L’équation se complique pour l’Occident. En effet, plus d’un mois après l’intervention militaire en Ukraine, les Occidentaux ont du mal à briser la Russie en l’isolant totalement de la scène internationale. Car, deux alliés stratégiques de Moscou, et pas des moindres, ont tout simplement décidé qu’il n’en sera pas ainsi.
Ces deux puissances régionales ne sont autres que la Chine et l’Inde, deux alliés fondamentaux de la Russie qui se sont ostensiblement démarqués de l’Occident qui, dès le début du conflit, a décidé asphyxier l’économie russe à travers des sanctions financières extrêmement sévères.
Mais, si l’Occident compte sur Pékin et New Delhi pour « provoquer l’effondrement de l’économie russe » (comme le disait Bruno Le Maire, ministre français de l’Economie), c’est peine perdue. Car, depuis le début du conflit, les relations entre ces trois puissances se portent à merveille et l’idée de pouvoir les briser semble relever de la pure chimère.
En effet, concernant la Chine, il convient de rappeler la position claire et ferme de Pékin depuis fin mars dernier. Alors que les Etats-Unis et l’Union Européenne n’ont cessé de faire pression sur elles pour qu’elles n’aident pas Poutine à contourner les sanctions internationales, les autorités chinoises avaient dit niet.
« En tant que membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations-Unies, la Chine et la Russie sont, l’une et l’autre, des partenaires stratégiques et des voisins”, avait martelé Wang Yi, ministre chinois des Affaires étrangères. Et d’ajouter : “les liens entre la Chine et la Russie sont les relations bilatérales les plus cruciales au monde et notre partenariat non seulement apporte des profits et du bien-être à nos peuples, mais participe aussi à la paix dans le monde, à la stabilité et au développement”. Le chef de la diplomatie chinoise avait également tenu à préciser que l’ “amitié entre les deux peuples sont extrêmement solides”.
Ces propos ont été tenus au tout début du mois de mars, dix jours seulement après l’intervention militaire russe en Ukraine. Et depuis, la position chinoise n’a pas bougé d’un iota. Ainsi, après avoir publiquement refusé de sanctionner son partenaire russe, la Chine entend construire (avec la Russie) un « nouvel ordre mondial juste et démocratique » pour contrecarrer l’hégémonie occidentale.
“Nous, avec vous et nos sympathisants, nous nous dirigerons vers un nouvel ordre mondial juste et démocratique”, a ainsi martelé fin mars, Sergei Lavrov, le chef de la diplomatie russe (en voyage en Chine), soulignant que l’ordre mondial actuel “est en train de traverser une étape très critique dans les relations internationales”.
Il est donc clair que Pékin n’a aucunement l’intention de lâcher la Russie dans un contexte géopolitique extrêmement trouble marqué par une rivalité sans précédent entre puissances qui se livrent une guerre sans merci pour ne pas perdre leur place de puissance dans le nouvel ordre mondial qu s’annonce.
Cependant, les choses se compliquent davantage pour l’Occident, de plus en plus malmené par la Chine et la Russie qui ont commencé à lui damer le pion en Afrique, continent où l’hégémonie occidentale a sérieusement commencé à péricliter. D’ailleurs, le rejet massif de la France dans plusieurs pays du Sahel en est une illustration parfaite.
Avec seule la Chine comme soutien de la Russie, l’Occident n’aurait probablement rien à craindre. Mais, apparemment, Pékin n’est pas le seul à vouloir tendre la main à la Russie en ces temps durs. L’Inde aussi.
En effet, il ne nous a pas échappé que le ministre russe des Affaires étrangères a effectué une visite en Inde ce vendredi 1er avril. Au menu des échanges entre les deux puissances : les liens commerciaux. Ainsi, à l’issue de cette rencontre capitale qui intervient en pleine crise, la presse indienne nous informe que des accords stratégiques ont été signés entre Moscou et New Delhi.
En tout cas, d’après le média indien RepublicWorld.com, l’Inde a formellement autorisé à la Russie à emprunter et investir dans son pays. Toujours selon la même source, la Russie s’est, quant à elle, engagée à accorder à l’Inde une remise de 25 à 30% sur tout achat de son pétrole. Une aubaine que New Delhi ne peut refuser en dépit de la forte pression exercée par la Grande-Bretagne pour briser tout lien entre Modi (président de l’Inde) et Poutine.
En conséquence, l’axe Russie-Chine-Inde est en train de se renforcer, sous nos yeux, dans un contexte de crise géopolitique mondiale, ce qui représente une sérieuse menace à l’Occident qui, dans ses calculs, pensaient pouvoir rapidement intimider la Chine et l’Inde et les éloigner ainsi de Moscou.
La guerre froide a pris fin après la chute du Mur de Berlin. Nous ne sommes certainement pas en train de la revivre. Néanmoins, les événements actuels et leur évolution semblent nous mener tout droit vers une nouvelle guerre froide qui risque, cette fois-ci, de créer un monde beaucoup plus polarisé.
En poursuivant sa stratégie d’intimidation, l’Occident, dirigé par les Etats-Unis, risque de s’embourber. Car, il aura en face non seulement la Chine, la Russie et l’Inde, mais une partie importante de l’Afrique et de l’Amérique Latine. Et ce scénario est le pire qui puisse exister.