Scandale au Sénégal : 2 ex ministres de Macky Sall ont signé un faux contrat d’armements de plusieurs milliards

Un scandale d’Etat qui arrive au très mauvais moment pour Macky Sal et son régime.

En effet, dans un contexte social extrêmement tendu marqué par une guerre des mots entre l’opposition et le pouvoir en place sur fond d’un éventuel troisième mandat que Macky Sall chercherait à briguer, des journalistes d’investigation font une révélation de taille sur un contrat d’armements extrêmement opaque passé entre l’Etat du Sénégal et un homme d’affaires sulfureux, tristement célèbre et connu sous le nom de Aboubakar Hima.

La révélation a été faite ce 25 octobre par Organized Crime and Corruption Reporting Project, un consortium de journalistes d’investigation qui enquêtent sur les crimes organisés et la corruption dans plusieurs parties du monde, notamment sur le continent africain.

Mais, que nous apprennent-ils concrètement? Intéressante question. En effet, dans un article publié sur leur site et intégralement lu par Lecourrrier-du-soir.com, on y apprend qu’Aboubakar Hima, homme d’affaires nigérien, qui a récemment été épinglé dans son pays pour un contrat d’armements d’une valeur de 240 millions de dollars, s’est trouvé un point de chute : le Sénégal où il a signé un juteux contrat avec l’Etat.

Organized Crime and Corruption Reporting Project parle d’un deal de 77 millions de dollars passé, début 2022, entre une agence d’Etat sénégalaise et une entreprise locale dont la création a été très récente. Mais, quelques détails intriguent les journalistes : d’abord, le contrat n’a pas été signé avec le ministère sénégalais des Armées (ce qui devait être le cas), mais plutôt avec le ministre de l’Environnement (à l’époque dirigé par Abdou Karim Sall) qui n’a aucune compétence dans ce domaine. Et ensuite, le marché (dudit contrat) n’a jamais été soumis à un appel d’offre.

Deux dysfonctionnements qui ont interpellé Organized Crime and Corruption Reporting Project et le média israélien Haaretz, lesquels ont immédiatement actionné leurs réseaux pour percer le mystère d’un deal opaque signé dans la plus discrétion. Ainsi, en creusant un peu, les enquêteurs découvrent que l’entreprise qui a fourni les armes n’est autre que Lavie Commercial Brokers qui appartient en fait au Nigérien Aboubakar Hima dont l’immense fortune proviendrait de ses réseaux de trafic d’armes basés entre le Nigeria et le Niger.

Les enquêteurs vont plus et révèlent que le contrat n’a pas été signé par Hima (surnommé Petit Boubé) qui n’a certainement pas voulu laisser ses empreintes et se faire chopper. Du coup, qu’est-ce qu’il a fait? Il a délégué la signature du deal a été un collaborateur israélien du nom de David Benzaquen, lequel (Benzaquen) est le propriétaire d’une entreprise immatriculée Lavies Strategies. Cette entreprise israélienne est assermentée et a obtenu du gouvernement israélien une licence l’autorisant à exporter des armes.

D’après les enquêteurs, David Benzaquen n’est pas une personnalité quelconque. Il fut un ex employé de Gabi Peretz, richissime vendeur d’armes et ami intime du président sénégalais Macky Sall. Le nom de Gabi Peretz n’est pas étranger aux dirigeants des pays d’Afrique subsaharienne où le richissime homme d’affaires a passé de nombreux contrats.

Mais, les choses se corsent pour l’Etat sénégalais. Car, à en croire les journalistes d’investigation, au moment où Hima a décroché le contrat d’armements au Sénégal, Gabi Peretz venait d’offir une ligne de crédit de 300 millions d’euros à l’armée sénégalaise. Une information confirmée par le média d’investigation Africa Intelligence. Cependant, interrogé par les journalistes, Peretz nie tout lien avec Benzaquen et Hima affirmant ne plus être en contact avec les deux personnages.

Egalement interrogés par les journalistes, plusieurs experts (dont des Sénégalais) soulignent un contrat opaque d’autant plus que le ministère de l’Environnement qui l’a signé n’a aucune compétence en la matière. Joint, Richard Messick, ex fonctionnaire auprès de la Banque Mondiale et expert dans des sujets liés à la corruption, dénonce le fait qu’un Etat passe un deal avec une personnalité (ici Aboubakar Hima) impliquée dans des activités criminelles.

Dans l’article en question, les journalistes citent deux noms : Abdou Karim Sall et Abdoulaye Daouda Diallo. D’après les enquêteurs, ces deux personnalités ont signé le contrat avec le trafiquant nigérien Hima. Contactés par les journalistes, les deux ont catégoriquement refusé de répondre. Hima et Benzaquen ont aussi catégoriquement refusé de se prononcer sur ce sujet.

Jusqu’ici, les journalistes n’ont pas de preuve que les armes ont été livrées au Sénégal. Cependant, les détails du contrat permettent de constater que des milliards de FCFA ont été dépensés en toute discrétion. Ainsi, d’après les informations obtenues par Organized Crime and Corruption Reporting Projet, les autorités sénégalaises avaient accepté de verser 9,06 milliards de FCFA (soit 15,4 millions d’euros) à Lavie Commercial Brokers. Le paiement devait se faire en plusieurs fois.

Et ce n’est pas tout. Dans le contrat, il a été prévu que l’entreprise Lavie Commercial Brokers financ les frais de voyage de 6 personnalités sénégalaises à Dubaï. Ces dernières avaient pour mission de vérifier les armes avant qu’elles ne soient livrées au pays. La délégation sénégalaise devait voyager en Business Class et être logée dans un hôtel 5 étoiles.

Pour rappel, Aboubakar Hima est sous le coup d’un mandat d’arrêt lancé par les autorités du Nigeria, pays où il a plusieurs fois signé des contrats dans des conditions extrêmement opaques. Aux Etats-Unis et en Afrique du Sud, ses biens sont gelés par les autorités en raison de ses deals frauduleux.