Benoît Hamon, candidat malheureux du PS (Parti Socialiste) à la dernière élection présidentielle française, a accordé une interview exclusive au journal Le Monde publiée ce lundi 23 octobre. L’ancien candidat du Parti Socialiste a répondu à plusieurs questions sur l’actualité politique française
Parlant de son mouvement, Benoît Hamon dira : « le défi pour nous est moins de croître que de structurer. Nous grandissons déjà rapidement mais si mille fleurs doivent s’épanouir, elles ne doivent pas faner trop vite. D’où mes déplacements nombreux en province, récemment Nantes, Grenoble et Toulouse. J’en ferai deux à trois par semaine jusqu’à la fin de l’année ».
Benoît Hamon dit avoir été très bien accueilli dans les universités et se vante d’avoir été soutenu par des militants de la France Insoumise. « Oui, Manuel Bompard (dirigeant de la France Insoumise) est venu à Toulouse. Nous l’avons invité, il a joué le jeu et a été abondamment applaudi ».
« Résister, et si possible ensemble »
Au Monde, Hamon dévoile sa stratégie qui repose sur deux pieds. « Résister, et si possible ensemble. Nous devons le faire en posant des actes politiques. Ensuite, en menant une bataille culturelle de gauche pour faire évoluer des cadres conceptuels qui freinent parfois l’adhésion à notre projet ».
L’ex candidat du PS s’explique : « le rapport au travail. Nous proposons qu’à côté du travail, il y ait d’autres formes de reconnaissance du rôle des individus dans la société, par le revenu universel. Comment changer de modèle de développement sans s’intéresser à l’entreprise. Nous croyons nécessaire développer les modèles entrepreneuriaux qui s’intègrent dans la transition écologique et le progrès social (…) ».
« Mélenchon, c’est un homme intelligent, que je respecte »
La question du harcèlement sexuel dont sont victimes de nombreuses femmes a également été abordée. « Le problème, ce sont les violences faites aux femmes, pas le nom de hashtag comme je l’ai lu ici et là. Nous avons beaucoup travaillé sur ce sujet, réfléchi à la manière de prévenir ces comportements en notre sein et créé un fonds de solidarité, à l’intérieur du mouvement, pour accompagner les femmes victimes. Nous prenons cela très au sérieux », explique-t-il.
Interrogé par Le Monde, Benoît Hamon qui avait assisté à la manifestation contre la réforme du code du travail s’est aussi prononcé sur ses relations avec Jean-Luc Mélenchon, chef de file de la France Insoumise. « On se parle de dirigeant politique à dirigeant politique. C’est un homme intelligent, que je respecte. Nos relations sont apaisées, sereines, normales », révèle-t-il.
« Le cycle historique de la social-démocratie à l’européenne s’achève »
Benoît Hamon est revenu sur ses relations avec le PS. A la question de savoir quel regard il porte sur son ancien parti, il répond : « l’appareil du parti pourra survivre. Mais, la social-démocratie, dans le rôle qui était le sien, celui d’une force politique qui organisait le compromis entre le capital et le travail et qui permettait aux travailleurs de bénéficier d’une partie des dividendes de la croissance, ce rôle-là s’est éteint. La loi El Khomri et la CICE (crédit d’impôt compétitivité emploi) illustrent l’extinction de ce courant politique et philosophique ».
A la question de savoir si la social-démocratie à la française est morte, Benoît Hamon rétorque : « le cycle historique de la social-démocratie à l’européenne s’achève. C’est une invitation à repenser le progrès. Il faut construire une nouvelle synthèse politique entre une tradition socialiste, celle de l’écologie politique, une nouvelle approche de la croissance ».
« Nous pensons aussi que la société salariale est en crise »
Et d’ajouter : « je ne crois plus à la fable selon laquelle le chômage se réduira en grandissant le gâteau de la production. Nous pensons aussi que la société salariale est en crise, que le travail continuera à se raréfier sous l’impact de la révolution numérique et qu’il faut donc repenser la place du travail dans nos sociétés. Je pense que sur ce point nos différences avec Jean-Luc Mélenchon sont substantielles ».
Parlant de ses amis qui restent au PS, il dira : « ils restent mes amis. Chacun doit prendre des risques. Je ne suis pas un gourou. Certains veulent attendre le progrès en pariant sur des jours meilleurs à venir. J’ai connu ce supplice de l’espérance…Ce cadre-là n’est pas le bon, même si j’ai un immense respect pour le PS et pour ses militants. Si j’ai décidé de quitter le PS seul, c’est que je n’aurais eu aucune crédibilité si j’avais eu un pied dedans, un pied dehors. Je n’étais pas dans une démarche de fraction ».
« Nous croyons nécessaire de proposer une stratégie européenne transnationale »
Sur la question de l’Europe, Hamon n’a pas hésité à tacler Emmanuel Macron. « Aujourd’hui, il y a ceux qui disent comme Emmanuel Macron, ‘Vive l’Europe !’, mais sans faire de politique. En s’alignant sur l’austérité et en continuant le libre-échange qui a asséché l’Europe du Sud. Il y a aussi chez certains cette tentation de faire de la politique sans l’Europe. C’est le discours très critique à gauche qui juge que c’est l’Europe qui est devenue le problème, pas le néolibéralisme en son sein et qu’il n’y aurait plus de solution européenne ».
Benoît Hamon dit être attentif aux propositions de Yanis Varoufakis, ex ministre grec des Finances. « (…) je suis attentif aux propositions formulées par Yanis Varoufakis, avec qui j’ai dîné à Paris il y a quelques jours. Nous croyons nécessaire de proposer une stratégie européenne transnationale, anti-austéritaire et progressiste, avec un agenda politique commun aux Européens. J’ai envie de relever ce défi ».
Pour lire l’interview, cliquez ici : Le Monde