Visite au Liban : Macron pense avoir réalisé une victoire historique, mais les Français s’en fichent royalement

Ce 6 août, il a été incontestablement l’homme de la situation, devenant le premier président d’un pays occidental à avoir foulé le sol libanais à la suite de l’explosion d’un entrepôt contenant 2 750 tonnes de nitrate d’ammonium. Le bilan est très lourd : plus de 137 personnes y ont péri.

L’explosion intervient dans un contexte extrêmement tendu au Liban où, depuis plusieurs semaines, des centaines de jeunes défient ouvertement leur dirigeants politiques, exigeant de ces derniers qu’ils démissionnent en les accusant d’avoir fait couler le pays. En effet, le Liban croule sous une dette de plus de 92 milliards de dollars et la devise nationale ne vaut plus rien.

C’est dans un tel contexte de crise où beaucoup craignent de voir le pays à nouveau sombrer dans une guerre civile qui risque d’embraser tout le Moyen-Orient qu’un chef d’Etat, depuis l’Occident, a jugé bon de se déplacer en personne pour soutenir un pays qui partage avec la France une richesse commune : la langue française.

En effet, ce 6 août, le président de la France a été accueilli comme un roi dans un Liban en pleine ébullition. D’ailleurs, dans une image qui a circulé sur les réseaux sociaux, on a pu voir une scène assez gênante pour le président libanais, Michel Aoun (à qui Macron a ravi la vedette) se faire copieusement conspuer par une foule en colère.

« A bas le régime! », « Aidez-nous! », scande des centaines de manifestants venus à la rencontre du président français qui, lors de sa visite au lieu du drame, a humilié la classe politique libanaise en s’y rendant tout seul. Emmanuel Macron y sera plus tard rejoint par son homologue, Michel Aoun. Mais, le message lancé par Macron a été très clair : la classe politique libanaise dans son ensemble est un désastre total à laquelle il ne faut surtout pas s’associer.

En résumé, Emmanuel Macron a reçu des ovations et acclamations là où le président libanais a été hué. Ce 6 août, sur le terrain, le monde entier a été témoin de la réalité actuelle du Liban : le régime en place est presque totalement désavoué et la France est, qu’on le veuille ou pas, perçue comme un pays sauveur.

Pour avoir une idée de la réussite de la visite de Macron auprès des Libanais, il fallait faire un petit tour sur les réseaux sociaux, notamment sur Twitter où les éloges à l’endroit du plus jeune président de la Vème République n’ont pas tari. « Je n’ai rien vu de tel, un président d’un autre pays venir aider le Liban. Il est dans la rue, parlant avec les gens et les écoutant au milieu d’une pandémie, pendant que Michel Aoun reste introuvable. Voilà le président qui mérite notre respect », a twitté une internaute libanaise du nom de Hannah.

« J’ai pleuré quand j’ai entendu Macron dire : ‘nous ne vous laisserons pas seuls parce que nous sommes la France et parce que vous êtes le Liban’. J’aurais aimé entendre cela d’un président arabe ou de Aoun. Merci Macron, Merci la France », a réagi Khatoun Haider, militante libanaise.

Il n’y a eu aucun doute que face à la crise politique qui secoue le Liban, l’arrivée du président français à Beyrouth a soulagé plus d’un. Et ce qu’il faut noter lors de cette visite d’Emmanuel Macron est que le président français n’a pas voulu se limiter à son rôle de simple visiteur venu constater les dégâts causés par une explosion dans un pays ami. Il a pris son courage à deux mains, proposant un nouveau pacte politique devant la presse.

« Je suis là aujourd’hui. Je vais leur proposer un nouveau pacte politique cette après-midi et je reviendrai pour le 1er septembre. Et s’ils ne savent pas les tenir, je prendrai mes responsabilités », a-t-il menacé. Face à la foule, conscient de la polarisation de la classe politique libanaise, Macron a joué la carte de la prudence, préférant prendre ses distances avec toute l’élite politique du pays. « Je ne suis pas là pour cautionner quel que régime ou quel que politique que ce soit », précise-t-il, essayant ainsi de balayer d’un revers de main toute accusation d’ingérence.

Cependant, la visite de Macron au Liban risque d’avoir très peu de retombées politiques pour le président à moins de deux ans d’une présidentielle cruciale. En effet, s’il brille à l’étranger, le plus jeune président de la République n’arrive toujours pas à convaincre ses concitoyens et les récentes crises sociales qui ont bloqué le pays tout entier ont fini par l’affaiblir considérablement.

En tout cas, ce 6 août, sur les réseaux sociaux, son voyage au Liban n’a suscité qu’ironie et indignation. En gros, son voyage au pays des cèdres, aussi important fût-il, a suscité très peu d’intérêts chez les Français qui ont d’autres préoccupations. Pour certains, ce fut un spectacle. C’est le cas de l’internaute Tropical Boy dont le twitte n’a pas manqué de provoquer un fou rire des internautes.

Un autre twitte abonde dans le même sens.

D’autres ont été plus sévères. C’est notamment le cas de Sébastien Jallamion qui a prévenu les Libanais d’un risque de perte de leur souveraineté.

De son côté Alexis Corbière de la France Insoumise dénonce une ingérence française dans les affaires internes du Liban.

Emmanuel Macron veut replacer la France sur l’échiquier politique international. Ce qui est une excellente idée et il faut reconnaître qu’il le fait plutôt bien. Néanmoins, son projet est mal barré car les Français l’attendent dans sa politique nationale qui peine tant à convaincre.

Au Liban, il peut se proclamer Jupiter. En France, ses faits et gestes n’intéressent pas trop.