Sénégal : Guy Marius Sagna détruit la France : « l’armée française est ici pour protéger les intérêts d’entreprises étrangères impérialistes

En pleine crise politique au Sénégal et dix jours après l’annonce du report de la présidentielle (initialement prévue ce 25 février) par Macky Sall, l’opposition continue de tirer à boulets rouges sur un chef d’Etat en fin de mission et dont l’objectif serait, pour certains, de s’aggriper au pouvoir.

C’est du moins ce que laissent entendre de nombreux acteurs politiques sénégalais, dont Guy Marius Sagna, député proche de Pastef, dans un entretien accordée au média français Mediapart et intégralement lu par Lecourrier-du-soir.com. Ainsi, à la question de savoir quelles leçons il tire des violentes manifs contre Macky Sall, l’activiste ne mâche pas ses mots.

« Le premier enseignement est que la rhétorique du pouvoir, selon lequel il n’y a pas de crise véritable, que le peuple sénégalais vaque à ses occupations et que les voitures circulent, s’est effondrée. Il n’y a pas une seule des quatorze régions et des quarante-six départements que compte le Sénégal qui ne soient pas concernés par le mécontentement et la mobilisation. Contrairement à la fanfaronnade du président, le peuple s’est indigné et élevé contre cette loi qui consacre un coup d’État constitutionnel. Le deuxième enseignement est que le putschiste Macky Sall − puisque c’est ainsi qu’il faut l’appeler désormais − est un facteur d’instabilité, de chaos et de mort. Trois morts sont à dénombrer et nous adressons des prières pour leurs âmes et des condoléances pour leurs familles. Ces décès ne resteront pas impunis et nous allons saisir toutes les institutions au Sénégal et hors du Sénégal pour faire la vérité et punir les coupables. Ces trois morts viennent allonger la liste déjà trop longue des martyrs de la démocratie sénégalaise, qui dépasse les soixante-dix personnes depuis 2021, et pour lesquelles aucune enquête n’a été ouverte et aucune sanction n’a été prise. Macky Sall offre ainsi des permis de tuer à ses forces de sécurité », rétorque-t-il.

Dans l’interview accordée à Mediapart, Guy Marius Sagna n’a pas été tendre envers la France dont il dénonce les liens qui le lient au régime de Macky Sall. Ainsi, lorsqu’on lui pose la question de savoir si les dérives du pouvoir actuel ne relèvent pas de l’autoritarisme endogène, il répond sans ambages : « parce que ce pouvoir perpétue des intérêts néocoloniaux, au sens où il perpétue le franc CFA qui est une continuation de politiques coloniales ; encourage des accords de partenariats économiques qui bénéficient à l’Union européenne au détriment de nos paysans et de nos pêcheurs ; suit les diktats du FMI et de la Banque mondiale ; continue d’employer le français dans l’administration aux dépens du sérère, du soninké ou du wolof… Et aussi dans la mesure où il permet la présence sur notre sol d’une armée d’occupation, en l’occurrence l’armée française ».

Parlant de la présence de l’armée française au Sénégal, le représentant du peuple n’y va pas de maint morte. « Jamais la France n’accepterait une base de l’armée sénégalaise sur le territoire français. Et cette armée est cantonnée sur une base jusqu’à ce qu’on lui dise d’en sortir pour assurer la sécurité de Macky Sall, qui fait partie des valets africains des intérêts du CAC 40 », dénonce-t-il.

Et de poursuivre : « cette armée est ici pour protéger les intérêts d’entreprises étrangères impérialistes auxquelles ont été cédés les meilleurs morceaux de notre économie, comme notre autoroute à péage ou les magasins de grande distribution qui prospèrent tandis que nos marchés périssent ».

Evoquant le probable départ de Macky, Guy Marius Sagna tacle sévèrement la France qui, selon lui, chercherait à s’assurer que le successeur de l’actuel président sauvegarderait les intérêts de l’Hexagone. « La France n’est pas indifférente à la question de savoir qui va succéder au président Sall. Et ce n’est pas une bonne nouvelle de son point de vue que le successeur le mieux placé dans les intentions de vote demande le retrait de l’armée française du Sénégal », lâche-t-il.