Une nouvelle qui a fait l’effet d’une bombe. Quelques heures après la réconciliation trompe-l’œil entre Abdoulaye Wade, ancien président du Sénégal et son successeur, Macky Sall, qui a fait la une de la presse sénégalaise, le pays entier a été pris de court ce dimanche 29 septembre en apprenant la libération de Khalifa Sall, l’un des plus redoutables rivaux de Macky Sall.
L’opinion publique sénégalaise n’a pas été la seule à avoir été cueillie à froid. Khalifa Sall aussi. Car, dans la presse, on a pu révéler que l’ex maire de Dakar ne s’attendait absolument pas à cette nouvelle et n’avait jamais demandé à être gracié, d’où d’ailleurs son refus catégorique, dans un premier temps, d’abandonner sa cellule de prison.
Ce qui s’est produit ce 29 septembre restera à jamais gravé dans la mémoire collective et nous plonge dans la triste réalité de notre pays. Je rappelle que Khalifa Sall a été condamné en 2018 à 5 ans de prison assortie d’une amende pénale de 5 millions de FCFA pour avoir, selon l’accusation, détourné 1,8 milliards de FCFA pendant qu’il était maire de Dakar, la capitale.
Dans un contexte de guerre sans merci contre l’ex maire de Dakar dont le capital sympathie allait grandissant, le gouvernement sénégalais avait pris le 31 août 2018 la décision de le révoquer de sa fonction de maire. L’objectif était carrément politique. Il fallait en effet nuire à un potentiel concurrent, lui priver de toutes ses chances de participer à la présidentielle de février 2019.
Ce qui est inquiétant dans cette affaire est de voir à quel point notre justice est manipulée par un groupuscule de personnages politiques tapis dans l’ombre qui, agissant en parfaite connivence avec la justice, peuvent désormais décider de qui doit rester en prison, qui doit bénéficier d’une grâce présidentielle et qui doit être la prochaine victime sur la liste.
L’histoire se répète malheureusement. Je tiens à rappeler que Karim Wade, fils d’Abdoulaye Wade, a aussi été gracié mais prié de quitter le pays pour le Qatar. Il fallait, pour l’Etat, s’assurer que le fils de l’ex président sénégalais n’allait pas représenter une menace à Macky Sall qui ne rêvait que de son second mandat. Pour le moment, Khalifa Sall est gracié à son corps défendant. Reste à voir si, à l’instar de Karim Wade, il sera lui-aussi contraint de plier bagages et de quitter le pays.
Ces grâces présidentielles accordées à des opposants politiques sont un foutage de gueule. Disons-le ainsi. Si Khalifa Sall est accusé d’avoir détourné des deniers publics, alors qu’il paie. L’argent ne lui appartient pas, mais appartient au peuple sénégalais qui peine à joindre les deux bouts.
Je tiens à rappeler que pendant ce temps, Aliou Sall, frère du président sénégalais, se pavane librement dans les rues de la capitale sans être inquiété par la justice après avoir pourtant été impliqué dans une grave affaire de transactions pétrolières dont les preuves, fournies par la chaîne BBC, sont jusqu’ici irréfutables.
Il ne s’agit pas ici de « décrispation », comme l’a souligné El Hamidou Kassé. Il s’agit de rendre justice. Le Sénégal ne peut plus admettre que sa justice soit piétinée de cette façon et que des hommes politiques, parce qu’ils refusent de se soumettre à un président omnipuissant, deviennent des proies faciles. Il est temps de siffler la fin de la récréation. Ceci ne peut plus continuer.