(Une analyse du journaliste Cheikh DIENG)
La prochaine guerre civile que nous prépare l’Occident en Libye est déjà en cours. Cette fois-ci, comme en 2011, après la chute de Mouammar Kadhafi, elle nous sera imposée par des puissances étrangères occidentales qui, après avoir coupé la Libye en deux, veulent désormais mettre la main sur les richesses naturelles d’un pays très riche en pétrole.
Si vous suivez l’actualité, vous devez surement être au courant de ce qui se joue en Libye en ce moment. L’Occident nous avait promis une Libye libre, démocratique et prospère après Kadhafi. Il n’en est rien. Ce pays est devenu une poudrière où des milices islamistes règnent en maîtres et imposent leurs lois.
En Libye, s’affrontent deux gouvernements. Un dirigé par Fayez Al-Sirraj, premier ministre dont le gouvernement est reconnu par les Nations-Unies, mais pas la France, les Etats-Unis, ni l’Egypte, encore moins les Emirats Arabes Unis. D’ailleurs, rien que cela, on sent une arnaque. Donc, nous avons un gouvernement reconnu par l’ONU, mais pas par des pays membres de l’ONU. Quelle mascarade !
En ce moment, il y a une menace très sérieuse qui pèse sur le gouvernement de Tripoli. Fayez al-Sarraj ne bénéficie que du soutien de l’ONU et rien d’autres. Et face à lui, il y a un homme redoutable du nom de Khalifa Haftar (âgé de 75ans), chef du gouvernement de Tobrouk, à l’Est du pays.
Il serait bien dans cet édito de revenir sur ce seigneur de guerre connu des services de renseignement américains et qui promet de marcher sur la capitale, Tripoli, située à l’Ouest du pays. Depuis Tobrouk, Khalifa Haftar mène une véritable attaque pour prendre le contrôle des zones portuaires telles que Benghazi et Ras Lanufa et des gisements de pétrole. Haftar ne cache plus sa volonté. Il veut aussi renverser le gouvernement de Sirraj et prendre le contrôle de Tripoli.
La question qu’on devrait se poser est la suivante : qui est Khalifa Haftar ? Et pourquoi veut-il prendre le contrôle de tout le pays au risque de déclencher une guerre civile ? Si Haftar a le courage de marcher sur Tripoli pour renverser un gouvernement reconnu par l’ONU, c’est qu’il a obtenu le soutien de puissances étrangères. Oui, il est le chouchou de la France, des Etats-Unis, des Emirats Arabes Unis et de l’Egypte.
Khalifa Haftar est un général de l’Armée libyenne sous Mouammar Kadhafi. Il avait fui le pays vers la fin des années 80 pour se réfugier aux Etats-Unis, dans la ville de Virginie plus précisément. En 2011, alors que la France préparait la chute de Kadhafi, il revient en Libye où il a réuni un important soutien, dont des hommes d’affaires.
En 2014, il s’allia au gouvernement de Tobrouk et lança la fameuse « Opération Dignité » afin, selon lui, de combattre les milices terroristes qui sévissent en Libye. Haftar n’est pas un simple général de l’armée. C’est un stratège qui avait aidé Kadhafi à renverser l’ex roi de la Libye (le roi Idriss) en 1969.
Avant son exil vers les Etats-Unis, il a été capturé au Tchad et emprisonné pendant vingt-ans. Une fois aux Etats-Unis, Khalifa Haftar n’a pas chômé. Il a travaillé avec la CIA, la plus importante agence de renseignement au monde. D’ailleurs, son apport a été très important pour faire tomber Kadhaffi en 2011, dit-on.
Pour atteindre son objectif, Haftar adopte une stratégie très subtile : éliminer la menace terroriste qui plane sur la Libye mais aussi sur la région. Une stratégie qui a trouvé un preneur : l’Occident. En effet, d’après le New York Times, la France a fourni du matériel à Haftar pour défaire les milices terroristes mais aussi juguler la vague migratoire. Et la Russie l’a aidé à imprimer une devise afin de restaurer la liquidité économique dans certaines régions du pays.
Mais, la question que je me pose est celle-ci : la France soutient-elle Haftar avec l’unique but de l’aider à défaire les milices armées ? Je ne le pense pas. En creusant un peu plus, j’ai pu trouver autre chose. En effet, ce samedi, le gouvernement Sirraj, reconnu par l’ONU, a rappelé l’ambassadrice de France (Béatrice de Hellen) à Tripoli.
Le gouvernement libyen accuse la France d’avoir donné le feu vert à Haftar pour prendre le contrôle de la capitale et ensuite offrir à celle-ci (la France) d’importants contrats pétroliers. Cette information est passée inaperçue dans la presse française. Même si des preuves n’ont pas été fournies par le gouvernement libyen de Tripoli, les liens entre la France et Haftar sont irréfutables.
L’autre détail troublant est l’attitude du gouvernement américain. J’ai en effet trouvé très louche que les Etats-Unis aient retiré leurs troupes (AFRICOM) de la Libye ce dimanche. Est-ce logique qu’une force américaine déployée en Libye pour soutenir le gouvernement se retire du pays au moment où le gouvernement a le plus besoin d’aide militaire ? Il y a anguille sous roche.
Pour le moment, le gouvernement libyen de Tripoli, de plus en plus isolé, tente de sauver l’honneur et promet de livrer bataille jusqu’à la dernière minute. Ce qu’il n’a pas compris (ou ce qu’il feint de n’avoir pas compris) est que les dés sont déjà jetés et que Haftar prendra à coup sûr le contrôle du pays.
Pendant ce temps, nous allons devoir, malheureusement, assister à une nouvelle guerre civile meurtrière et à une nouvelle crise migratoire parfaitement orchestrées par l’Occident (la France et les Etats-Unis) pour un seul et unique objectif : le pétrole.