La Dictature a encore de beaux jours devant elle en Afrique où la ploutocratie, la gérontocratie et le népotisme restent encore une réalité 60 ans après les « indépendances ». Et les exemples sont tristement légion. Au Cameroun, Paul Biya, arrivé au pouvoir en 1982, en est à son 7ème mandat. En Guinée, Alpha Condé vient de décrocher son 3ème mandat dans des circonstances que nous connaissons tous. Au Congo-Brazzaville, Denis Sassou-Nguesso a été élu à la tête du pays ce 6 avril pour un 4ème mandat après plus de 30 ans au pouvoir. Ce 10 avril, Ismael Omar Guelleh, président du Djibouti, a été élu pour un 5ème mandat. En Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara a récemment arraché son 3ème mandat et ce 11 avril, c’est au tour d’Idriss Déby Itno, président du Tchad, de décrocher son 6ème mandat à la tête du pays.
Il est intéressant de faire remarquer que tous ces présidents cités sont arrivés au pouvoir dans des circonstances totalement anti-démocratiques. Certains ont arraché le pouvoir par les armes (coups d’Etat) et d’autres s’en ont emparés par tripatouillage constitutionnel. Et une fois installés au pouvoir, ils en ont fait leur apanage refusant catégoriquement de céder la place à la nouvelle génération.
Au sein de la population africaine, notamment chez la nouvelle génération, cette gérontocratie, bénéficiant parfois du soutien total de l’Occident, pose un sérieux problème. Si dans certains pays tels que le Sénégal ou le Mali, des jeunes sont récemment descendus dans les rues pour dire non à toute tentative de leurs dirigeants ne s’éterniser au pouvoir, ce n’est hélas guère le cas des institutions africaines qui, pour la plus part, semblent valider des pratiques totalitaires dignes d’une autre époque.
En effet, ce 12 avril, quelques heures après le scrutin qui s’est déroulé au Tchad, l’Union Africaine (UA) s’est empressée d’apporter son soutien au dictateur Déby soulignant le bon déroulement du scrutin. « Nous nous réjouissons de ce que les choses se sont déroulées dans la paix, dans la sécurité et dans la liberté pour ceux qui ont le droit de voter », s’est félicité un observateur dépêché par l’UA.
Pourtant, dans les faits, c’est tout le contraire. Peu avant le scrutin, plusieurs organisations internationales de défense des droits de l’Homme ont ouvertement dénoncé la répression menée par le régime de Déby pour intimider l’opposition. L’organisation Human Rights Watch dénonce le passage à tabac des membres de l’opposition et des tentatives d’empêcher que certains puissent exercer leur devoir citoyen. D’ailleurs, trois jours avant la présidentielle, Amnesty International a dénoncé la coupure d’internet par le régime tchadien afin d’éviter toute révolution numérique dans ce pays.
En s’empressant de saluer le bon déroulement du scrutin, l’Union Africaine a donc ouvertement assumé son soutien à Idriss Déby qui, je le répète, dirige le Tchad en mains de fer depuis 1990. Ce faisant, l’UA valide la dictature sanguinaire d’un régime qui n’a jamais lésiné sur les moyens pour semer la terreur avec l’unique objectif de se maintenir au pouvoir.
La victoire d’Idriss Déby, arrachée à l’avance, est une mascarade qui ne dit pas son nom. Mais, bon, en Afrique, ces méthodes totalitaires ne surprennent plus personne car le bas peuple a été habitué à fermer sa gueule et à souffrir en silence s’il veut encore rester en vie.
Biya, Sassou, Ouattara, Guelleh, Condé… et autres (qui appliquent ces méthodes tyranniques) s’en sortent plutôt bien. Et donc pourquoi pas Déby? Le gros danger est que cette pratique qui est une véritable forfaiture ne se propage sur le reste du continent. Et hélas, c’est ce qui est en train de se produire au détriment des peuples.