Mort de Prigojine : menacé par Poutine, le chef de Wagner est assassiné pour avoir trahi la Russie

« Il a joué et il a perdu », diront ses détracteurs.

Ce 23 août au soir, le monde a appris, stupéfait, la mort de Evgueni Prigojine, chef des mercenaires de Wagner. Ce dernier qui se trouvait à bord d’un avion privé, immatriculé RA-02795, n’a pas survécu au crash survenu à Tver, région située entre Saint-Pétersbourg et Moscou. Il n’était pas seul. D’autres passagers y ont aussi laissé la vie.

A la suite de l’annonce du crash de l’avion dans lequel se trouvait le redoutable chef de Wagner, il s’en est suivi un véritable tollé médiatique. Si en Russie, les autorités préfèrent défendre la thèse d’un simple accident, dans le reste du monde, notamment en Occident, la thèse d’un assassinat prémédité est privilégiée. Et vu le contexte actuel, cette seconde thèse tient la route.

En effet, le Kremlin, l’armée russe et les services de renseignement russes n’ont toujours pas digéré l’humiliation que leur a infligée le patron de Wagner qui, à la date du 24 juin, avait fait trembler le pouvoir russe en déclenchant une mutinerie totalement inattendue pour marcher sur Moscou et déloger Vladimir Poutine.

Et comme l’on pouvait s’y attendre, l’affaire avait suscité en Occident un intérêt tout particulier qui s’explique surtout par le fait que la mutinerie que Moscou qualifie de tentative de coup d’Etat s’est déroulée en pleine guerre en Ukraine. Une guerre cruciale pour la survie de la Russie mais aussi pour le Monde Libre.

Pour Poutine, c’est une humiliation historique et les responsables en paieront le prix. Ainsi, dans un discours à la nation très largement suivie dans le monde, le président russe s’adresse à Prigojine sans le nommer. « Les actions qui cassent notre unité, c’est en fait la trahison de notre peuple, de nos combattants qui se battent sur le front. C’est un coup dans le dos de notre peuple et de notre pays », déclare l’homme fort de Moscou.

Et d’ajouter d’un ton menaçant : « nous faisons tout pour que cela ne se répète plus jamais. (…) Nous nous défendrons de la trahison interne. Là, nous avons été contraints à la trahison et à une réelle trahison. Les ambitions personnelles ont amené à une trahison par rapport à son pays et à son peuple, par rapport à la cause pour laquelle des militaires de Wagner et des combattants ont combattu. Ils ont perdu leur vie pour l’unité du monde russe. Leur nom et leur gloire ont été trahies par ceux qui cherchent maintenant à organiser un coup d’Etat et qui veulent pousser le pays à s’entretuer, à la capitulation et à la défaite ».

Dans son allocution, sans le dire publiquement, Vladimir Poutine laisse entendre clairement que les jours de Prigojine sont comptés. « Ceux qui ont consciemment choisi la voie de la trahison, du chantage, des méthodes terroristes vont être punis très rapidement », menace-t-il. Et d’ajouter : « ils sont responsables devant le peuple et devant la loi ».

Il n’a fallu que quelques heures après ce discours pour que la mutinerie s’arrête. Les mercenaires de Wagner tout d’un coup mirent fin à l’idée surréaliste de marcher sur Moscou. Cependant, si Prigojine n’a pas été arrêté et emprisonné, il connaîtra une véritable descente aux enfers avec la perte de son immense empire médiatique et le démantèlement de ses troupes de Wagner qui désormais sont totalement sous les ordres du Kremlin.

Tout d’un coup, le « cuisinier de Poutine » (Prigojine) disparut des radars. Ses lives sur internet n’étaient plus diffusés et des rumeurs l’annonçaient du côté de la Biélorussie, pays dirigé par Alexander Loukachenko, considéré comme le plus fidèle allié de Poutine en Europe de l’Est. D’ailleurs, son rôle, en tant que médiateur lors de la mutinerie, a été déterminant.

Ainsi, Prigojine est complètement tombé en disgrâce jusqu’à sa récente apparition dans une vidéo filmée depuis un pays africain où il vantait les mérites de la présence russe dans ce continent et l’urgence de « rendre l’Afrique plus libre ». Ce fut certainement une tentative de se racheter. Mais, Prigo n’avait pas compris que son destin était scellé. Il quittera ce bas-monde ce 23 août dans des circonstances extrêmement troubles qui laissent croire qu’il a été assassiné.

La thèse de l’assassinat est d’autant plus crédible que Poutine, embarqué dans une guerre contre tout l’Occident, ne pouvait en aucun cas se permettre de maintenir dans ses rangs une  personnalité extrêmement trouble qui, par excès de pouvoir, pouvait à tout moment rallier l’Occident pour se venger du régime russe en place.

L’assassinat de Prigojine n’était certainement pas souhaitable par le Kremlin qui n’y avait probablement jamais songé. Néanmoins, sa récente folie de conquérir le pouvoir et ses sempiternelles menaces adressées aux autorités russes sur internet constituaient des dérives qui ne pouvaient plus rester impunies. Il était devenu, par ses excès de langage, un élément dangereux pour le système qu’il fallait éliminer à tout prix.

Et c’est désormais chose faite. Prigoine a trahi, Prigojine n’est plus.