Bassirou Diomaye Faye, candidat de Pastef à la présidentielle 2024 : choix de la raison ou capitulation déguisée?

Une douche froide! Les partisans de Pastef ont accueilli ce dimanche, entre euphorie et affliction, la décision annoncée par le premier parti de l’opposition sénégalaise qu’Ousmane Sonko (dont la candidature était attendue par des milliers de sympathisants) ne pourra finalement plus participer à la prochaine présidentielle, prévue ce 25 février 2024.

L’annonce a été faite par Sadick Top, l’un des ténors du parti qui a fait savoir que le « Plan B » dont une immense majorité des Pastéfiens ne voulaient pas a finalement été privilégié. Et la personne choisie pour faire face à Amadou Ba (candidat du pouvoir en place) n’est autre que Bassirou Diomaye Faye (BDF), fidèle compagnon de Sonko et en ce moment emprisonné pour « appel à l’insurrection, association de malfaiteurs, atteinte à la sûreté de l’État, complot contre l’autorité de l’État, actes et manœuvres à compromettre la sécurité publique et à créer des troubles politiques graves, association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste ». Des charges extrêmement lourdes qui risquent de compromettre toutes ses chances de briguer la magistrature suprême.

Mais, là n’est pas la question. La véritable question à se poser est celle de savoir si, ce 19 novembre, les poids lourds du premier parti de l’opposition n’ont pas sacrifié le projet porté par des millions de Sénégalais pour les beaux yeux du pouvoir en place qui ne pouvait en aucun cas accepter l’idée d’une participation de Sonko à l’une des élections présidentielles les plus déterminantes de l’Histoire de notre Nation.

En effet, à l’annonce du choix de Bassirou Diomaye Faye, les réactions ont été légion et mitigées. Pour certains, Sonko (qui l’aurait choisi comme son successeur naturel) a agi en fin stratège brouillant toutes les pistes jusqu’à la dernière minute. Pour d’autres, le seul fait d’accepter l’existence d’un « Plan B » confirme déjà que le projet est mort.

Difficile de trancher. Toutefois, en analysant de près l’argument des pessimistes et des « désenchantés » qui ont reçu une douche froide ce dimanche, il y a évidemment des raisons de penser que le projet Pastef s’est littéralement effondré pour les trois motifs suivants :

  1. en acceptant le « Plan B », le parti Pastef accepte de fait l’emprisonnement arbitraire de Ousmane Sonko qui n’aurait jamais dû se trouver derrière les barreaux
  2. en acceptant le « Plan B », Pastef crache sur la mémoire des dizaines jeunes Patriotes assassinés par le régime en mars 2021 alors qu’ils luttaient pour que leur idole (Ousmane Sonko) ne soit pas sacrifié
  3. en acceptant le « Plan B », Pastef accepte aussi l’idée que tous les sacrifices menés par Sonko face au régime sanguinaire de Macky Sall n’auront servi à rien

La situation est d’autant plus critique pour le premier parti de l’opposition sénégalaise que Bassirou Diomaye Faye est actuellement en taule et risque de ne jamais en sortir si l’Etat a la ferme conviction qu’en jouissant du fort soutien de Sonko, BDF réussira à terrasser tous ses adversaires, y compris Amadou Ba.

Les réactions ont été nombreuses ces dernières heures et plusieurs questions ont été posées par des militants cueillis à froid et qui ne s’attendaient pas du tout à ce que finalement Ousmane Sonko soit exclu par son propre parti d’une présidentielle qui tient le peuple en haleine.

Dans ce tintamarre médiatique, la seule et unique question qui a attiré mon attention a été celle-ci : Ousmane Sonko, très malade et en prison depuis plusieurs semaines, a-t-il réellement donné le feu vert pour que quelqu’un d’autre prenne le flambeau?

La démarche du parti est assez troublante et tout laisse à croire que des personnes mal intentionnées, sous la forte pression judiciaire exercée par l’Etat, ont décidé de capituler pour sauver la face.

Il faut bien le reconnaître : à trois mois de la présidentielle, Pastef semble avoir foutu toutes ses chances en l’air et le gros risque est que le parti se divise en deux entre pro-Sonko et Pro-Diomaye.

Un tel scénario ne devrait pas être écarté. Et s’il venait à se produire, ce serait hélas l’un des plus grands fiascos de l’Histoire politique du Sénégal.