A un an de la fin de son premier mandat (et peut-être le dernier), le plus jeune président de la Vème République se donne des airs de sauveur des Etats africains, très affaiblis par la crise sanitaire qui n’épargne pas les plus grandes puissances économiques du monde dont la France.
Sur le plan national, Emmanuel Macron fait face à une crise sociale sans précédent, marquée ces dernières semaines par la hausse de l’insécurité. Sur le plan économique, la situation n’est guère mieux. Le coût du Covid-19 est évalué à 424 milliards d’euros, le coût du reconfinement est estimé à 1,2 milliards d’euros et le coût de la vaccination à près de 3 milliards d’euros.
Pendant ce temps, les caisses de l’Etat français s’assèchent, poussant le pays à s’endetter massivement sur le marché international. Et si à cela, on ajoute les contentieux fiscaux qui ont coûté à l’Etat près de 6 milliards d’euros, comme l’a révélé ce 16 mai le média français Boursorama, la note devient très vite assez salée. Mais, pour le président français qui joue sa réélection, les priorités sont ailleurs. En Afrique, plus précisément.
En effet, il n’a échappé à personne que Paris a abrité ce 17 mai (et ce 18 aussi) un sommet international sur les économies africaines. Dans la presse, on nous apprend ceci : « le Sommet, qui se tiendra jusqu’au 18 mai, réunira des responsables européens ainsi que les représentants de grandes organisations internationales, comme le FMI ou la Banque Mondiale au sujet du financement des économies d’Afrique subsaharienne. Lundi 17 mai, une conférence sera consacrée à la dette du Soudan. ».
Justement, parlons du Soudan. Ce pays, qui a récemment normalisé ses relations diplomatiques avec l’Etat d’Israël et dont la situation économique est l’une des plus catastrophiques sur le continent africain, vient de bénéficier d’un prêt-relais estimé à 1,5 milliards de dollars de la part de la France, pays très endetté aussi et durement touché par la crise sanitaire. Et ce n’est pas tout. La France va annuler sa créance de dette de près de 5 milliards de dollars vis-à-vis à ce même pays
Détail très intéressant à souligner : peu après l’annonce de cette nouvelle, les réseaux sociaux se sont enflammés et les questions ont été légion. « Mais, d’où Macron sort-il cet argent alors que le pays est en crise? » Telle a été l’une des nombreuses questions posées par les Français qui sont tombés des nues.
Et ils ont bin raison de s’interroger surtout si l’on se focalise sur les propos tenus par des membres du gouvernement Macron au tout début de la crise. En effet, en avril 2020, lors de son passage sur la chaîne France Inter, Gérald Darmanin, à l’époque ministre des Comptes Publics, disait ceci sur le plafond de la dette (contractée par la France) : « non, il n’y a pas de plafond. On ne sait pas, le président de la République ne nous a pas fixé de plafond. Aujourd’hui, la France continue à emprunter dans des conditions satisfaisantes, si vous me permettez cette expression avec des taux bas et arrive à avoir le financement qu’elle propose aux marchés. (…) On a préféré l’endettement à la faillite, on a préféré ça que le licenciement de masse et des faillites parce que ça nous coûterait plus cher le jour où la reprise économique sera là « .
En mars 2021, le média Ouest France révèle qu’en 2020, la France a emprunté 314 milliards d’euros. C’est énorme. Et ce n’est pas fini. La situation économique de la France est d’autant plus critique que le pays a une dette publique estimée à 2 674 milliards d’euros, soit 116,4% du PIB, d’après plusieurs sources, dont France Transactions qui cite l’INSEE.
La crise financière est donc bien là (en France) et la réalité actuelle nous dit que la priorité n’est point le Soudan en ce moment mais plutôt la France, à moins que Macron ait des intérêts géopolitiques à préserver au Soudan, ce qui est tout à fait possible d’ailleurs compte tenu des immenses réserves de ce pays en pétrole. En effet, le Soudan détiendrait environ 9 milliards de barils de pétrole et cette manne attise les rivalités entre puissances.
Quoi qu’il en soit, ce sommet international sur les économies africaines, organisé en pleine crise financière, intrigue plus d’un, d’autant plus le pays qui l’organise est lui-aussi fauché par une crise sans précédent qui fait planer le risque d’une éventuelle révolte sociale lorsque les vraies conséquences de cette crise seront senties par les citoyens.
Que cherche Emmanuel Macron, alors? Cherche-t-il à se positionner en tant que messie des Etats africains? ou cherche-t-il à consolider la FrançAfrique dont on nous disait qu’elle était morte et enterrée? ou bien, cherche-t-il à gagner en dehors de la France ce qu’il a perdu dans ce pays?
Je tiens à souligner que la dette du Soudan est estimée à 60 milliards de dollars et que la somme de 1,5 milliards de dollars débloquée par Macron est très loin de sortir ce pays de l’ornière. A partir de là, il est donc clair que le plus jeune président de la Vème République est dans une opération com’ à une année d’une présidentielle cruciale. Sauf que sur ce coup-là, l’opération s’avère être un fiasco total.
Sacré Manu!