Macron inaugure une nouvelle ère coloniale en Afrique (Par Sidy Moukhtar Touré)

(Une analyse du chercheur Sidy Moukhtar Touré)

Lorsqu’à l’école, on nous enseignait l’histoire de l’Afrique coloniale, nous pensions que c’était un mauvais souvenir, un combat gagné par les Frantz Fanon, Aimé Césaire, et autres grands panafricains qui ont défendu notre liberté à leur temps. Aujourd’hui, il devient de plus en plus évident que le monstre colonial qu’est la France nourrit toujours la même ambition de dominer une grande partie de notre continent. La fin du franc colonial français (FCFA) n’est pas synonyme d’une liberté économique mais le début d’une nouvelle ère coloniale qui risque de durer un siècle encore.

L’annonce a été brutale mais pas surprenante venant d’un des meilleurs amis de la France en Afrique, à savoir M. Alassane Dramane Ouattara de la Côte-d’Ivoire. Le CFA, tant décrié et dénoncé en tant que monnaie de servitude, va céder la place à l’Eco, comme nouvelle monnaie d’une bonne partie de l’Afrique occidentale.

Les détracteurs de cette monnaie se souciaient plus des mauvais accords qui la gouvernaient que de son appellation. Le droit que la France s’arroge pour nous dicter une politique monétaire à travers son droit de véto au conseil d’administration de nos différentes banques centrales et des profits qu’elle tire de la gestion de nos devises qui va du battage en passant par la circulation jusqu’au retrait ne rime point avec la liberté non pas seulement économique mais la liberté tout court. Faudra-t-il encore le rappeler à la France, son peuple et ses dirigeants que la liberté, c’est la faculté de décider sur tout ce qui touche nos pays sans la moindre contrainte. La France ne doit avoir rien à foutre dans une question de souveraineté comme la monnaie.

Alors considérant tout cet intérêt que le Président Macron accorde à cette question monétaire, nous voyons en cette décision une stratégie de rebranding de la monnaie coloniale pour faire taire les critiques et dénonciations qui commençaient à prendre de l’ampleur. À vrai dire la France n’est pas encore prête à lâcher ce morceau qu’est l’Afrique. Elle veut continuer à en profiter davantage pour assurer son existence à la fois économique et politique sur la scène internationale.

Nous intellectuels africains, jeunes et moins jeunes, sommes opposés à cette politique de domination avec la complicité de certains de nos dirigeants qui, semble-t-il, défendent plus les intérêts de la métropole que ceux de leurs propres pays. De la même manière que nous dénonçons l’attitude coloniale de la France et de ses dirigeants, nous nous indignons profondément du comportement docile de nos leaders qui sacrifient l’avenir de toutes ces générations désorientées et sans espoir qui se suicident massivement dans les océans et le désert.

À l’instar d’autres jeunes panafricains comme Sémi Kéba, nous poursuivrons le combat contre la politique coloniale française qui n’est pas seulement d’ordre économique dans nos pays. C’est un combat qui a un coût mais qui le vaut aussi.

En mettant fin au CFA, Macron ambitionne de faire gripper la machine de la contestation hélas c’est peine perdue car elle sera plus vive. La Françafrique, les armées économique, diplomatique et militaire qui n’ont comme fin le maintien de nos pays sous les liens de la domination doivent cesser d’exister en Afrique.

Le colonialisme est dépassé. Même si la France a toujours des valets  en Afrique qui cautionnent cette politique au détriment des intérêts de leur peuple, nous le combattrons. Le sacrifice suprême pour la liberté est le sang et nous devons tous être prêts à faire ce sacrifice au prix de notre liberté entière et totale. Et je termine par en appeler à nos dirigeants à qui il reste un peu de patriotisme et de courage de réfléchir sur la décision stratégique de créer, maintenir et équiper une armée africaine solide et opérationnelle en vue de faire face à toute sorte de menace coloniale et colonialiste d’où qu’elle vienne. La monnaie unique n’est pas une priorité, et le moment venu, nous devons le faire sans la FRANCE !

Sidy Moukhtar Touré

Washington D.C. USA

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