Au Sénégal, une révélation récemment faite par un journaliste enflamme les réseaux sociaux et inquiète une population très mal informée qui crie au scandale. Il y a en effet une semaine, un confère basé aux Etats-Unis avait fait état de la présence, dans notre pays, d’une machine dont le travail consiste à transformer en eau potable des eaux usées (déchets humains).
Depuis, l’affaire a suscité un véritable émoi dans le pays et devient l’un des sujets les plus abordés dans les débats publics. Certains dénoncent un scandale. D’autres, se basant sur des rapports scientifiques, estiment qu’il n’y a pas de péril en la demeure. Mon but, dans cet article, n’est point de légitimer ou délégitimer la présence de cette machine financée par le philanthrope Bill Gates, mais plutôt d’apporter des éléments probants et convaincants afin de vous assurer qu’il ne s’agit en aucun cas d’un canular.
En ma qualité de journaliste, j’ai voulu me départir des rumeurs. En effet, cette démarche, très prisée par bon nombre de journalistes sénégalais, n’a jamais permis d’élucider les sujets de discorde. Au contraire, elle sème le doute dans la tête de nos compatriotes qui, aujourd’hui, ont le droit de connaître la vérité.
J’ai pu m’entretenir avec des journalistes basés au pays de l’Oncle Sam. Au début, la mission s’avérait impossible. Mais, finalement, elle a fini par porter ses fruits. J’ai pu collecter quelques informations sur la présence de cette machine qui défraie la chronique et attise la curiosité de plus d’un.
Ces journalistes m’ont transmis des liens d’une importance capitale consacrés à la machine. L’un des liens concerne un article rédigé par CNN datant du 13 août 2015. Dans cet article en question, CNN y insère une vidéo dans laquelle on peut voir le milliardaire américain, Bill Gates, boire de l’eau qui, selon les médias américains, proviendrait des déchets humains.
Dans un autre article datant du 7 janvier 2015, CNN fournit plus de détails sur cette machine. Elle est nommée Omniprocessor et créée par Janicki Bioenergy, une entreprise basée au Nord de Seattle et gérée par des ingénieurs hautement qualifiés qui ont pour but « d’améliorer le monde », comme le précise le site internet de Janicki. Je précise que Janicki Bioenergy est entièrement sous le contrôle de la Fondation Bill & Melinda Gates.
CNN précise que le but de la machine est de prévenir des risques de maladies causées par les eaux usées. Le média américain ajoute un élément d’une importance capitale. Dakar, capitale du Sénégal, est en effet choisi pour les tests. Pourquoi le choix de Dakar ? Nos autorités politiques étaient-elles au courant ? Ont-elles été soudoyées pour accepter que notre pays soit le cobaye d’une entreprise entièrement sous le contrôle d’un homme (ici Gates) aux intentions très obscures ? Je ne saurai fournir une réponse.
Dans mes investigations, j’ai également appris que la machine, dont la présence n’a été révélée que très récemment, est installée dans la capitale sénégalaise depuis 2015. Nos journalistes sur place, plutôt intéressés par la vie privée des vedettes et très orientés vers le sensationnel, ont une nouvelle fois été aux abonnés absents. Une honte mais rien de surprenant.
Venons-en aux choses sérieuses. Pour tous ceux et toutes celles qui émettent des doutes sur la véracité de l’information, je vous propose un article rédigé par Bill Gates lui-même dans son fameux blog Gatesnotes.com. Dans un article intitulé « et si une machine transformait les matières fécales en eau potable ? », Bill Gates confirme l’installation de cette machine à Dakar.
Dans son article datant du 11 janvier 2015, il écrit ceci : « en début d’année (2015, ndlr), j’ai partagé une vidéo où je buvais de l’eau provenant des matières fécales. Aujourd’hui, la machine qui a produit cette eau, le Jackini Omniprocessor, encore appelée le JOP, est à Dakar, au Sénégal, dans le cadre d’un projet pilote qui pourrait sauver des vies et réduire les taux de mortalité dans les pays pauvres ».
Dans l’article, Bill Gates explique les raisons de la création d’une telle machine. « La machine transforme les déchets humains en eau potable, en électricité et en cendres. Il est intéressant de mettre l’accent sur l’eau potable pour diverses raisons. Néanmoins, le but n’est pas de fournir de l’eau. Le but est en effet d’améliorer considérablement l’hygiène publique pour toutes les villes des pays pauvres », explique le philanthrope.
Bill Gates, dans ce même article, confirme que son entreprise est en partenariat avec le service national de l’hygiène publique du Sénégal. Ce service est-il une branche du ministère de la santé ? Quel lien ce service entretient-il avec le gouvernement sénégalais ? Les autorités ont-elles étouffé cette affaire pour éviter toute polémique sur le sujet ? Bill Gates a-t-il installé sa machine gratuitement sur le territoire sénégalais ? Nos autorités ont-elles perçu des pots-de-vin ?
Ce sont des questions légitimes qui, à mon avis, méritent d’être posées d’autant plus que la SDE (Sénégalaise Des Eaux) vient de fuir ses responsabilités dans un communiqué. Permettez-moi de préciser que je ne suis pas dans une démarche politique car étant moi-même apolitique. Je préfère aussi garder mon opinion pour moi-même concernant la question de savoir si cette machine est bonne ou mauvaise pour notre pays. Nous avons suffisamment de scientifiques sénégalais qui, le moment venu, nous édifieront.
Je suis dans une logique d’information et en tant que journaliste, j’ai l’obligation, sur un sujet aussi sensible et scabreux que celui-ci, d’apporter des précisions. Mettre les points sur les i nous permettra certainement de faire bouger les lignes.
Pour lire les sources, cliquez ici : CNN, Gatesnotes.com
Cheikh DIENG est journaliste sénégalais et rédacteur en chef et fondateur du site d’information www.lecourrier-du-soir.com
Mail : cheikhdieng05@gmail.com