas que ce scénario se produise à seulement quelques kilomètres de ses frontières. Il faut bien le rappeler, les deux pays ennemis sont aussi voisins.
La cible est donc clairement identifiée. C’est le Hezbollah libanais. Et l’explosion de stockage de nitrate d’ammonium qui s’est produite ce 4 août peut être interprétée comme une attaque voulue par des puissances étrangères pour faire tomber un mouvement qui représente une sérieuse menace aux intérêts de l’Occident dans cette partie du monde.
Une attaque militaire pour désarmer le Hezbollah, voulue par l’ONU, aura bien lieu. Et elle aura lieu dans un futur proche.