Sénégal : 80 morts, 1800 détenus politiques (une analyse de Sidy Mokhtar Touré)

(Une analyse de Sidy Touré)

Nous voilà vers la fin de l’odyssée de Macky Sall a la tête du Sénégal. Deux mandats, douze années au total qu’ont résumées l’accueil spectaculaire que les Sénégalais d’Amérique ont réservé au Président Sénégal lors de la rencontre annuelle des Nations-Unies.

La ville de New York a été le théâtre d’une manifestation unique en son genre pour montrer à la face du monde entier le vrai visage d’un homme et de son régime. Des images et vidéos difficiles à visionner mais aussi dignes d’une vraie dictature en provenance du Sénégal prises durant des manifestations qui se sont déroulées entre 2021 et 2023. C’est une grande première dans le monde qu’une manifestation par l’image montre cette horreur inhumaine et indescriptible.

Si vous l’ignoriez, si vous en doutiez, voilà le visage hideux de celui que beaucoup de leaders du monde prenaient comme un républicain, démocrate et grand leader. Ce régime sortant est le pire que le Sénégal n’a jamais connu et pas plus tard qu’avant-hier une jeune femme du nom de Marie Gueye a trouvé la mort suite a une altercation avec la gendarmerie de la localité sur un soi-disant « contrôle d’identité ».

« Réduire l’opposition à sa plus simple expression »

A l’entame de son règne, pour asseoir son emprise sur le pouvoir Macky Sall avait déclaré : Je vais réduire l’opposition a sa plus simple expression. Bien il l’a fait mais sans avoir l’honnêteté de reconnaitre qu’il a salit et démolit la vitrine démocratique qu’était notre pays. Sachant dès le départ ses limites sur le plan intellectuel, lui ingénieur géologue, le Chef de l’Etat a cherché à tirer sur ses côtés toute personne influente qui pourra lui causer des ennuis quel que soit son domaine. Ainsi a-t-il pris universitaires, hommes de médias, de la société civile, du sport et des arts, de l’Armée et même des syndicats pour former un groupe imperméable dans le but de ne rencontrer aucune forme d’adversité, et faire taire toutes les voix autorisées en vue de dérouler son plan machiavélique.

Pire, il est allé plus loin avec sa méthode de la « carotte et du bâton » en démolissant la société civile qui n’existe presque plus, la presse, considérée comme le quatrième pouvoir et occupée par des « journalistes alimentaires pour la plupart » n’ose relater plus que des faits divers mais aussi les syndicats disparus. La méthode Sall, c’est la corruption ou le purgatoire. Son application s’est faite sans état d’âme, aider en cela par des fonctionnaires du système judiciaire, gérants de leur carrière tout court arrêtant et décernant des mandats de dépôt tous azimuts, même pour une simple question sur Facebook. Les victimes de ce mode de gouvernance sont innombrables.

Il aura broyé l’opposition d’abord en tissant une coalition de partis politiques qui a le plus durée dans l’histoire du Sénégal. Ensuite, il s’est mis à décapiter l’opposition en commençant par le Parti Démocratique Sénégalais avant de finir par le tout puissant Maire de Dakar. Comme il n’a jamais eu le courage d’affronter directement ses adversaires sur le terrain politique, il use de la justice comme bras armé pour liquider qui il veut. Mais en voulant se débarrasser de tout le monde, il a créé et laissé le champ libre à un jeune opposant du nom d’Ousmane Sonko.

Inspecteur des Impôts et Domaines du Sénégal, radié par décret Présidentiel pour avoir étaler sur la place publique des « secrets professionnels », Mr Sonko a rampé jusqu’à atteindre un niveau de popularité qu’aucun homme politique n’a pu avoir dans l’histoire de notre pays. Il aura fini, en si peu de temps a marqué tous les Sénégalais, jeunes comme vieux, pour devenir le chef de l’opposition et adversaire principal du régime. Alors il faudra le liquider pour achever son projet démoniaque de « réduire l’opposition à sa plus simple expression » et avoir le champ libre pour rester éternellement au pouvoir.

Le projet hideux de liquidation de Sonko a commencé après l’élection Présidentielle tenue en 2029 pour laquelle, il était arrivé « troisième » devenant ainsi une réelle menace contre ce régime et le système politico-oligarchique qui accaparent le pays. Cette élection devait consacrer le dernier mandat de Macky Sall à la tête du pays. Mais comme l’appétit vient en mangeant, Le Président semblait avoir un gout inachevé du pouvoir et voulait vaille que vaille garder le pouvoir. Il ne pourra pas le réussir avec la présence de ce jeune loup politicien aux dents longues.

