(Par Kareem Salem, étudiant en relations internationales)
Depuis son arrivée à la Maison-Blanche, le président américain Donald Trump s’est vanté de pouvoir résoudre le conflit israélo-palestinien. Président Trump estime qu’il serait en mesure de faire ce qu’aucun de ses prédécesseurs n’a fait, à savoir conclure ce qu’il a désigné comme « l’accord ultime », qui mettrait fin au conflit israélo-palestinien.
Avant l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, la Maison-Blanche a toujours voulu jouer le rôle de médiateur entre les délégations israéliennes et palestiniennes, tout en restant le principal soutien d’Israël (Louison 2019). Ce rôle était notable durant le mandat présidentiel de Bill Clinton, où l’ancien président américain avait réuni l’ancien président palestinien Yasser Arafat et l’ancien Premier ministre israélien Ehud Barak à la résidence présidentielle américaine de Camp David en 2000 pour deux semaines de pourparlers infructueux sur les épineux dossiers dits de « statut permanent » du conflit israélo-palestinien (Al-Husseini et Bocco 2008).
Le plan de paix du président Trump est bien contraire de la politique menée par ses prédécesseurs. En effet, le plan de paix était entièrement préparé par Washington, dans lequel les Palestiniens n’ont pas été consultés. Il convient donc de se demander si ce plan de paix est voué à l’échec.
Des propositions économiques avancées à Manama 2019.
La conférence de Manama, voulait mettre en valeur les bienfaits économiques d’une paix à trouver entre Israéliens et Palestiniens. Jared Kushner, le gendre du président Trump, avait dévoilé devant des personnes issues des institutions financières internationales et des fonctionnaires des pays arabes, un plan exclusivement économique visant à revitaliser une économie palestinienne en crise chronique.
Pour multiplier le produit intérieur brut (PIB) des territoires palestiniens, Jared Kushner avait informé que Washington ambitionne d’investir en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, la somme de 28 milliards de dollars sur 10 ans. De plus, un corridor de 5 milliards de dollars est prévu pour relier la Cisjordanie et Gaza (Al Jazeera 2019). Au total, 179 projets locaux financés par un « fonds directeur » couvriraient des domaines allant de l’eau et de l’agriculture à l’éducation et aux soins de santé. Il est espéré que ces investissements permettront de créer un million d’emplois et de réduire le taux de chômage dans les territoires palestiniens à presque un chiffre ainsi que de réduire le taux de pauvreté de 50 pour cent (Al Jazeera 2019).
Des propositions économiques ne suffiront pas à résoudre le conflit israélo-palestinien
Le plan de paix de l’administration Trump dévoilé sur les marches de l’hôtel Four Seasons de Manama, ignore les solutions politiques quant aux violations des droits des Palestiniens commises par Israël dans les territoires palestiniens. Washington propose de mettre en place un couloir de transport reliant directement la Cisjordanie à Gaza par une route principale, et éventuellement par une ligne de chemin de fer moderne. Or le gouvernement de Nétanyahou continue de maintenir aux deux millions de Palestiniens de Gaza une interdiction de voyager qui les empêche presque tous de se rendre en Cisjordanie (Shakir 2019). Par conséquent tout investissement visant à renforcer la liberté de mouvement des Gazaouites est voué à l’échec tant que des restrictions restent en place sur leur liberté de circulation.
De même, le plan ignore de mentionner l’exploitation illégale par Israël de ressources naturelles en Cisjordanie, alors que les résidents palestiniens sont soumis à de sévères restrictions sur la manière dont ils peuvent eux-mêmes utiliser ces ressources. En 2013, la Banque mondiale avait estimé que les restrictions discriminatoires imposées par Israël dans la zone C de la Cisjordanie (zone C sous contrôle total d’Israël pour la sécurité et l’administration), coûtaient 3,4 milliards de dollars par an à l’économie palestinienne (Banque mondiale 2013). Piotr Smolar (2019) avait fait une enquête sur le contrôle de l’eau par l’armée israélienne dans la zone C de la Cisjordanie et avait souligné que le 13 février dernier l’armée israélienne avait coupé les canalisations ainsi qu’arracher des centaines de mètres de tuyaux qui approvisionnaient douze hameaux, depuis septembre 2018. La IVe Convention de Genève énumère les devoirs qui incombent à toute puissance occupante, et notamment l’obligation d’assurer l’approvisionnement, la santé et l’hygiène publiques dans le territoire occupé.
Représentation Arabe a minima
Les alliés arabes des États-Unis à la conférence de Manama étaient pour la plupart représentés par des fonctionnaires de deuxième ou de troisième rang. En effet le Maroc, le Qatar et la Jordanie ont mobilisé un fonctionnaire de troisième rang, alors que les Émirats arabes unis avaient envoyé le numéro deux de leur ministère des finances (Barthe 2019). Le roi Salman d’Arabie saoudite ainsi que le prince héritier Mohammed ben Salmane n’avaient pas fait le déplacement.
Les principaux alliés de Washington, Riyad et Abou Dhabi dans le monde arabe ne sont pas à l’aise avec le plan proposé par les Américains puisque la question d’un État palestinien n’a pas été soulevée. En effet, les principaux alliés de Washington ont des réserves concernant la volonté du Premier ministre Nétanyahou d’annexer les colonies juives de Cisjordanie (AFP 2019 ; Tresca 2019).
Enfin, la classe politique palestinienne a boycotté la conférence de Manama. Or, pour établir la paix entre Israël et la Palestine, les questions dites de « statut permanent » du conflit israélo-palestinien auraient dû être évoquées. En effet, il y a actuellement plus de 5,2 millions de réfugiés palestiniens enregistrés en vertu de l’UNRWA (Amnesty International 2019).