Le Mali déclare une guerre médiatique sans précédent à la France. En effet, les populations d’Afrique subsaharienne et une partie de la France ont été pris de court ce 18 mars après avoir appris dans la presse l’annonce du gouvernement malien (dans un communiqué) de suspendre les chaînes France 24 et RFI.
Le communiqué émanant du gouvernement malien porte la signature du Colonel Abdoulaye Maïga, ministre de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation, porte-parole du gouvernement. Mais, que reproche-t-il réellement aux médias français émettant dans ce pays?
A cette question, la junte malienne a une réponse. En tout cas, dans le communiqué consulté par Lecourrier-du-soir.com, le gouvernement malien accuse les deux médias français, très influents dans le pays et dans la sous-région, de propager des fausses informations concernant de supposées exactions commises par l’armée régulière du Mali.
« En considérant la synchronisation de ce matraquage médiatique, le gouvernement en déduit une stratégie savamment préméditée visant à déstabiliser la transition, démoraliser le peuple malien et discréditer les vaillants FAMA (forces armées maliennes, ndlr). Pire, certains allégations, en particulier annoncées par RFI, n’ont d’autre objectifs que de semer la haine en ethnicisant l’insécurité au Mali et dévoilent l’intention criminelle de journalistes dont certains n’ont pas séjourné au Mali, il y’a plus d’un an », peut-on lire.
Dépité, l’Etat malien a donc décidé de punir les deux chaînes françaises. « Par conséquent, le gouvernement de la République du Mali
1 rejette catégoriquement ces fausses allégations contre les vaillants FAMA
2 engagé une procédure conformément aux lois et règlements en vigueur au Mali, pour suspendre jusqu’à nouvel ordre, la diffusion de RFI en ondes courtes et FM et de la télévision France 24 ainsi que toutes leurs plateforme digitales sur toute l’étendue du territoire national », précise le communiqué.
En France, la décision de la junte malienne n’est pas passée inaperçue. Dans un communiqué de presse publié par le Quai d’Orsay, Jean-Yves Le Drian, ministre français des Affaires étrangères, a dénoncé « des atteintes graves à la liberté de la presse ». « La France déplore l’annonce faite par les autorités maliennes d’engager une procédure pour suspendre la diffusion de RFI et de France 24, ainsi que les restrictions imposées à l’ensemble des médias maliens. Ces mesures constituent des atteintes graves à la liberté de la presse », déplore Le Drian.
Il faut dire que cette énième décision prise par les autorités maliennes contre des intérêts de la France est révélateur de la guerre diplomatique qui existe entre les deux gouvernements qui se regardent en chiens de faïence depuis l’annonce que Bamako allait recruter des soldats de Wagner pour lutter contre le terrorisme au Nord du Mali.
Depuis, il s’en est suivi un bras de fer sans précédent entre un gouvernement malien qui reproche à Paris son manque d’engagement dans la lutte contre le terrorisme sur son sol et un gouvernement français qui déclare illégitime le mandat de la junte car n’émanant pas directement du peuple.
Pour rappel, la France qui a annoncé le retrait de toutes ses troupes au Mali a récemment annoncé qu’elle continuera à apporter un soutien aérien à ce pays. Une annonce à laquelle la junte malienne a été totalement indifférente. La réalité actuelle est que la junte qui assume son partenariat avec la Russie de Poutine veut mettre fin à ce qu’elle appelle « la colonisation française » en Afrique.
Y arrivera-t-elle? La France cèdera-t-elle face à la Russie dans un continent qu’elle contrôle depuis la Conférence de Berlin? Face aux députés européens il y a quelques mois, Macron avait clairement fait savoir que l’Histoire de l’Europe se joue en Afrique et ses propos ne sont pas vides de sens pour celles et ceux qui savent déchiffrer le langage géopolitique.
Affaire à suivre!