Une analyse du média américain très libéral The Economist qui encourage Macron à aller au bout de sa réforme des retraites malgré les contestations syndicales
Très bonne lecture
« Pour les vacanciers, les rues de Paris semblent si vides ces derniers jours qu’ils peuvent parcourir toute la capitale à pied. En effet, la capitale française est calme parce que les grévistes ont quasiment disparu. Peu de RER circulent et les métros ne fonctionnent que durant les heures de pointe, sauf pour les deux lignes automatiques 1 et 14. Les banlieusards restent chez eux, les acheteurs aussi.
Un mouvement de grève de la part des employés du transport public entre dans son second mois. Désormais, cette grève a duré plus longtemps que celle de 1995 contre la réforme des retraites proposée à l’époque par le premier ministre, Alain Juppé. Au moment où les vacances se terminent et que les parisiens veulent vraiment retourner au travail, les grévistes se frottent les mains espérant que Macron va céder, comme l’avaient fait ses prédécesseurs. Cela ne devrait pas être le cas.
Ces grèves visent le troisième et le quatrième élément de l’ambitieux projet de réforme du pays par Macron. Le premier élément a été la réforme du marché du travail. Cette réforme avait aussi suscité une série de grèves mais elles ont très vite pris fin. Le second élément a été la réforme du système éducatif et de la formation professionnelle. Elle avait suscité moins de polémique et très peu d’opposition. Ces deux changements mettront la France dans la bonne direction.
Les réformes du marche du travail ont mis fin aux rémunérations exagérées auxquelles avaient droit les employés licenciés de manière injuste, ont facilité le licenciement des employés dont on n’avait plus besoin et la création de nouvelles entreprises. Elles semblent porter leurs fruits avec la hausse de l’emploi et de la création de nouvelles entreprises. Il faudra cependant du temps pour que la réforme de l’éducation porte ses fruits. Le troisième élément est la réforme des retraites et elle est, de loin, la plus épineuse.
Il est évident que les gens ne sont pas heureux. Ils voulaient obtenir une retraite généreuse, avant de se rendre compte que Macron a pour projet de réduire ces retraites. Ce qui fait qu’ils s’y opposent. Mais, le système actuel est insoutenable. Les employés veulent prendre leurs retraites à l’âge de 62 ans et vivre 20 ans encore. Les plus privilégiés, par exemple ceux de la SNCF, prendront leurs retraites à l’âge de 50 ans en touchant les deux tiers de leurs salaires.
Le système, composé de 42 régimes spéciaux, est extrêmement complexe. Tous ces régimes sont gérés par l’Etat et les pensions privées sont assez rares. Le coût des retraites représentent 14% du PIB, soit le double de la moyenne de la zone euro. Et le fardeau ne fera qu’augmenter avec le vieillissement de la population.
Les changements de Macron sont très simples et justes. Les employés pourront en effet toujours partir à la retraite à l’âge de 62 ans. La proposition actuelle est que pour obtenir tous leurs avantages, ils doivent bosser deux ans de plus. Cette réforme ne concernera pas les employés nés avant 1975. Les réformes pourraient unifier les 42 régimes. Ceci porterait préjudice aux privilégiés. Ces nouvelles règles ne permettront pas d’épargner de l’argent à court terme.
Les syndicats français n’y voient qu’une diminution de leurs avantages. C’est pour cette raison qu’ils ont tous manifesté contre cette réforme en fermant les écoles et en bloquant les transports. C’est aussi pour cette raison que de grandes manifestations secouent la capitale. D’ailleurs, une grande partie des Français soutiennent toujours les grévistes.
Cependant, Macron devrait tenir tête aux grévistes et mener son programme à terme. Ses réformes de la retraites sont justes : il n’y aucune raison que les jeunes contribuables payent pour leurs ainés qui sont plus riches. Elles sont nécessaires car ces retraites anticipées rendent en effet la France plus pauvre qu’elle ne devrait l’être et fragilisent ses finances publiques. Et elles sont démocratiques car les idées de Macron ont clairement été exposées dans son programme de campagne.
L’idée que les gens puissent déterminer la politique à suivre depuis la rue pouvait se justifier sous Louis 16, mais là on est à 231 ans de la Révolution Française. Intimider des gouvernements faibles à travers des manifestations de masse, des blocages économiques et en ayant recours à la violence est une tradition nationale qui a duré plus longtemps en France que dans d’autres démocraties européennes. Monsieur Macron ne devrait pas être intimidé ».
Cette analyse a été rédigée par la rédaction du journal The Economist. Elle a été intégralement traduite de l’anglais au français par Cheikh DIENG, rédacteur en chef et fondateur du site d’information www.lecourrier-du-soir.com
Pour lire l’article dans sa version originale, cliquez ici : The Economist