Démonstration de force de la France insoumise. Nul n’est pas à côté de l’événement « Fête à Macron » organisé par la France insoumise et qui a attiré l’attention des médias du monde entier. Ce samedi 5 mai, la France insoumise a encore frappé fort, déstabilisant davantage un gouvernement qui se cherche et qui a du mal à convaincre.
Le 2 juillet 2017, j’avais écrit un édito intitulé : « Mort du PS : la France insoumise devient incontestablement le seul espoir de la gauche en France ». Je ne me suis pas trompé. J’irai même plus loin : la France insoumise est devenue incontestablement la seule opposition à Macron.
Au-delà d’une mobilisation spectaculaire qui a permis au parti de frôler le second tour de la présidentielle en recueillant 19,58% des voix, la France insoumise compte un atout majeur : celui d’avoir comme chef de file un « commando de guerre » âgé de 66 ans dont la fougue, la pertinence et la maîtrise de la langue de Molière est indiscutable. Mélenchon a, il faut bien le reconnaître, réussi à secouer un gouvernement redoutable soutenu par les puissances financières et les médias les plus conservateurs au monde.
Jean-Luc Mélenchon a réussi ce samedi à faire trembler ces superpuissants médias conservateurs basés pour la plupart aux Etats-Unis et qui ont soutenu Emmanuel Macron dès l’annonce de sa candidature à la présidentielle française. Ce samedi, ils ont assisté malgré eux à un soulèvement populaire de quelque 160 000 insoumis qui ont dit basta au chouchou du monde la finance.
Pour vous donner une idée de la situation très dure que vivent les médias mainstream nord-américains, je vous propose quelques titres parus entre ce 5 et 6 mai. En effet, dans un édito publié en ligne ce 6 mai, le média américain NBC s’interroge : « première année de Macron : le président en or de la France ne risque-t-il pas de perdre son lustre ? ». Le New York Times a titré ce lundi dans un article factuel : « Macron est décrit comme un Roi dans des manifestations contre la ‘dictature molle’ ».
Toutefois, j’ai été assez surpris de remarquer qu’au même moment, certains médias nord-américains refusent catégoriquement de lâcher leur « golden president ». Ce 4 mai, USA Today a réitéré à Macron tout son soutien en titrant : « l’Amérique peut utiliser de jeunes dynamiques leaders centristes tels que Macron ».
USA Today ignore peut-être que ce jeune président qui ne se revendique ni de gauche ni de droite est en train de plonger son pays dans une crise sociale sans précédent en voulant à tout prix faire avaler aux Français la pilule très amère d’une série de réformes économiques voulues par l’Union Européenne.
En France, les mesures très capitalistes de Macron inquiètent. Après avoir annoncé la hausse du CSG (Contribution Sociale Généralisée) qu’il considère comme « un effort aux plus âgés », Macron s’est attiré la foudre de quelque 7,5 millions de retraités français qui envisagent d’ailleurs de manifester ce 14 juin pour dénoncer ce que certains appellent une « injustice ».
Mais, Macron est allé trop loin dans sa volonté de réformer l’économie française lorsque son premier ministre a annoncé ce 26 février 2018 la fin du statut des cheminots. Le jeune président français ouvre ainsi un nouveau front contre la classe ouvrière et offre à Mélenchon l’occasion tant attendue pour lui rentrer dedans.
Mélenchon enchaîne les coups. Le 22 mars, sur le plateau de Jean-Jacques Bourdin, il attaque frontalement Macron qu’il accuse d’appliquer la feuille de route de l’Union Européenne. « On entre dans un moment de souffrance (…). Les gens vont souffrir parce qu’ils vont perdre des journées de salaires pour faire la grève qui pour défendre la SNCF, qui le service public dont vous et moi nous bénéficions », lâche-t-il.
Et d’ajouter : « ensuite, la vie quotidienne des milliers de gens va être aussi perturbée par la grève. Il faut assumer de le dire. Oui, ça va être difficile. Et nous faisons tout ça parce quelqu’un, le président de la République, a décidé de mettre en œuvre, en appliquant rien d’autre que la feuille de route de l’Union Européenne ».
Il faut rappeler qu’en septembre, la stratégie de Mélenchon était un secret de polichinelle. En effet, il avait déclaré haut et fort que son mouvement voulait faire tomber la politique d’Emmanuel Macron. « Nous faisons notre travail d’opposition. Nous voulons empêcher Emmanuel Macron d’aller au bout de sa politique, faire tomber sa politique, ça c’est clair », répondait-il à une question de Bourdin le 6 septembre 2017.
Moins d’un an après l’arrivée de Macron à la tête de la France, force est de constater qu’il ne reste plus qu’une seule opposition face au président français : la France insoumise. Et pour arriver à neutraliser tous ses rivaux de l’opposition, Mélenchon n’y est pas allé de main morte. Il a discrédité le PS, les LR et le FN.
En septembre 2017, alors que le PS est plongé dans une crise politique sans précédent suite à la défaite cuisante de Benoît Hamon qui n’a recueilli que 6,5% des voix, Mélenchon annonce la mort du parti socialiste en se confiant au quotidien La Provence : « le PS est aujourd’hui le seul zoo de France où les animaux se gardent entre eux. La vieille gauche est à bout de souffle. Cela ne m’empêche pas de jeter la rancune à la rivière ».
Trois mois plutôt, en juin 2017, sur le plateau de RTL, Mélenchon avait déjà annoncé sa volonté de remplacer le PS. « Le remplacement est en cours. Le remplacement parce que le Parti Socialiste a été une structure qui a été disqualifiée par les électeurs, et pas par moi. Moi, je sais ce que j’en pense et je l’ai quitté en 2008. Mais, il ne suffit pas qu’il soit disqualifié, il faut le remplacer (…) »
Quand Mélenchon s’attaque à l’extrême-droite ou parti LR, il n’y va pas avec le dos de la cuiller. Je fais remarquer que ses attaques contre ses rivaux de l’opposition interviennent au moment où ces derniers sont totalement désaxés. Le PS subit le contrecoup d’une présidentielle médiocre; chez les LR, Wauquiez a du mal à fédérer et au FN, le récent départ de Philippot qui accuse Marine Le Pen de ne plus « assumer la défense de l’indépendance nationale » a affaibli le parti.
En une année, Mélenchon a réussi un exploit, en rabaissant toutes les forces d’opposition pour devenir le seul vrai opposant à Macron. La récupération politique qu’il a faite du statut des cheminots et sa démonstration de force de ce samedi 5 mai sont des signes qu’il aspire sérieusement à prendre le pouvoir en 2022.
D’ailleurs, son ambition présidentielle n’a jamais été aussi forte qu’après la défaite de son parti éliminé dès le premier tour de la présidentielle 2017. « Je suis un homme politique qui doit diriger un grand mouvement politique. Et mon objectif, c’est la conquête du pouvoir. C’est cela que je dois essentiellement préparer », disait-il en septembre 2017.
Qu’on le veuille ou pas, Mélenchon est sur le chemin qui mène tout droit à l’Elysée.
Edito signé: Cheikh DIENG, rédacteur en chef et fondateur du site d’information www.lecourrier-du-soir.com basé à Paris
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