Emmanuel Macron est décidément un fin stratège. Le président français a finalement trouvé une excellente manière de s’adresser au peuple français sans mentionner les sujets qui fâchent, en jouant jusqu’au bout sur l’émotion qui a gagné le peuple après l’incendie qui a frappé Notre-Dame le 15 avril au soir.
J’avais fait un édito le lundi 15 avril au matin dans lequel j’affirmais que Macron jouait sa survie politique. En effet, les Français-e-s l’attendaient sur des sujets aussi importants que les impôts, les pensions, les salaires, la taxe carbone, le chômage, l’immigration…Un discours extrêmement crucial de Macron qui devait nous donner une idée sur son avenir politique.
Le président de la France a enfumé le peuple ce mardi soir par un tour de passe-passe auquel personne ne s’attendait d’ailleurs. Il a en effet joué sur la fibre émotionnelle d’un peuple meurtri afin de noyer le poisson. Ce mardi soir, Macron a certes parlé. Mais, en réalité, il n’a rien dit. Et Pire, il a tenté de jouer sa réélection dans la reconstruction de la cathédrale Notre-Dame.
« (…) Je vous le dis ce soir avec force : nous sommes ce peuple de bâtisseurs. Nous avons tant à reconstruire. Alors oui, nous rebâtirons la cathédrale Notre-Dame, plus belle encore. Et je veux que cela soit achevé d’ici cinq années. Nous le pouvons et là aussi, nous mobiliserons », a déclaré le chef de l’Etat dans son allocution de ce mardi 16 avril.
Dans son discours de ce mardi, Macron a agi comme un psychologue. Il a évidemment compris ce qu’est le peuple français : un peuple émotif qui cesse d’être lui-même lorsqu’il est touché dans sa chair. Toucher à un symbole cultuel, culturel ou religieux de la France suffit à plonger tout un peuple dans une vive émotion. Macron a effectivement compris cela et n’a pas hésité à jouer sur la fibre de l’émotion pour reprendre en main une situation qui lui avait échappé.
La question est la suivante : est-il possible de reconstruire Notre-Dame en 5 ans ? Il n’y a que Macron qui y croit. Pour les architectes, c’est impossible. Interrogé par Sud Ouest, Francis Maude, directeur du cabinet d’architectes Donald Install Associates, estime que le véritable défi est celui de trouver suffisamment « d’artisans capables de travailler le bois, le plomb, le verre », ce qui loin d’être le cas. La reconstruction de Notre-Dame prendra beaucoup plus que cinq ans.
En fin stratège, Macron, sachant que le peuple français est meurtri par l’incendie de Notre-Dame, a profité de l’occasion pour se réconcilier avec la France, en promettant cinq ans pour reconstruction un symbole historique de ce pays. En fait, ce qu’il faut comprendre est que la seule chose qui compte pour Macron est la réélection.
Ce que je trouve inquiétant dans cette histoire est que son discours, annulé en raison de l’incendie Notre-Dame, est déjà fuité par la presse. La presse nous a en effet appris que Macron souhaite la réindexation des retraites de moins de 2 000 euros sur l’inflation à partir du 1er janvier 2020. On nous apprend aussi que le chef de l’Etat avait, dans ce discours, manifesté sa volonté de supprimer l’ENA (Ecole Nationale d’Administration). Macron s’est aussi dit favorable au RIC mais seulement au niveau local.
La fuite du discours d’Emmanuel Macron dans la presse (une fuite voulue par l’Elysée) est la preuve que le président de la République cherche par tous les moyens possibles à éviter de rendre des comptes au peuple car craignant ainsi d’envenimer une crise déjà délétère et explosive.
Macron a promis un discours dans les jours qui viennent. Mais, pour dire quoi en fait ? Il a joué sur l’émotion et les sentiments des Français-e-s pour poser la question de sa réélection sur la table. « Nous rebâtirons Notre-Dame d’ici cinq ans » revient à dire tout simplement : « offrez-moi une seconde chance »