La Côte d’Ivoire s’achemine tout droit vers un avenir incertain à la suite de la publication ce 14 septembre de la liste des candidats autorisés à se présenter à la présidentielle d’octobre prochain. Sans surprise, le Conseil Constitutionnel s’est plié au désiderata du chef, le tout-puissant Alassane Ouattara qui, contre vents et marées, est prêt à se maintenir au pouvoir, quitte à embraser le pays tout entier.
Je dois faire remarquer que sur 45 candidatures, seules 4 ont été retenues. Et sur ces 4, le pouvoir a bien pris le soin de choisir les opposants les moins virulents pour Ouattara. Ainsi, ni Guillaume Soro, ni Laurent Gbagbo ne prendront part à la présidentielle prochaine très attendue par l’opposition.
Le passage en force d’Alassane Ouattara est tout sauf démocratique. Il témoigne en effet d’une volonté de se maintenir au pouvoir contre la volonté d’une grande partie du peuple. C’est d’autant plus lamentable que la Constitution semble avoir tranché limitant le nombre de mandats à deux.
Lors de sa dernière visite en France, où il a rencontré Emmanuel Macron, Alassane Ouattara aurait évoqué la question de la présidentielle d’octobre avec le président français qui, de source fiable, lui aurait suggéré de rendre le tablier et de faciliter une transition démocratique. Une suggestion qu’il aurait refusée, rassurant le plus jeune président de la Vème République que la situation est sous contrôle.
Depuis bientôt trois semaines, les tensions montent d’un cran en Côte d’Ivoire où des opposants politiques manifestent dans les rues du pays pour dénoncer le tripatouillage de la Constitution par Ouattara et ses sbires. Le système de parrainage imposé ainsi que le nombre important de candidatures rejeté confirment une véritable manœuvre politicienne pour remporter une parodie d’élection dont le résultat est déjà connu.
Cependant, ce qui est sidérant dans cette histoire est la posture de la CEDEAO (Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) qui met la pression sur le Mali depuis le 18 août, date à laquelle l’ancien président Ibrahim Boubakar Keïta a été renversé par un groupuscule de mutins dont la volonté n’a été autre que de rétablir l’ordre dans un pays où l’autorité politique avait totalement été dépassée par les événements.
Au Mali, les ténors de la CEDEAO exercent leur autorité sans état d’âme, exigeant, dans les plus brefs délais, une transition politique civile sous peine de sanctions contre un pays économiquement dévasté et qui se bat pour assurer sa survie. Ce qui prête à rire est que parmi les personnalités de la CEDEAO impliquées dans les négociations pour une sortie de crise au Mali figure Alassane Dramane Ouattara qui, d’ailleurs, a pris part au sommet d’Accra consacré à ce pays et qui s’est tenu il y a deux jours.
Ce que la CEDEAO feint d’ignorer est que dans un mois ou plus, ses membres seront certainement appelés à tenir de nouveaux sommets pour venir en aide à autre pays de la communauté pris en otage par son président. Autant il est important de se focaliser sur le cas malien afin d’apporter des solutions dans les plus brefs délais, autant il est hypocrite de fermer ses yeux quand un autre pays de la communauté est en passe de se transformer en une poudrière.
La CEDEAO a du pain sur la planche. Elle a aujourd’hui, compte tenu de la réalité politico-sociale très complexe de la Côte d’Ivoire, l’obligation de faire entendre sa voix et d’asséner ses vérités à Alassane Ouattara et à tout dirigeant membre de la Communauté qui refuserait de se plier aux exigences démocratiques. Ni Ouattara, ni Macky Sall… n’ont le droit de se maintenir au pouvoir en violation totale de la Constitution.
En l’état actuel, le silence de la CEDEAO sur ce qui est en train de se passer en Côte d’Ivoire la rend complice. Elle est devenue, malgré elle, une partie du problème.