72 députés de la LREM ont déposé une proposition de loi pour autoriser la vente d’alcool dans les stades. Une proposition de loi vertement dénoncée par les associations de lutte contre l’alcoolisme qui y voient une manœuvre du lobby alcoolier pour se faire un pognon de dingue lors des Jeux Olympiques de 2024 à Paris
Le lobby alcoolier met pression sur le gouvernement Macron. En effet, deux mois après l’annonce du gouvernement de privatiser la Française des Jeux (FDJ), les députés LREM se lancent dans un autre projet qui risque de diviser profondément la société française : la vente de l’alcool dans les stades.
En effet, 72 députés de La République En Marche (LREM) ont déposé ce 24 juillet 2019 à l’Assemblée Nationale une proposition de loi visant à faire de la France « une nation sportive ». Ce projet de loi vise à « assouplir de manière encadrée la loi Evin dans les stades en attendant l’octroi d’autorisations temporaires de vente d’alcool aux sociétés sportives ». Dans la presse, on a appris que le texte déposé comporte 18 articles répartis en cinq chapitres.
On a aussi appris que trois députés de la majorité sont en train de travailler d’arrache-pied sur ce texte : François Cormier Bouligeon, Cédric Roussel et Belkhir Belhadad. Ils dénoncent deux injustices : la première est liée au fait que les professionnels n’ont pas le droit de vendre de l’alcool aux supporters, tandis que les clubs amateurs ont une dérogation pour commercialiser de la bière et la seconde concerne le fait que les fans n’ont pas le droit de consommer de la bière en tribune alors que dans les loges VIP, la bière y est consommée.
« Une manne financière estimée à plus de 30 millions d’euros »
Il est intéressant de souligner que le projet ne date pas d’hier. En effet, en mars 2017, trois sénateurs, Dominique Bailly, Jean-Jacques Lozach et Claude Kern s’étaient déjà déclarés favorables à la modification de la Loi Evin, cette fameuse loi adoptée le 11 décembre 1990 par l’Assemblée Nationale et qui encadre la publicité en faveur des boissons alcoolisées.
Avec l’arrivée d’Emmanuel Macron, les défenseurs du projet ont accéléré la cadence et pour réussir à faire passer leur loi, ils insistent sur les retombées financières de la vente d’alcool dans les stades : 30 à 50 millions d’euros annuels pour les clubs. Cependant, le projet risque de ne pas voir le jour. Car, à peine annoncé, il provoque une vive inquiétude des associations de lutte contre l’alcoolisme.
« La consommation d’alcool est incompatible avec le sport »
C’est le cas notamment de l’association ANPAA (Association Nationale de Prévention en Alcoolique et Addiction) qui, ce 6 août, a accusé les députés LREM de se faire « le relais fidèle au lobby alcoolier qui rogne progressivement la plus grande loi de santé publique dont la France se soit dotée ».
« Après avoir élargi les possibilités de communication publicitaire lors de la précédente mandature, le lobby parlementaire de l’alcool repart à l’assaut en faisant sauter un de ces derniers verrous de la loi Evin qui interdit le sponsoring du sport par les cigarettiers et les alcooliers. Il nous semble important de rappeler à ces députés que la consommation d’alcool est incompatible avec le sport (…) », indique ANPAA dans un communiqué.
« Les Français ne sont pas dupes »
Pour Bernard Basset, vice-président de l’ANPAA, le timing est parfait pour les députés LREM à quatre ans des Jeux Olympiques attribués à la France. « C’est une affaire de gros sous, et les députés s’en font le relais », dit-il. Interrogé par France Info, le psychiatre addictologue, Amine Benyamina, est sur la même ligne qu’ANPAA.
« Ce texte qui veut faire de la France une grande nation sportive est influencé par le lobby de l’alcool qui encore une fois frappe en plein mois d’août et qui a pour but de mettre d’accord un attelage de parlementaires venus d’horizons différents », dit Benyamina qui dénonce une « diktat du lobby ». « Les Français ne sont pas dupes », lance-t-il.
Il convient de rappeler que Nicolas Hulot, ex ministre de l’Ecologie de Macron, avait durement dénoncé l’influence des lobbys sur les décisions politiques d’Emmanuel Macron. Parlant de l’influence de ces groupes de pression sur le gouvernement, Hulot déclarait en avril 2019 dans une interview accordée à Libération : « c’est une entrave à la démocratie ».