Macky Sall ne peut pas me liquider sans se salir les mains 

Ousmane Sonko avait fait cette déclaration en 2021 alors qu’il faisait l’objet d’une plainte pour viol sur une fille. Cet épisode, comprise par la majorité des citoyens comme une sordide machination politique, va faire sombrer le régime de Macky Sall. Elle restera une grosse tache noire sur les annales politiques du Sénégal vu le grand nombre de victimes qu’elle a faites. Emprisonnements sans cause, blessures à vie, handicaps, pertes en vie humaine, radiation de fonctionnaires, destruction de biens, les dégâts de ce dossier sont innombrables. Au bout de deux années marquées par l’adversité, l’animosité et puis la haine, il y a eu 80 morts, près de 1800 prisonniers politiques dont Ousmane Sonko lui-même. Ce dernier est victime de haine et d’acharnement jamais égalé. Pluies de plaintes, de convocations, d’accusations salaces et fallacieuses, d’embrigadements, de tortures physiques et psychologiques, d’humiliations, d’intimidations, de tentatives d’assassinat, et finalement de mise en résidence surveillée sans base légale avec ses femmes et enfants pendant 55 jours, malgré tout il a tenu bon et debout.

Cependant, comme il l’avait bien prédit, Le Président s’est fait plus que salir les mains. Un dossier bien costaud l’attend au niveau de la Cour Pénale Internationale puisqu’aucune de ces morts n’a fait l’objet d’une enquête ou arrestation. Quatre-vingts (80) morts par balles dans la rue soit par des hommes en tenue ou en civil à côté des forces de l’ordre. Les vidéos ont été diffusées sur des écrans géants à New York puisque non seulement la coupe est trop pleine mais aussi les médias ont tellement été payés ou sommés de ne point couvrir ces évènements.

C’est la première fois dans l’histoire qu’un Président Sénégal soit amené devant cette juridiction s’occupe des crimes contre l’humanité. Et je dis avec vigueur que la CPI, si elle veut préserver sa crédibilité, a l’obligation de tirer ces morts au clair et punir les responsables à commencer par Mr Macky Sall et tout autre responsable d’autant plus qu’elle a reçue énormément de preuves pour mener ses enquêtes. Ce régime a fait couler trop de sang au Sénégal.

La peur de briguer un autre mandat pour éviter la prison

Il y a eu tellement de morts, de scènes de violence, de violation de droits les plus élémentaires que Le Président Sall ait eu peur d’annoncer une candidature qui n’aurait fait qu’allonger la liste des morts, ce qui allait sceller définitivement son sort après la présidence. Même en abdiquant malgré lui, Macky ne peut plus gagner le cœur des Sénégalais. Il continue dans la brimade, les emprisonnements, arrestations arbitraires, la négation automatique des droits. Le bouchon est poussé jusqu’à faire arrêter les émigrés qui retournent au pays dès leur arrivée à l’aéroport puisque seulement dans leur majorité, ils sont des pros Sonko. C’est cette situation qui explique cette manifestation historique qui a duré trois jours dans la ville de New York.

Voilà une belle manière de dire au revoir à un tyran, un dictateur et despote caché derrière le discours d’un démocrate et la résilience d’un peuple pour tuer des civiles, réprimer les libertés politiques et individuelles, dissoudre des partis politiques, menacer et tenir en respect des syndicats et médias libres. Par cette manifestation, la diaspora sénégalaise aux USA et Canada veut fait entendre au monde entier que ce serait une grosse erreur de recycler un tel personnage après qu’il quitte la présidence. Tout comme elle exige une élection inclusive, transparente et libre qui aboutira à un transfert paisible et démocratique du pouvoir. Aussi la diaspora et le peuple sénégalais attendent à ce que le Président Sall ainsi que tous ses collaborateurs dans le gouvernement, l’administration et au sein des forces armées et de sécurité soient traduits devant les juridictions internationales pour répondre des crimes de sang qui ont eu lieu durant son règne. Les institutions internationales seront saisies pour souligner à leur attention que l’éthique, le respect de leur mission et engagement sur les droits humains les prohibent d’honorer, de recruter et ou de collaborer, dans le futur, avec un homme aux mains entachées de sang de son peuple.

SMT,

Email: frentrans23@gmail.com

Traducteur et Consultant en développement International. Washington, USA