Coup de théâtre : Darmanin aurait aidé le PSG à ne pas payer des millions d’euros d’impôts en France, d’après Mediapart

Gérald Darmanin, ministre français de l’Intérieur, est dans de beaux draps. En tout cas, moins d’une semaine après la révélation faite par Mediapart qui accuse le gouvernement du Qatar d’avoir fait pression sur la France lors d’une opération policière visant le patron du PSG, c’est désormais le premier flic de France d’être cité dans un grave scandale révélé, ce 04 janvier, par la même source. Les faits se sont produits en 2017 lorsque Darmanin était ministre des Comptes Publics.

En effet, Mediapart vient d’accuser l’actuel ministre de l’Intérieur et son directeur de cabinet de l’époque d’avoir aidé le Paris Saint-Germain (PSG) à ne pas payer des dizaines de millions d’euros de taxe sur le transfert de la star brésilienne, Neymar. Un transfert qui avait déclenché un véritable séisme médiatique en France et à l’étranger.

« Six ans plus tard, cela reste le plus gros transfert de l’histoire du football. En août 2017, le PSG réalisait le casse du siècle en arrachant l’attaquant vedette Neymar au FC Barcelone pour 222 millions d’euros. La facture, déjà astronomique, aurait pu être encore plus salée. Selon nos informations, les avocats du PSG estimaient probable que l’administration française réclame des dizaines de millions de taxes et cotisations sur cette opération. Mais le club est parvenu, en seulement quatre jours, à éliminer complètement ce risque et à ne payer aucun impôt, grâce à une faveur accordée par le ministre des comptes publics de l’époque Gérald Darmanin (aujourd’hui ministre de l’intérieur), contre la jurisprudence de l’administration dont il avait la tutelle », révèle Mediapart qui dit avoir obtenu ses informations en consultant des documents inédits issus des « Football Leaks ».

Il s’agit bien d’une histoire de gros car, d’après les informations obtenues par le site d’investigation, l’affaire se réfère au transfert de Neymar du FC Barcelone au PSG pour un montant estimé à 222 millions d’euros qui correspond au montant de la clause libératoire fixée par le club catalan qui refusait, en 2017, de vendre la star brésilienne.

« L’affaire qui nous intéresse commence en juillet 2017. L’émir du Qatar, propriétaire du PSG, veut laver l’affront de l’humiliante défaite du club en Ligue des champions face au FC Barcelone en lui prenant Neymar. Puisque le club catalan refuse de le vendre, la seule solution est de payer 222 millions d’euros, le montant de sa clause libératoire », nous apprend Mediapart.

Mais, l’opération n’est pas aussi simple qu’on pourrait l’imaginer. Car, dans un pays devenu le champion du monde de la taxation, le PSG craignait que ce paiement soit assujetti « à l’impôt sur le revenu, mais surtout aux cotisations sociales qui financent la Sécu, comme n’importe quelle rémunération ».

Un véritable casse-tête pour le club de la capitale. Et c’est dans ce contexte qu’entreront en lice deux personnalités citées par Mediapart : Jean-Martial Ribes, directeur de communication du PSG et Hugues Renson, député macroniste et vice-président de l’Assemblée nationale française.

Pour résoudre l’équation qui donnait le tournis au club qatari, Ribes appelle le député macroniste lui demandant de venir le rejoindre immédiatement dans un hôtel parisien. Ce qui fut fait. Le député macroniste quitte l’hémicycle pour rejoindre Ribes et le patron du PSG, Nasser El-Khelaïfi qui l’attendaient.

La suite, Mediapart nous la raconte ainsi : « après un bref entretien, Hugues Renson retourne à l’Assemblée. À 22 h 14, il annonce à Jean-Martial Ribes qu’il vient ‘de parler à Darmanin’ : ‘Il a bien le truc en tête et me dit qu’il y travaille’. Et c’est à partir de là que Darmanin et son entourage seraient entrés en action, comme l’explique le site d’investigation.

« L’intervention du député semble en tout cas avoir été efficace : le soir même, le directeur général du PSG, Jean-Claude Blanc, s’entretient avec le directeur de cabinet de Gérald Darmanin, Jérôme Fournel – qui se trouve être aujourd’hui… le patron de la DGFIP, l’administration fiscale. À 22 h 37, Fournel envoie par e-mail à Blanc, ‘suite à notre conversation’, une note blanche non signée, intitulée ‘transfert joueur’. Le bras droit de Gérald Darmanin écrit que la clause libératoire n’existe pas en droit français : il n’y a donc pas ‘de règles juridiques expresses ou incontestables’, et il n’est pas possible de prévoir ‘à 100 %’ si l’administration va décider de taxer ou pas. », renseigne Mediapart.

C’est lors d’une réunion d’arbitrage tenu à Bercy que tout aurait été décidé. Si aucun cadre du PSG n’a pris part à cette rencontre, Mediapart nous explique tout de même la suite. « Le lendemain 26 juillet à 15 h 05, juste après la réunion, Hugues Renson se charge d’annoncer la bonne nouvelle à Jean-Martial Ribes : ‘j’étais avec Gérald. On a parlé. Il considère que c’est bon. Le calendrier a l’air fixé. Et ce qui compte, c’est que les documents que nous avions évoqués soient produits. Ils protégeront’. Le député a raison : dès le lendemain, le PSG reçoit deux ‘rescrits’ fiscaux adressés par le fisc et l’Urssaf d’Île-de-France, qui annoncent au club qu’il n’y aura ni impôt ni cotisations sociales à payer au sujet de la clause libératoire de Neymar« , révèle la source.

Pourtant, dès le lendemain, rappelle Mediapart, Gérald Darmanin, ministre des Comptes Publics, se réjouit du transfert du joueur brésilien en évoquant les impôts qu’il paiera en France. «  Il vaut mieux que ce joueur de football paie ses impôts en France qu’il les paie ailleurs », disait celui qui est aujourd’hui le premier flic de France. Sauf qu’au micro de France Inter, il avait volontairement évité de dévoiler les contours d’une opération très opaque.