Les ministres des Finances et des Fonctions Publiques, respectivement pilotés par Bruno Le Maire et Stanislas Guerini, viennent d’être épinglés par la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés) qui les accuse d’avoir envoyé plus de 2 millions de messages à des fonctionnaires pour vanter la réforme des retraites
D’après le journal Le Monde qui a relayé l’information, de nombreux fonctionnaires qui avaient reçu le message s’étaient sentis choqués, comme ce fut d’ailleurs le cas de Céline Verzeletti, cosecrétaire générale de l’Union fédérale des syndicats de l’Etat de la CGT, laquelle avait réagi en ces termes : « Déni de démocratie, propagande mensongère, détournement de fichiers »
La CNIL a annoncé la nouvelle dans un communiqué publié, ce 14 novembre, sur son site officiel et intégralement lu par Lecourrier-du-soir.com.
Lecourrier-du-soir vous invite à lire le communiqué dans sa version intégrale
Excellente lecture
« Le 9 novembre 2023, la CNIL a rappelé à l’ordre le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques et le ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique pour avoir utilisé les coordonnées des agents publics afin de communiquer sur le projet de réforme des retraites.
Le 26 janvier 2023, un courriel dont l’objet était « Réforme des retraites : Message de Stanislas Guerini aux agents de la Fonction publique » a été envoyé à 2 346 303 agents publics actifs. Le courriel renvoyait vers une vidéo dont le titre était identique à l’objet du courriel, et vers un document de présentation intitulé « Pour nos retraites : un projet de justice, d’équilibre et de progrès ». La vidéo contenait un message filmé du ministre de la Transformation et de la Fonction publiques aux agents publics, leur exposant et justifiant la réforme des retraites, alors en cours d’adoption.
À la suite de cet envoi, la CNIL a été saisie de près de 1 600 plaintes à ce sujet. La formation restreinte – organe de la CNIL chargé de prononcer les sanctions – a été saisie.
Une sanction pour avoir utilisé un fichier administratif à des fins de communication politique
L’administration peut communiquer auprès de ses agents toutes les informations nécessaires à l’exercice de leur mission ou relatives à leur statut d’agent public, mais elle ne doit le faire que dans le respect des règles encadrant les fichiers qu’elle utilise.
Pour envoyer le message du 26 janvier 2023 aux agents publics, l’administration avait utilisé le fichier ENSAP, régi par le décret n°2022-1446 du 21 novembre 2022 et qui relève du ministre chargé de l’économie. L’ENSAP est un « outil d’échange et de communication », matérialisé notamment par une plateforme numérique sur laquelle sont disponibles les documents confidentiels des agents publics, tels que leur bulletin de paie mensuel. Pour s’inscrire, l’agent public fournit une adresse électronique.
La formation restreinte a d’abord relevé que le décret régissant cette plateforme n’avait pas été respecté. En particulier, il permet seulement à l’’administration d’adresser aux agents publics des courriels les informant qu’un document est disponible sur la plateforme ENSAP afin de leur offrir des services personnalisés.
Ensuite, la formation restreinte a rappelé que l’ENSAP ne peut pas servir à une communication de nature politique. Or, elle a considéré que l’envoi du courriel et la vidéo à laquelle il donnait accès constituaient, dans ce cas, une communication politique et non à une communication entre l’agent et l’administration tel que le prévoit le décret. En effet, le message vidéo du ministre visait à convaincre du bien-fondé du projet de réforme des retraites, laquelle n’était pas encore votée.
La formation restreinte de la CNIL a conclu qu’en utilisant les adresses électroniques des agents publics collectées dans le cadre de l’ENSAP pour l’envoi de cette vidéo, les ministères mis en cause avaient utilisé ces données personnelles de manière incompatible avec l’objectif de ce fichier ».