(Une analyse de Maceo Ouitona, spécialiste de l’Iran)
Dans quelques jours, le régime des mollahs va commémorer les 40 ans de son existence. Quarante années parsemées de violences, de violations, d’actes terroristes, ou encore de dilapidation des ressources de la nation dans l’ingérence dans les affaires des pays voisins. Quarante années d’oppression et de répression de toute forme d’opposition et de résistance, sous la houlette des Guides Suprêmes.
Si à l’époque du Shah, l’Iran était sous l’emprise d’une dictature despotique, sous les mollahs, la dictature se veut théocratique, élevant le Guide Suprême au rang de demiurge. Mais aujourd’hui, après 40 ans d’atrocité, le régime est de plus en plus secoué à l’intérieur du pays et isolé sur le plan international.
Un régime ébranlé par les soulèvements à l’intérieur du pays
Depuis décembre 2017, l’Iran est secoué dans son ensemble (plus de 170 villes selon les autorités) par de nombreuses grèves et manifestations populaires qui ébranlent les fondements même du régime. Que ce soit à Téhéran, à Machhad, à Tarbriz, à Kazerun ou encore à Ispahan, le peuple iranien s’est d’abord insurgé contre la vie chère, scandant des slogans tels que « Non à la cherté de la vie ». Mais très vite, les manifestations et soulèvements ont pris une allure politique, le peuple exigeant un changement de régime.
Des ouvriers, des étudiants, des retraités, des conducteurs de camions, des bazaaris, des jeunes et des femmes, ceux-là qui constituent le véritable peuple iranien, ont alors investi la rue avec des slogans tels que « A bas Khamenei ! », « A bas Rohani ! », « Quittez la Syrie, pensez à nous ! ». Face à ces mouvements insurrectionnels croissants, la machine répressive du régime, constituée des Gardiens de la révolution (pasdaran) et d’autres forces militaires, à l’instar des milices du Bassidj, est entrée en marche, réprimant violemment les manifestations, et révélant par la même occasion, l’incapacité du régime à satisfaire les revendications d’un peuple appauvri qui a soif de justice, de liberté et de droits humains.
Le soulèvement fut réprimé en janvier mais les mouvements de protestations et les grèves se sont éternisés. Amnesty International a révélé, le 24 janvier 2019, que plus de 7 000 manifestants parmi lesquels on retrouve des travailleurs, des écologistes, des défenseurs des droits des minorités, des étudiants, des syndicalistes, des avocats, ont été arrêtés. Des centaines d’autres ont été condamnés à des peines d’emprisonnement ou de flagellation.
Selon l’opposition une cinquantaine de morts des suites de la répression, dont une quinzaine morte dans des conditions encore non élucidées pendant qu’ils étaient en détention.
Pourtant, ces vagues de répression ne sont pas suffisantes pour contenir la rage d’un peuple qui a déjà connu le massacre par les mollahs en 1988, de 30 000 de ses compatriotes, et qui n’exige plus que le renversement de la théocratie au pouvoir en Iran.
Pourquoi les habitants de la riche Perse vivent-ils dans la précarité ?
Il convient de rappeler que l’Iran, anciennement appelé la Perse, est un pays pétri de richesses et de ressources. Malheureusement, toute cette richesse est dilapidée dans la course aux armes de destruction massive et de missiles balistiques ; dans le financement de la guerre par procuration en Syrie, au Yémen, en Irak, au Liban et en Afghanistan ; dans le financement de groupes terroristes comme le Hezbollah libanais ou encore dans la répression intérieure avec des milliards de dollars engloutis par les Gardiens de la révolution (pasdaran).
Selon l’examen conduit par la Résistance iranienne et les experts internationaux, les mollahs, sous la conduite du Guide Suprême, Ali Khamenei, « ont dépensé près de 15 à 20 milliards de dollars par an en Syrie depuis ces six dernières années. La belligérance du régime et l’intervention meurtrière ont coûté aux Iraniens rien qu’en Syrie au moins 100 milliards de dollars entre le début de la guerre et fin 2017 ». Et chaque année, ce sont entre 20 et 30 milliards de dollars que le régime iranien investit dans son projet d’armes nucléaires, pendant que la population manque du strict nécessaire. En 2017 par exemple, 22% du budget total de l’Iran ont été alloués aux dépenses militaires du régime ainsi qu’à l’exportation du terrorisme.
Plus loin, en 2015, suite à la signature de l’accord nucléaire, une énorme manne financière (plusieurs dizaines de milliards de dollars) a été injectée en Iran, mais une fois de plus, les ambitions bellicistes du régime ont pris le pas sur l’intérêt supérieur de la nation. Le détournement, la corruption, le contrôle de toute la structure économique du pays par les pasdaran sont les seules partages du peuple iranien écrasé sous la domination du Guide Suprême.
Voilà autant d’éléments qui amplifient la colère et le mécontentement de la population iranienne contre le pouvoir en place, dont elle n’exige que le renversement.
Y a-t-il une alternative crédible au régime ?
Avec la chute de la dictature du Chah en 1979 et la montée au pouvoir de l’Ayatollah Khomeiny longtemps resté en exil en France, on a assisté dans les mois qui ont suivi, à une radicalisation du pouvoir. Le régime déchu a fait place à un régime encore pire : une théocratie islamiste extrémiste où les droits des femmes et des minorités ethniques et religieuses sont totalement bafoués et violés, et où la répression de toute forme d’opposition est prônée. Face à ce régime totalitaire et néo-fasciste, une Résistance forte s’est constituée et s’est consolidée au fil des ans.
Maryam Radjavi, présidente élue du Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI), est la figure de proue de cette Résistance qui milite depuis près de 40 ans pour la liberté et la démocratie aux côtés des minorités ethniques, des femmes et des couches défavorisées. Elle jouit d’une grande notoriété non seulement à l’intérieur de l’Iran, mais également auprès de la communauté internationale. Le CNRI qui a comme organisation axiale celle des Moudjahidine du peuple d’Iran (OMPI) est une coalition qui prône une république pluralistes et laïque,
La Résistance iranienne a d’ailleurs joué un rôle clé dans les manifestions qui sévissent en Iran depuis plus d’un an, à travers ses unités de résistance disséminées dans toutes les régions du pays. Les mollahs, qui ont pendant longtemps, nié le rôle de cette résistance, ont eux-mêmes admis la responsabilité prépondérante de l’OMPI / MeK dans la crise actuelle de l’Iran. C’est d’ailleurs cette menace que représentent le CNRI et l’OMPI pour les mollahs, qui justifie les nombreux attentats qui les visent aussi bien en Europe, qu’aux États-Unis. En juin 2018, un attentat terroriste contre le Rassemblement annuel de la Résistance à Villepinte au nord de Paris a été démantelé et les auteurs arrêtés, dont un diplomates du régime en poste à Vienne.
Si en 1979, le Chah a été destitué grâce à la Révolution du peuple iranien, aujourd’hui, la situation qui prévaut en Iran est assez explosive et on peut enfin apercevoir les pieds d’argile du colosse d’antan. Les mollahs se retrouvent 40 ans après dans la même situation que leur prédécesseur.
Une marche à Paris le 8 février
Pour protester contre les quarante années du règne macabre des mollahs en Iran, le Comité français pour un Iran démocratique (CFID) organise le 8 février prochain à Paris, une grande marche de la Place Denfert-Rochereau jusqu’au musée des Invalides.
Cette grande manifestation est née de la volonté de plusieurs autres associations et mouvements iraniens et français comme le Comité de soutien aux droits de l’Homme en Iran, les Nouveaux Droits de l’Homme, le fondation Danielle Mitterrand, de mettre un terme aux violations des droits de la personne humaine en Iran, et d’instaurer la liberté, la justice et la démocratie dans le pays. Elle est soutenue par plusieurs maires d’arrondissement de Paris et d’Ile de France.